« La Cour européenne des droits de l’homme a prononcé aujourd’hui en audience publique son arrêt de Grande Chambre1 dans l’affaire E.B. c. France (requête no 43546/02).
« La Cour conclut, par dix voix contre sept, à la violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme.
« En application de l’article 41 (satisfaction équitable) de la Convention, la Cour, par onze voix contre six, alloue à la requérante 10 000 euros (EUR) pour dommage moral, ainsi que 14 528 EUR pour frais et dépens. (L’arrêt existe en français et en anglais.)»
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En clair : les juges européens ont donné raison à “E.B.” qui se plaignait d’avoir été victime d’une discrimination du fait du refus des autorités et des tribunaux français de lui permettre d’adopter un enfant en raison de son « orientation sexuelle » Le refus avait été motivé par le « défaut de “repères identificatoires” dû à l’absence d’image ou de référent paternel et par l’ambiguïté de la situation de la compagne de la requérante par rapport à la procédure d’adoption». La Cour de cassation avait rejeté sa demande le 5 juin 2002.
L’arrêt de Strasbourg revêt une réelle solennité puisque l’affaire a été attribuée à la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme.
Extraits des motifs :
« Pour la Cour, la référence à l’homosexualité de la requérante était sinon explicite du moins implicite et l’influence de son homosexualité sur l’appréciation de sa demande est non seulement avérée, mais a également revêtu un caractère décisif.
« Partant, elle considère que la requérante a fait l’objet d’une différence de traitement. Si cette dernière se rapporte uniquement à l’orientation sexuelle, elle constitue une discrimination au regard de la Convention. En tout état de cause, il faut des raisons particulièrement graves et convaincantes pour la justifier s’agissant de droits tombant sous l’empire de l’article 8. Or de telles raisons n’existent pas en l’espèce, puisque le droit français autorise l’adoption d’un enfant par un célibataire, ouvrant ainsi la voie à l’adoption par une personne célibataire homosexuelle. De plus, le code civil reste muet quant à la nécessité d’un référent de l’autre sexe et, par ailleurs, la requérante présentait, pour reprendre les termes de l’arrêt du Conseil d’Etat, « des qualités humaines et éducatives certaines ».