Vaillant miles Christi et intellectuel catholique de premier plan, le célèbre professeur Ralph McInerny, 83 ans, a été rappelé à la droite du Père hier matin. C’est une perte
extrêmement sensible.
Auteur de plus de quarante ouvrages universitaires (notamment de philosophie qu’il enseignait), mais aussi de quatre-vingt romans policiers (dont la fameuse série du “Father Dowling”
portée avec succès sur le petit écran), ce thomiste, co-fondateur avec Michael Novak du magazine Crisis (aujourd’hui InsideCatholic), écrivit littéralement
des milliers d’articles scientifiques ou destinés au grand public, mais il fut d’abord et avant tout un formidable professeur d’un rare dévouement et d’une rare générosité pour ses étudiants :
chacun de ses cours étant imperturbablement et systématiquement ponctué par une phrase en latin ou… en français !
C’est à l’Université Notre Dame qu’il fit l’essentiel de sa carrière d’enseignant : 54 ans… Il prit sa retraite en juin dernier non sans avoir dit ce qu’il pensait de l’invitation par
Notre Dame d’Obama.
C’est en hommage pour ce grand disparu que je traduis à votre intention un texte qu’il avait écrit le 23 mars 2009 dans The Catholic Thing sur cette scandaleuse invitation.
Honneur à McInerny et honte au Père Jenkins !
« Obama vaut-il une Messe ? 1
Dès lors que le président de l’avortement va être honoré, fêté et écouté lors de la cérémonie des remises de diplômes de Notre Dame, la question qui se pose est : qui va célébrer la Messe de
couronnement ?
L’Université Notre Dame a officiellement et avec beaucoup d’autosatisfaction invité le président Obama a venir faire un discours aux diplômés et à recevoir un doctorat honoris causa en droit.
Pour dire les choses franchement, c’est un pied de nez collectif à l’Église catholique à laquelle Notre Dame prétend être fidèle. Fidèle ? Allez raconter cela à Julien l’Apostat.
Que quelqu’un qui procure ou défend l’avortement s’exclut en cela lui-même de la communion avec l’Église est une doctrine évidente depuis toujours, et un nombre croissant d’évêques a trouvé le
courage de dire à ces hommes politiques catholiques qui sont les grands pourvoyeurs des lois d’avortement qu’ils ne peuvent pas recevoir la Sainte Communion. N’est-ce pas pire encore que de fêter
un politicien comme Barack Obama ? Et où cela situe-t-il le président de ND, le Père Jenkins ? Puisqu’il ne peut pas célébrer la Messe sans recevoir le corps, le sang, l’âme et la divinité de
Notre Seigneur Jésus-Christ, il devra sans doute se récuser et demander à ce que quelqu’un d’autre célèbre la Messe. Mais à qui s’adressera-t-il ? Toutes ses cohortes sont rangées sous la même
enseigne que lui. Peut-être que le pasteur de l’ancien temple du Président à Chicago sera invité à haranguer les diplômés, leurs parents, le corps enseignant – enfin, ceux qui viendront à la
cérémonie cette année. Pourquoi pas ?
Sans doute peut-être parce qu’on lui a remis en mémoire les sermons qu’il a entendus pendant des années, Barack Obama a pris ses distances, comme ils disent, de ce fougueux orateur aux pieds
duquel il était assis pendant des décennies. En cela, quels que soient ses motifs, il a peut-être indiqué aux administrateurs de Notre Dame la voie de leur rachat. Peut-être sont-ils ignorants
des annales pro-avortement d’Obama. Peut-être n’ont-ils pas été attentifs à tout ce qu’il a déjà fait comme Président. Leur étant rappelé tout cela, et conscients du péril dans lequel leur
position les place vis-à-vis de l’Église s’ils fêtent ainsi le Président, peut-être annuleront-ils leur invitation d’une manière aussi publique qu’ils l’ont lancée ? N’y comptez pas.
Pour quelqu’un dont la carrière de cinquante-quatre années à Notre Dame va s’achever en juin prochain, c’est une amertume que de songer à l’orateur de cette cérémonie de 2009. Il est tout à fait
approprié de se trouver une excuse pour être absent de ces festivités. Écouter un discours de remise des diplômes c’est l’amende que les diplômés ont le devoir de payer pour recevoir leurs
diplômes. Les discours de remise des diplômes dignes de mémoire se comptent sur la cuticule d’un doigt. Ce sont des moments cérémonieux dont on se souvient peu et qu’on fête encore moins. On a
grogné lors de précédents choix, mais l’invitation faite à Barack Obama s’éloigne et de beaucoup de l’effort habituel de l’université de lier des relations chaleureuses avec les puissants du
jour. Il s’agit là d’un abandon sans équivoque de toute prétention à être une université catholique. Et ce n’est là que la triste suite de décennies de bavassages qui nous ont selon toute
évidence menés là où nous en sommes.
Aucun événement n’a été aussi crucial pour les universités catholiques que l’infâme déclaration de Land O’Lakes de 1967, où l’assemblée des présidents des institutions catholiques signifièrent se
libérer de l’influence supposément maléfique de l’orthodoxie catholique. Ils continuèrent à se dire catholiques, mais la définition du mot demeura toujours en travaux. Et cela par des
institutions dont la tâche est décidément de ne pas définir ce qu’est le catholicisme. À présent nous en sommes arrivés au point où l’Université Notre Dame s’exclut publiquement de toute
allégeance et de toute acceptation d’une des vérités morales chrétiennes les plus fondamentales, citée explicitement dans la Didachè et encore et toujours siècle après siècle. L’avortement est
radicalement un acte mauvais, du point de vue de la morale naturelle comme de l’enseignement explicite de l’Église. Il n’existe aucun moyen pour une personne, un homme politique ou une
institution de finasser avec ce fait.
En invitant Barack Obama comme orateur de cette cérémonie, Notre Dame déclare à la Nation que l’enseignement de l’Église sur cette question fondamentale peut être ignoré. Du bout des lèvre on
rappellera l’enseignement sur l’avortement, mais cela ne constituera pas un obstacle à la mobilité à la hausse, à l’authentique et vulgaire convoitise à laquelle notre société laïcisée par bon
accueil, que cette convoitise soit celle des personnes ou des institutions.
Il y a quelques années, l’archevêque Michael Miller, ès qualité de responsable de l’éducation catholique, avait dit dans un discours à Notre Dame que le Saint Père étudiait la possibilité
d’interdire l’appellation “catholique” aux institutions dont le comportement contredisait cet usage. En invitant Barack Obama à prononcer le discours de cette cérémonie de 2009, Notre Dame a
perdu le droit de se dire Université catholique. Cela exige une réprimande officielle. Puisse-t-elle venir. »
Merci, regretté professeur Ralph McInerny ! Intercédez pour nous tous qui continuons le bon combat que vous avez si ardemment mené et si brillamment illustré.
P. S. : Je signale aux lecteurs de mon bloque que le frère cadet de Ralph, Dennis McInerny, est professeur au séminaire de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre de
Denton (Nebraska).
1. Bon connaisseur de la culture, de la langue et de notre Histoire, McInerny fait évidemment référence ici à la phrase attribuée à Henri IV : « Paris vaut bien une
Messe ! ».