Peut-on encore dire quelque chose de Georges Bernanos et de son œuvre immense ? Depuis sa disparition en 1948, le « vieux lion » a suscité des milliers d’articles, des études, monographies et biographies diverses. Considéré par Rober Nimier comme le « Grand d’Espagne » de toute une génération orpheline, Bernanos reste aujourd’hui encore le « capitaine » de jeunes gens avides de certitude, de pureté et de radicalité.
La particularité du travail de Cécile Delorme-Reboul, Georges Bernanos, une chrétien dans la cité (Ad Solem, 206 pages, 23€), est de ne pas offrir un livre de plus sur le chrétien Bernanos, mais de s’interroger à sa suite sur la place du chrétien dans la cité, en situation de non chrétienté.
Le fil rouge de ce livre, en effet, c’est bien l’évangélisation de la cité. Et la réponse, c’est Bernanos qui la donne. Surprise ? Pas vraiment ! Cette réponse rompt à la fois avec la nostalgie et avec le spontanéisme spirituel. Elle se veut enracinée, non dans le fonctionnarisme clérical, même enveloppé des meilleurs intentions, mais plutôt dans la charge, le devoir du laïc, dans une « besogne temporelle » pour reprendre la terminologie ancienne France de Bernanos. Pour celui-ci, il faut, en effet, avant tout être un homme d’honneur, c’est-à-dire « un homme véritable, capable de ne se laisser contraindre par aucune forme d’oppression, qu’elle soit violente ou sournoise, cléricale, militaire ou totalitaire. » Mais, attention ! Ce n’est ni parce qu’on est chrétien que l’on est un homme d’honneur, ni parce qu’on éructe sans cesse au nom de l’honneur que l’on est habité par celle-ci. L’homme chrétien, qui n’est pas non plus l’homme parfait, doit pouvoir s’imposer au monde par sa dignité et sa solidité. C’est du moins l’approche de l’auteur. Mais n’est-ce pas ignorer d’une certaine façon les médiations nécessaires ? À moins que les temps soient effectivement venus d’opposer à la nuit de la barbarie soft d’une société technicienne dénoncée également par Bernanos le profond regard de l’honneur.
Sur Bernanos, on pourra consulter le site de l’association internationale Georges Bernanos, laquelle a d’ailleurs signalé la parution du livre de Cécile Delorme-Reboul