Dans un article paru le 24 mai sur InsideCatholique, Deal Hudson s’interroge :
« Les évêques peuvent-ils réparer la loi réformant la santé ? ». Hudson ne le croit pas, sauf… Un argumentaire qu’il convient de connaître. Hudson avait déjà fait
savoir ses doutes avant le vote de l’ObamaCare sur les chances de succès de la stratégie épiscopale (voir ici). Elle ne fut pas, en effet, une réussite, mais le
pouvait-elle ? En tout cas, l’analyse de Hudson me semble intéressante dans le débat législatif qui va s’ouvrir, c’est pourquoi j’ai pensé qu’il serait utile que je vous la
traduise.
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« Après le passage de la loi réformant le système de santé, la réaction des évêques fut double : déception
devant le financement fédéral de l’avortement, mais applaudissements pour l’accès universel aux soins. -
Pour certains, y compris moi-même, le bruit des applaudissements des évêques a semblé trop retentissant du fait de
l’immense tragédie que constitue l’attribution de dollars de nos impôts fédéraux au soutien à l’avortement sous le masque des “services de santé pour les femmes”. -
Toutefois, ceux qui ont acclamé le plus bruyamment, ne furent pas les évêques mais ces dirigeants catholiques – du
Congrès, de la santé, de la presse et des groupes militants – qui nièrent la présence même de ce financement de l’avortement, pour lequel les évêques exprimèrent leur déception. -
À présent, les évêques soutiennent un nouveau projet de loi destiné à “réparer”
l’actuelle version [de la loi] en y ôtant tout ce qui a trait au financement de l’avortement, un effort considéré comme inutile par des gens comme sœur Carol Keehan, présidente
de la Catholic Health Association, qui affirme que le loi ne dispose pas du financement de l’avortement. -
Le Protect Life Act (H.R. 5111), déposé conjointement par le député Républicain
Joe Pitts (Pennsylvanie) et le député Démocrate Daniel Lipinski (Illinois), interdit le financement fédéral de l’avortement ou de son remboursement dans le
cadre du système dit “d’échanges” mis au point par le gouvernement, dans les centre de santé communautaires ou dans tout autre programme, par l’amendement du Patient Protection and
Affordable Act (PPACA). -
Ce projet de loi comporte également la protection de conscience pour les professionnels de la santé, qui ne figure
dans l’actuelle loi sur la santé, et garantit que les compagnies d’assurances privées ne sont pas obligées de couvrir l’avortement. -
Le cardinal Daniel DiNardo, président de la commission épiscopale sur les activités pro-vie, a rendu
publique une lettre aux députés, datée du 20 mai, qui leur demande de voter la H.R. 5111 afin d’inclure dans la loi actuelle sur la santé “les dispositions de l’amendement
Hyde appliquées de longue date”. -
Contrairement à sœur Keehan et à d’autres, le cardinal DiNardo reconnaît que
« la loi accorde actuellement des milliards de dollars de nouvelles subventions aux services de santé sans exclure l’avortement à la demande de ces fonds ». -
Le cardinal DiNardo traite aussi de l’affaire du décret présidentiel d’Obama du 21
mars, supposé interdire l’usage de fonds fédéraux pour l’avortement. Son Éminence relève avec justesse qu’un décret présidentiel ne peut pas supplanter l’autorité législative dans les tribunaux
fédéraux ou d’une loi votée par le Congrès. En d’autres mots, comme le cardinal DiNardo l’exprime : « ce grave problème exige une solution
législative. » -
Quelle sont les chances que le H.R. 5111 soit voté à la chambre des Représentants ? À peu près
aucune, et c’est tragique. Les seuls Démocrates soutenant le projet de loi de Pitts sont les députés Travis Childers (Mississippi), Lincoln
Davis (Tennessee), Tim Holden (Pennsylvanie), Daniel Lipinski (Illinois), James Marshall (Georgie), Myke McIntryre
(Caroline du Nord) et Gene Taylor (Mississippi). Tous ont voté contre le projet de loi de réforme que la santé qu’Obama a fini par signer. -
Plus important encore, aucun des Démocrates “pro-vie” qui ont voté contre la loi de réforme de santé, y compris le
député Bart Stupak (Michigan), n’a indiqué son soutien au H.R. 5111. À l’instar de sœur Keehan, un certain nombre de ces membres de la chambre
basse ne croient pas que la loi sur la réforme de la santé ait besoin d’être réformée. -
Le Protect Life Act n’a aucune chance d’être voté à la chambre basse sans récupérer les voix de
certains de ceux qui ont voté la loi originale, et une telle possibilité semble très peu probable malgré la pression effectuée par les évêques catholiques. -
À première vue, les évêques devraient avoir plus d’influence sur le Congrès 1 qu’ils n’en ont actuellement. Les
Démocrates contrôlent le Congrès, et il y a deux fois plus de Démocrates catholiques au Congrès (108) que de Républicains catholiques (46). Pourtant, malgré ce fort contingent de membres qui se
disent catholiques, le Parti Démocrate utilise son pouvoir de contrôle du Congrès pour maintenir le financement de l’avortement dans la législation sur la santé. -
Il est peut-être temps pour chaque évêque d’“interpeller” les membres catholiques du Congrès demeurant sur son
territoire diocésain. Quelle circonstance pourrait être plus pressante que ce qu’annonce le cardinal DiNardo dans sa lettre du 20 mai au Congrès : la loi sur la santé
signée par Obama, écrit-il, “accorde actuellement des milliards de dollars de nouvelles subventions aux services de santé sans exclure l’avortement à la demande de ces
fonds”. -
Beaucoup de simples fidèles catholiques sont horrifiés que tant de responsables catholiques de premier plan et de
membres du Congrès aient soutenu cette loi et aient même nié qu’elle finançait l’avortement. Ce scandale actuel ne peut être affronté que par les évêques qui doivent faire ce que l’on comprend
qu’ils hésitent de faire : avertir les politiciens catholiques qu’ils compromettent leur communion avec l’Église et permettant que le financement de l’avortement demeure la loi du
pays. »
1. Il faut entendre ici, et dans la suite, chambre des Représentants, et non pas le Congress rassemblant les deux chambres
du législateur.