Ceux qui s’intéressent à l’histoire de la philosophie chrétienne liront certainement avec intérêt un livre paru cette année sous le titre « Mon cher collègue et ami » (Parole et silence, 114 pages, 13€). C’est ainsi qu’à partir du 22 octobre 1966 Étienne Gilson, bien connu pour le rôle qu’il joua pour faire connaître la pensée médiévale en général et celle de saint Thomas d’Aquin en particulier, écrivit à son cadet, le philosophe Augusto Del Noce que les revues 30 Jours et Catholica firent connaître en France.
Ce recueil comprend donc les lettres adressées par le Français à Del Noce entre 1964 et 1969. Malheureusement, à part une, nous n’avons pas les réponses du philosophe italien à son illustre correspondant, si bien que certains aspects restent énigmatiques. Le sujet principal est, bien évidemment, la modernité et le constat du drame posé par celle-ci, avec des convergences dans l’analyse, bien sûr, mais aussi des divergences.
Le Concile et la situation dramatique de l’Église catholique à cette époque font aussi l’objet de plusieurs lettres. Gilson y évoque notamment ses Divagations parmi les ruines et son livre Les Tribulations de Sophie. Theilhard est aussi le grand sujet avec ce propos de Gilson : « je m’efforcerai de ne plus fournir de telles armes aux prêtres atteints de Theilhardose aigüe, comme le P.H. de Lubac, que j’aime pourtant beaucoup, mais qui perd toute lucidité quand il s’agit de Theilhard. » Au total, un aperçu intéressant de la vie intellectuelle de l’après-concile.