Le Magistère et la vie publique
En ce qui concerne le Magistère et la vie publique, il s’est développé dans bien des endroits l’idée fausse selon laquelle le chrétien, ou n’importe quelle personne croyante, afin d’être un véritable citoyen de son pays, doit mettre entre parenthèses sa vie de foi par rapport à sa vie publique. Et en application de cette idée, on en arrive à des chrétiens, par exemple, qui assurent être personnellement des membres fidèles de l’Eglise et par conséquent être fidèles aux exigences de la loi morale, tout en soutenant et en promouvant le droit de violer la loi morale dans ses principes les plus fondamentaux. Nous rencontrons des catholiques autoproclamés, par exemple, qui soutiennent et promeuvent le droit d’une femme de procurer la mort de l’enfant en son sein, ou le droit de deux personnes du même sexe à la reconnaissance que l’Etat accorde à un homme et à une femme qui sont entrés dans le mariage. Il n’est pas possible d’être un catholique pratiquant et de se conduire publiquement de cette manière.
Bien que l’Eglise ne cherche pas à imposer des pratiques purement confessionnelles à la population dans son ensemble, elle doit faire progresser l’enseignement et le respect de la loi morale, commune à tous les hommes, qui est au cœur de toute religion vraie. Quel genre de gouvernement irait jusqu’à exiger de ses citoyens et ses leaders politiques agissent sans référence aux exigences fondamentales de la loi morale ?
Bien que la religion vraie enseigne la loi morale naturelle, l’observance de la loi morale n’est pas une pratique d’ordre confessionnel. Il s’agit plutôt d’une réponse à ce qui est inscrit dans les profondeurs du cœur de chaque homme. La foi religieuse énonce clairement la loi morale naturelle, rendant les hommes de foi capables de reconnaître plus facilement ce que leur nature humaine et la nature des choses exigent d’eux, et de conformer leurs vies à la vérité qu’ils reconnaissent. Pour cette raison, les gouvernements, par le passé, ont reconnu l’importance de la foi religieuse pour la vie de la nation. Les lois de bien des nations cherchaient en fait à protéger l’enseignement et la pratique de la foi religieuse en vue du bien commun.
Dans sa lettre encyclique Caritas in veritate, le pape Benoît XVI nous rappelle :
« La religion chrétienne et les autres religions ne peuvent apporter leur contribution au développement que si Dieu a aussi sa place dans la sphère publique, et cela concerne les dimensions culturelle, sociale, économique et particulièrement politique. La doctrine sociale de l’Église est née pour revendiquer ce « droit de cité» [135] de la religion chrétienne. La négation du droit de professer publiquement sa religion et d’œuvrer pour que les vérités de la foi inspirent aussi la vie publique a des conséquences négatives sur le développement véritable. (…) La raison a toujours besoin d’être purifiée par la foi, et ceci vaut également pour la raison politique, qui ne doit pas se croire toute puissante. A son tour, la religion a toujours besoin d’être purifiée par la raison afin qu’apparaisse son visage humain authentique. La rupture de ce dialogue a un prix très lourd au regard du développement de l’humanité. » (Caritas in veritate, n° 56.)
Dans la situation présente de notre monde, la foi chrétienne porte une responsabilité cruciale quant à l’énoncé clair de la loi naturelle morale et de ses exigences.
Sous l’influence constante d’une philosophie rationaliste et laïciste qui fait de l’homme, et non de Dieu, la mesure humaine de ce qui est juste et bon, beaucoup d’hommes sont dans la confusion à propos des vérités les plus fondamentales, comme la dignité inviolable de la vie humaine innocente, depuis la conception jusqu’au moment de la mort naturelle, et l’intégrité du mariage entre un homme et une femme qui est la première cellule, irremplaçable, de la vie de la société. Si les chrétiens manquent à leur devoir d’énoncer et de défendre la loi morale naturelle, alors, ils manquent au devoir fondamental du patriotisme, qui est d’aimer leur pays en servant le bien commun.
Benoît XVI nous rappelle que la loi morale naturelle universelle « est le fondement solide de tout dialogue culturel, religieux et politique et elle permet au pluralisme multiforme des diverses cultures de ne pas se détacher de la recherche commune du vrai, du bien et de Dieu ». (Caritas in veritate n° 59). Faisant référence à la défaillance morale fondamentale de notre culture, « sa conscience étant désormais incapable de reconnaître l’humain. », Benoît XVI déclare : « Dieu révèle l’homme à l’homme; la raison et la foi collaborent pour lui montrer le bien, à condition qu’il veuille bien le voir; la loi naturelle, dans laquelle resplendit la Raison créatrice, montre la grandeur de l’homme, mais aussi sa misère, quand il méconnaît l’appel de la vérité morale. » (Caritas in veritate, n° 75).
Préfet du Tribunal suprême de la Signature apostolique