Saint François de Sales est l’auteur bien connu de L’introduction à la vie dévote, titre qui souffre à nos oreilles modernes des attaques de Molière contre le parti des dévots et d’évocations renvoyant plutôt à la naphtaline qu’au Christ. Nous avons évidemment tort puisque cette introduction est un véritable bréviaire du laïcat, placé par état dans le monde.
Moins connu certainement est, du même auteur, le Traité de l’amour de Dieu. J’avoue que je connaissais ce livre de nom, mais son épaisseur m’avait toujours rebutée. Et je ne parle pas de son écriture en vieux « françois » ! L’un me servait de prétexte pour ne pas vouloir le lire ; l’autre d’excuse pour ne pas le lire effectivement.
Une bonne fée – mais je devrais dire une bonne âme – à régler le problème pour moi en me mettant dans les mains une nouvelle édition de ce livre, parue en avril dernier aux éditions du Cerf, dans la célèbre collection « Sagesses chrétiennes ».
À vrai dire, au point de départ, mes réticences n’avaient pas changé. L’épaisseur du volume était toujours au rendez-vous : 1036 pages, avec il est vrai la présentation et les nombreux appendices. Le prix du volume aurait pu me servir à nouveau de prétexte et d’excuse : 40 €, mais ce qui rend, après tout, la page de spiritualité (on ose tout, n’est-ce pas ?) à : 0,038€. L’excuse perdait de sa crédibilité. Enfin ruine totale pour ma lâcheté : ce livre m’a été offert. Il ne me restait plus qu’à le lire.
Disons-le tout de suite, je suis loin de l’avoir terminé. Pour savourer la chose, je lis un chapitre par jour, lequel ne fait jamais plus de trois pages. Dans sa conception, saint François de Sales est quelqu’un de très moderne. Il sait que son laïc de lecteur ne consacrera pas beaucoup de temps à la lecture spirituelle.
Cette modernité est renforcée dans l’édition du Cerf par le travail remarquable – je ne vois pas d’autres mots – du père Didier-Marie Proton qui a mis en français contemporain le Traité de l’amour de Dieu. Du coup, la lecture est aisée, facile, et on va directement au sens spirituel du texte plutôt que de chercher à déchiffrer l’ancien français. Je sais : les puristes regretteront cette mise en français contemporain et crieront à la trahison. Qu’ils lisent le Traité dans son texte d’origine. Pour ceux qui comme moi se sentent en la matière très « contemporains » l’édition Proton (au passage, il a fait le même travail pour L’Introduction à la vie dévote, au Cerf) permettra de découvrir ce trésor spirituel. Et de vérifier au passage que l’amour de Dieu et du prochain enseigné aux laïcs ne date pas du dernier Concile.
Moins célèbre que l’introduction à la vie dévote, le Traité de l’amour de Dieu, présenté ici en français contemporain, n’en est pas moins considéré comme un chef-d’oeuvre de la littérature spirituelle universelle.
Saint François de Sales énonce dans sa préface le but qu’il recherchait en l’écrivant : ” Présenter franchement, sans ambages, sans art, et simplement, l’histoire de la naissance, du progrès, du déclin, des opérations. propriétés, bienfaits et excellences de l’amour divin “.
Cet amour, François de Sales le contemple, il en brûle, il en est consumé, et il n’a de cesse de le faire connaître.
Il veut régénérer par la vie intérieure la foi des catholiques après les ravages des guerres de Religion, et répondre ainsi aux reproches souvent fondés des protestants à leur égard de se contenter d’une religion tout extérieure.
Dans cette somme de théologie mystique, c’est sa propre expérience spirituelle, éclairée par celle de sainte Jeanne de Chantal et des premières visitandines, que François de Sales nous livre : Dieu attire l’âme par des liens d’amour, et celle-ci y répond librement, mue du dedans par son inclination naturelle à aimer Dieu par-dessus toute chose. Ainsi la quête de l’homme qui cherche Dieu rejoint la quête de Dieu qui cherche l’homme.
Au sommet de l’union avec Dieu, après avoir fait ce qu’elle pouvait, l’âme devient totalement et saintement indifférente, même – ô paradoxe – à ses propres progrès dans la vertu, s’en remettant tout entière à Dieu.
Ni sa vie, ni sa perfection, ni rien que ce soit d’autre, ne lui appartiennent plus. Elle est toute à Dieu, et Dieu est à elle.
Voilà donc le chemin que François de Sales a parcouru et où il nous invite à le rejoindre.
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