Troisième partie de la conférence de Mgr Vasa : c’est la dénonciation du risque, lorsqu’un document est élaboré en commun par plusieurs personnes dont aucune n’en porte la responsabilité, de vouloir arriver au « plus petit commun dénominateur », avec un œil sur la pastorale, et l’autre prudemment fermé quand il s’agit de « reprendre » ou de « censurer », « à temps et à contre-temps ».
Cette confusion est fréquente dans le combat pro-vie. Bien des mouvements, par souci pastoral, ne veulent pas « stigmatiser » les femmes ni les porter au désespoir, et édulcorent donc leur message sur le vrai caractère de l’avortement. Ce qui est très bien pour des mouvements dont le rôle est d’aider et de porter secours ne l’est plus dès lors que c’est l’autorité chargée de dire le vrai qui s’y cantonne.
La suite demain ! – J.S.
Le futur pape pointe une autre réalité, qui constitue sans aucun doute un danger réel lorsqu’on est en présence de documents produits par un comité. Il souligne que la recherche du consensus peut aboutir à un document aplani – ou, comme a pu le dire un évêque, à des documents qui ont trouvé leur plus petit commun dénominateur. Ainsi, lorsque des évêques individuels – et il en est plus d’un – font des déclarations personnelles à propos de certaines situations, ces déclarations sont souvent plus fortes, plus audacieuses, plus décisives et risquent donc davantage d’être critiquées pour leur caractère sévère et insensible. Je crains qu’il n’y ait eu un tel régime continu de documents aplanis que tout texte publié par un évêque individuel, contenant un quelconque élément fort, est volontiers rondement condamné ou tout simplement mis de côté comme ayant perdu tout contact avec la conférence ou comme étant en conflit avec ce que les autres évêques pourraient bien faire.
Pour être juste à l’égard de la conférence, je dois dire que je n’ai jamais vu ni entendu la conférence, dans son ensemble ou à travers un de ses comités, faire des remarques critiques à propos de ce qu’un évêque à pu faire ou omettre de faire dans son propre diocèse. Je crois que la conférence est pleinement consciente des limites de sa juridiction ; je ne peux pas en dire autant à propos des fidèles dans leur ensemble. Il est tout à fait possible que les fidèles, et peut-être aussi notre gouvernement national, perçoivent la conférence comme une sorte de magistère intermédiaire auquel chaque évêque doit obéissance et respect, et qui a toujours le pouvoir de s’exprimer au nom des évêques. Ce n’est pas du tout le cas. En réalité, c’est tout le contraire qui est affirmé par Apostolos Suos. Tout en reconnaissant le but légitime des conférences épiscopales, le pape Jean-Paul II écrivait :
« Ce but à poursuivre demande, en tout cas, d’éviter la bureaucratisation des services et des commissions qui travaillent entre les réunions plénières. On doit tenir compte du fait essentiel que les Conférences épiscopales, avec leurs commissions et leurs services, existent pour aider les Évêques et non pour se substituer à eux. » (Apostolos Suos, 18.)
Dans le même document, nous rencontrons d’autres affirmations de la valeur des conférences épiscopales, mais cela s’accompagne fréquemment d’un mot de mise en garde correspondant :
« Leur importance apparaît par le fait même qu’elles contribuent efficacement à l’unité entre les Evêques, et donc à l’unité de l’Église, étant un instrument valable pour affermir la communion ecclésiale. Néanmoins, l’évolution de leur activité, toujours plus vaste, a soulevé certaines questions de nature théologique et pastorale, spécialement dans leurs relations avec chaque évêque diocésain. » (Apostolos Suos, 6.)
La conférence a été très claire à propos du fait qu’elle prépare des documents pastoraux et qu’elle n’a aucune autorité, à titre personnel, pour publier des édits ou des lois contraignantes. Puisque ces documents pastoraux manquent de force législative, ils sont souvent couchés dans un langage que l’on pourrait qualifier de plus doux ou moins rigoriste. Cela convient bien puisqu’elles ont une intention pastorale plutôt que législative. Il suffit de regarder la différence entre les documents de Vatican II et le Code de droit canonique. L’un est pastoral, tandis que l’autre traduit l’intention du document pastoral en législation concrète. La législation est l’affaire de l’évêque local. L’évêque diocésain a un large pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne les actes législatifs ou disciplinaires dans son propre diocèse.
Saint Paul a donné conseil à Timothée à propos des manières possibles de s’occuper de l’erreur, en soulignant qu’il est nécessaire de « reprendre, censurer, exhorter, avec une entière patience et (souci d’)instruction ». La tonalité nécessaire des documents pastoraux tend davantage à l’invitation qu’à la réprobation ou la correction. L’instruction de Paul à Timothée est certainement pertinente :
« Car un temps viendra où (les hommes) ne supporteront pas la saine doctrine, mais au gré de leurs désirs se donneront une foule de maîtres, l’oreille leur démangeant, et ils détourneront l’oreille de la vérité pour se tourner vers les fables. Pour toi, sois sobre en toutes choses, endure la souffrance, fais œuvre de prédicateur de l’Evangile, remplis pleinement ton ministère. » (2 Timothée 4 :3-5.)