Le vendredi 6 janvier, en la solennité de l’Epiphanie, le Saint-Père a célébré la Messe dans la Basilique Saint-Pierre, conférant la consécration épiscopale à deux nouveaux Evêques. Dans son homélie, il a fait un rapprochement intéressant entre la figure des Mages et la mission des évêques. En voici l’extrait :
Durant cette Messe je conférerai l’Ordination épiscopale à deux prêtres, je les consacrerai Pasteurs du peuple de Dieu. Selon les paroles de Jésus, précéder le troupeau fait partie de la charge du Pasteur (Jn 10,4). Donc, dans ces personnages qui comme les premiers païens trouvèrent le chemin vers le Christ, nous pouvons peut-être chercher – malgré toutes les différences de vocations ou de fonctions – des indications regardant la charge des Évêques. Quel genre d’hommes étaient-ils ? Les experts nous disent qu’ils appartenaient à la grande tradition de l’astronomie qui à travers les siècles s’était développée en Mésopotamie et y fleurissait encore. Cependant cette information seule ne suffit pas. Il y avait peut-être de nombreux astronomes dans la Babylone antique, mais seul ce petit nombre s’est mis en route et a suivi l’étoile en laquelle il avait reconnu l’étoile de la promesse, celle qui indique la route vers le vrai Roi et Sauveur. Ils étaient, pourrions-nous dire, des hommes de science, mais non seulement dans le sens où ils voulaient connaître beaucoup de choses : ils voulaient davantage. Ils voulaient comprendre ce qui compte dans l’être humain. Probablement avaient-ils entendu parler de la prophétie du prophète païen Balaam : « Un astre issu de Jacob devient chef et un sceptre se lève, issu d’Israël » (Nb 24,17). Ceux-ci approfondirent cette promesse. C’étaient des personnes au cœur inquiet, qui ne se contentaient pas de ce qui paraît et est habituel. C’étaient des hommes à la recherche de la promesse, à la recherche de Dieu. Et c’étaient des hommes attentifs, capables de percevoir les signes de Dieu, son langage discret et insistant. Mais c’étaient encore des hommes à la fois courageux et humbles : nous pouvons imaginer qu’ils durent supporter quelques moqueries parce qu’ils s’étaient mis en route vers le Roi des Juifs, affrontant pour cela beaucoup de fatigue. Pour eux, ce que pensait d’eux celui-ci ou celui-là ou encore les personnes influentes ou intelligentes, n’était pas déterminant. Pour eux, ce qui comptait était la vérité elle-même, et non l’opinion des hommes. Pour cela ils affrontèrent les renoncements et les fatigues d’un voyage long et incertain. Ce fut leur courage humble qui leur permit de pouvoir s’incliner devant le petit enfant de gens pauvres et de reconnaître en Lui le Roi promis dont la recherche et la reconnaissance avait été le but de leur cheminement extérieur et intérieur.
Chers amis, comment ne pas voir en tout cela quelques-uns des traits essentiels du ministère épiscopal ? L’Évêque lui aussi doit être un homme au cœur inquiet qui ne se contente pas des choses habituelles de ce monde, mais suit l’inquiétude de son cœur qui le pousse à s’approcher intérieurement toujours plus de Dieu, à chercher son Visage, à Le connaître toujours mieux, pour pouvoir l’aimer toujours plus. L’Évêque doit être lui aussi un homme au cœur vigilant qui perçoit le langage discret de Dieu et sait discerner le vrai de l’apparent. L’Évêque encore doit être rempli du courage de l’humilité, qui ne s’interroge pas sur ce que peut dire de lui l’opinion dominante, mais tire son critère de mesure de la vérité de Dieu, et pour elle s’engage « opportune – importune » à temps et à contre-temps. Il doit être capable d’ouvrir et d’indiquer la route. Il doit marcher en avant, suivant Celui qui nous a tous précédés, parce qu’il est le vrai Pasteur, l’étoile véritable de la promesse : Jésus-Christ. Et il doit avoir l’humilité de s’incliner devant ce Dieu qui s’est rendu si concret et si simple qu’il contredit notre stupide orgueil, qui ne veut pas voir Dieu aussi proche et aussi petit. Il doit vivre l’adoration du Fils de Dieu fait homme, adoration qui lui indique toujours à nouveau la route.
La liturgie de l’Ordination épiscopale interprète l’essentiel de ce ministère en huit questions posées aux candidats à l’ordination, qui commencent toujours par la parole : « Vultis ? – Voulez-vous ? ». Les questions orientent la volonté et lui indiquent la route à prendre. Je voudrais ici mentionner brièvement quelques unes des paroles-clés d’une telle orientation, dans lesquelles se concrétise ce sur quoi nous avons réfléchi peu auparavant à partir des Mages de la fête d’aujourd’hui. La charge des Évêques est de « predicare Evangelium Christi », « custodire » et « dirigere », « pauperibus se misericordes praebere », « indesinenter orare ». Annoncer l’Évangile de Jésus-Christ, précéder et conduire, garder le patrimoine sacré de notre foi, la miséricorde et la charité envers les plus nécessiteux et les pauvres en qui se reflète l’amour miséricordieux de Dieu pour nous et, pour finir, la prière continue sont des caractéristiques fondamentales du ministère épiscopal. La prière continue qui signifie ne jamais perdre contact avec Dieu, se laisser toujours toucher par Lui dans l’intime de notre cœur et être ainsi envahis par sa lumière. Seul celui qui connaît Dieu personnellement peut guider les autres vers Dieu. Seul celui qui guide les hommes vers Dieu, les guide sur le chemin de la vie.