Voilà, on y est, et au nom de la fin de l’hypocrisie encore. Trois spécialistes des unités de soins intensifs, de la bioéthique et de la médecine ont vendu la mèche : prétendre que l’opération de prélèvement d’organes vitaux ne se fait que sur des personnes décédées est souvent faux, et résulte d’une définition purement idéologique de la mort, une « stratégie idéologique », disent-ils, formulée dans le but d’élargir le champ des prélèvements possibles.
Et qui varie d’un pays à l’autre, pourrions-nous ajouter.
Le Dr Neil Lazar, directeur de l’unité de soins intensifs de l’hôpital de Toronto, le Dr Maxwell J. Smith de l’université de Toronto et David Rodriguez-Arias de l’université du Pays-Basque en Espagne, se sont exprimés en ce sens lors d’une conférence de bioéthique en octobre après avoir publié leurs propos dans l’American Journal of Bioethics au mois d’août. Ils évoquaient le cas particulier des prélèvements après la mort circulatoire (DCD, donation after circulatory death) qui sont faits aussi rapidement que possible après l’arrêt cardiaque : parfois 75 secondes plus tard.
Voici l’abstract, dont je propose ma traduction :
« En dépit des controverses qui se poursuivent à propos du statut vital à la fois des donneurs en état de mort cérébrale et de ceux qui se soumettent à la procédure de donation après la mort circulatoire (DCD), le respect de la règle du donneur mort (dead donor rule, DDR) demeure le cadre moral de base pour le prélèvement d’organes. La DDR augmente le nombre d’organes disponibles sans mettre en péril la confiance à l’égard des systèmes de transplantation, en rassurant la société quant au fait que les donneurs ne subiront aucun mal au cours du prélèvement.
Alors que la présomption selon laquelle on ne peut faire de mal aux individus qui sont déjà morts est raisonnable dans le cadre des protocoles relatifs à la mort cérébrale, nous soutenons, que la DDR ne constitue pas une stratégie acceptable pour assurer la protection des donneurs de tout dommage dans le cadre des protocoles DCD. Nous proposons une triple alternative en vue de justifier les pratiques de prélèvements d’organes :
1. S’assurer que les donneurs sont suffisamment protégés du dommage,
2. S’assurer qu’on les respecte à travers le consentement informé,
3. S’assurer que la société est pleinement informée du caractère intrinsèquement discutable de tout critère de définition de la mort. »
Leur prestation, il faut le dire, a rencontré de vives contestations, que les spécialistes pourront aller voir, pour des raisons avouables, sans doute, mais sans doute aussi pour d’autres qui le sont moins : la peur de voir les candidats au don d’organes y réfléchir à deux fois.
Leur franchise – on prélève souvent sur des vivants – est de fait une contradiction frontale de tout le discours des promoteurs du dons d’organes. Mais loin de dénoncer la pratique, ils proposent au contraire d’en finir avec la règle du donneur mort – le le DDR – afin de pouvoir instituer des protocoles de prélèvement comprenant des procédures de lutte contre la douleur, par exemple, afin d’éviter toute souffrance au donneur.
« Au bout du compte, ce qui importe pour assurer la protection et le respect des donneurs potentiels n’est pas de faire signer un certificat de décès, mais bien plutôt d’être sûrs qu’ils ne sont plus en état de souffrir et de garantir le respect de leur autonomie », écrivent-ils, cités ici par Kathleen Gilbert de LifeSite.
Pour LifeSite, le Dr Paul Byrne, professeur de pédiatrie à l’université de Toledo aux Etats-Unis et néonatalogiste, a réagi sans étonnement :
« Tous ceux qui participent à la transplantation d’organes savent que les donneurs ne sont pas véritablement morts. Comment obtenir des organes sains sur un cadavre ? C’est impossible. »
Le Dr Byrne a précisé que l’administration d’analgésiques aux donneurs se fait de manière habituelle. Les médecins qui prélèvent des organes sur les donneurs en état de mort cérébrale « sont obligés de les paralyser afin qu’ils ne bougent pas lorsqu’ils les découpent pour prélever des organes, et lorsqu’ils les paralysent sans anesthésiants, leur fréquence
cardiaque augmente, ainsi que leur pression sanguine. Ce n’est pas quelque chose qui survient chez quelqu’un de véritablement mort ».
Il affirme qu’en réalité la règle du donneur mort mort n’existe pas, « on essaie juste d’y faire croire ».