Treize personnalités en vue – universitaires, soignants et médecins côtoyant libre-penseurs et promoteurs de l’euthanasie – ont publié une lettre ouverte adressée au formateur et à tous les négociateurs chargés de mettre en place le nouveau gouvernement belge, Elio di Rupo en tête pour demander une révision de la loi en vue de rendre l’euthanasie plus largement accessible. Il est « urgent », assurent-ils, d’étendre ce « droit » posé en 2002 aux déments, aux mineurs capables d’exprimer leur volonté, à ceux qui souffrent de tumeurs cérébrales avancées. Ils demandent au « formateur » de prendre l’engagement de laisser un tel projet passer la barre des commissions parlementaires, ce qui s’est avéré impossible jusqu’à présent.
Parmi les signataires, on trouve par exemple Wim Distelmans, qui occupe la chaire « Fin de vie digne » de l’Université libre de Belgique, Marc van Hoey, médecin généraliste et vice-président de « Droit à une mort digne », un psychiatre, une infirmière et d’autres membres de LEIF (Forum d’information sur la fin de vie), d’autres professeurs d’université et des membres d’associations « humanistes ».
Cela limite bien sûr la portée de l’initiative : elle n’émane pas d’un parti majoritaire mais de groupuscules activistes. On aurait tort cependant de la balayer d’un revers de main : ce sont de telles pressions du lobby euthanasique qui ont abouti aux premières législations autorisant la mise à mort des faibles, des vieux et des mourants. A noter aussi, la proximité de leurs demandes avec celles qui sont présentées actuellement aux Pays-Bas, où l’on procède déjà à la mise à mort de personnes en voie de devenir démentes.
Les signataires demandent un « débat public », mais en soulignant que la première loi d’euthanasie avait déjà été portée par une « large majorité » de Belges. Comme les référendums à sens unique…
Florilège :
• « Une déclaration de volonté d’euthanasie qui doit être renouvelée tous les cinq ans n’est plus soutenable. D’autant que, tout comme tout autre “testament”, cette déclaration peut être à tout moment modifiée par le signataire ou déclarée nulle. Il nous semble donc inutile de poser une limite dans le temps.
• « Les patients vieux et très malades, encore plus que les autres, ont besoin d’une “obligation de renvoi” (vers un médecin non objecteur), qui fait d’ailleurs partie des bonnes pratiques définies par l’Ordre des médecins auxquelles chaque médecin est déontologiquement soumis. »
• « Les soignants qui assistent et informent lors de l’établissement d’une déclaration de volonté n’arrivent plus à expliquer que cette déclaration ne vaut qu’en cas d’“inconscience irréversible”, tel un coma. Un sondage (…) montre que plus de 80 % des interrogés souhaitent une extension de la loi aux “incapacités acquises d’expression de la volonté” (comme elles existent en cas de tumeurs cérébrales avancées et de démence liée à Alzheimer. »
• « L’expérience prouve qu’un mineur, au cours d’une maladie qui s’éternise, peut avoir la maturité de demander l’euthanasie de façon très bien pesée » : il s’agit de supprimer toute limite d’âge.
Il est intéressant de souligner que les signataires demandent un suivi public plus serré des « sédations palliatives », qui n’entrent pas de le champ de la loi d’euthanasie actuelle et permettent aux médecins de prendre des décisions « par dessus la tête » des patients ou de leur famille. A l’inverse, les signataires regrettent que les décisions de stopper un traitement (y compris l’administration de nourriture) sont souvent interprétées comme des agressions ou des meurtres par le ministère public. Il s’agirait donc de faire enregistrer toutes ces décisions de la même façon que l’euthanasie.
Clarification (la sédation palliative peut être une forme d’euthanasie) ou brouillage de pistes ? La question est ouverte
Mais on retiendra les statistiques invoquées par la lettre :
« Une enquête récente montre qu’environ la moitié de tous les décès en Belgique est survient à la suite d’une des décisions précitées : 50.000 sur 100.000 ! »
Ou plus précisément, sur 100.000 décès : 1.900 euthanasies, 19.000 sédations palliatives, et 30.000 arrêts de traitements devenus inutiles considérés comme « acharnement thérapeutique », avec toutes les ambiguïtés qui peuvent s’abriter derrière cette notion juste.