Dans Présent de demain, Jean Madiran revient sur l’article de Mgr Ocariz paru dans L’Osservatore romano du 2 décembre dernier et auquel répond l’abbé Gleize dans un article à paraître dans Le Courrier de Rome et dont on peut trouver des extraits, comme je l’ai déjà signalé, sur le site DICI.
Mais Jean Madiran montre avec pertinence qu’à force de ne pas répondre explicitement aux critiques adressées à Vatican II – sur lesquelles le magistère devra bien se prononcer –, les théologiens finissent pas entrer dans l’ubuesque. Que dit, en effet, Mgr Ocariz ? Tout simplement (!) ceci :
« Le fait, qu’un acte du Magistère de l’Eglise ne soit pas garanti par le charisme de l’infaillibilité ne signifie pas qu’il puisse être considéré comme “faillible”, au sens où il transmettrait une “doctrine provisoire” ou encore des “opinions autorisées”. »
Sans s’en rendre compte, le prélat lance ainsi une nouvelle catégorie : le faillible infaillible ou l’infaillible faillible.
Comme l’écrit Jean Madiran :
Il tente ainsi d’instituer, pour renforcer ce qui n’est évidemment pas infaillible, la promotion d’une non-faillibilité qui serait une sorte d’infaillibilité alternative, subreptice, non officielle mais impérative.
Et de conclure très justement :
Les deux livres de Gherardini, sa « Supplique au Saint Père », et celle qui a suivi, d’une cinquantaine de personnalités italiennes, « au pape Benoît XVI pour un examen approfondi du concile œcuménique Vatican II », tout cela, en marge des requêtes propres à la FSSPX et finalement dans le même sens, exprime la persistance d’une réclamation qui s’est manifestée avec une insistance ininterrompue depuis quarante-cinq ans. Elle tend à une réinterprétation point par point de l’ensemble des nouveautés de Vatican II. Autrement dit, quand le moment sera venu, une sorte de Vatican III doctrinal pour un examen théologique du Vatican II pastoral : la comparution des nouveautés devant les critères traditionnels du Magistère de l’Eglise, pour obtenir que soient tranchées les contestations, les divergences, les oppositions. Mais elles ne pourront l’être, demain ou plus tard, en concile ou sans concile, que par le Pape.
La conclusion de Jean Madiran rejoint en effet les propos de Mgr Gherardini dans son livre ” Le Concile Vatican II, un débat qui n’a pas eu lieu.”
Dans cet ouvrage, Mgr Brunero Gherardini, chanoine de l’Archibasilique vaticane et directeur de la revue internationale de théologie Divinitas, ne se contente pas de déplorer que le débat sur le concile Vatican II n’ait pas eu lieu, il montre pourquoi il serait aujourd’hui plus que jamais indispensable.
Et surtout il indique comment ce débat pourrait être ouvert, nous donnant les premiers éléments d’une analyse rigoureuse, loin des invectives stériles et des ovations aveugles.
Les livres de Mgr Gherardini, sur Livres en Famille : http://www.livresenfamille.fr/p5442-brunero_gherardini_le_concile_vatican_ii_un_debat_qui_n_pas_eu_lieu.html
Un Vatican III ?
Bonjour et bon dimanche,
Je me permets de vous renvoyer à la précision qui est apportée, en note n° 1, au tout début de la Constitution pastorale Gaudium et Spes, telle qu’on peut la lire sur le site internet officiel du Vatican :
” [1] La Constitution pastorale « L’Église dans le monde de ce temps », si elle comprend deux parties, constitue cependant un tout. On l’appelle Constitution « pastorale » parce que, s’appuyant sur des principes doctrinaux, elle entend exprimer les rapports de l’Église et du monde, de l’Église et des hommes d’aujourd’hui. Aussi l’intention pastorale n’est pas absente de la première partie, ni l’intention doctrinale de la seconde. Dans la première partie, l’Église expose sa doctrine sur l’homme, sur le monde dans lequel l’homme est placé et sur sa manière d’être par rapport à eux. Dans la seconde, elle envisage plus précisément certains aspects de la vie et de la société contemporaines et en particulier les questions et les problèmes qui paraissent, à cet égard, revêtir aujourd’hui une spéciale urgence. Il s’ensuit que, dans cette dernière partie, les sujets traités, régis par des principes doctrinaux, ne comprennent pas seulement des éléments permanents, mais aussi des éléments contingents. On doit donc interpréter cette Constitution d’après les normes générales de l’interprétation théologique, en tenant bien compte, surtout dans la seconde partie, des circonstances mouvantes qui, par nature, sont inséparables des thèmes développés. ”
A mon sens, nous n’avons pas à infaillibiliser, à intemporaliser, à sous-analyser, à surlégitimer, un document qui comporte en son sein une précaution ou une précision préalable telle que celle que je viens de mentionner.
La Constitution pastorale Gaudium et Spes, “sur l’Eglise dans le monde de ce temps”, qui est, en réalité, une Constitution pastorale sur l’homme dans le monde de ce temps, ne doit être ni “angélisée”, ni “diabolisée”, mais doit être analysée, dans tous ses aspects et enjeux, car elle comporte dans sa forme, une certaine créativité, dans son fond, une certaine générosité, mais aussi des ambiguités ou des apories, et des impensés ou des imprécisions, bien des paroles, mais aussi bien des silences, ou en tout cas pas beaucoup de paroles condamnatrices ou dénonciatrices,
– non seulement sur le faux humanisme vraiment répressif du collectivisme capitaliste d’Etat qu’est le communisme,
– mais aussi sur le véritable hédonisme faussement permissif de l’individualisme capitaliste de marché qu’est le libéralisme.
Je prends l’exemple de Gaudium et Spes, parce que c’est probablement le texte qui montre le mieux à quel parti-pris asymétrique, en faveur du maximum de bienveillance et du minimum de vigilance, les Pères du Concile ont eu, a minima, la tentation de succomber, dans leur vision “descriptive” et “positive” de l’homme MODERNE et du monde MODERNE en tant que tels.
Heureusement pour le présent et l’avenir du christianisme catholique, le Concile Vatican II, avant tout et notamment dans Gaudium et Spes, n’est doté ni d’une non faillibilité absolue, ni d’une infaillibilité relative, ce qui ne signifie pas qu’il est totalement dépourvu de valeur, loin de là.
Je vous souhaite un bon dimanche.
A Z