À la suite de la pitoyable tentative de justification canonique de l’invitation d’Obama par le P. John Jenkins dont j’ai parlé ici, et qui relève d’une herméneutique du bricolage et de la mauvaise foi, Mgr John D’Arcy
(photo), évêque de Fort Wayne-South Bend a fait paraître le mercredi 22 avril une « Déclaration aux fidèles » faisant le point de manière
délicate et magistrale sur les “questions” soulevées par le P. Jenkins, et les réglant définitivement.
Voici le texte intégral, mais un peu long, de cette « Déclaration » traduite pour la première fois en français.
« Chers frères et sœurs en Christ,
Voici peu, le P. John Jenkins, CSC, dans une lettre en réponse à Mgr Olmsted, évêque du diocèse de Phoenix, qui lui avait écrit pour le critiquer de sa décision d’inviter le
Président Obama à venir parler à Notre Dame et à y recevoir un doctorat honoris causa en droit, a indiqué qu’il avait la conviction que la déclaration Catholics in
Political Life [Les catholiques dans la vie politique, texte de la conférence des évêques américains de 2004] (USCCB) ne s’appliquait pas dans ce cas particulier. Le P.
Jenkins m’a aimablement transmis copie de sa lettre et m’a aussi demandé, lors d’une rencontre ultérieure, que j’y réponde.
J’y ai répondu par lettre à lui adressée le 15 avril.
Les points abordés par le P. Jenkins dans sa lettre ont été maintenant transmis aux membres [Trustees] du conseil d’administration de Notre Dame, rendus publics au
plan national et aussi localement dans la South Bend Trinune. Dès lors que cette affaire est désormais publique, il est de mon devoir d’évêque de ce diocèse d’y répondre et de les
corriger. Je dois prendre cette responsabilité avec quelque tristesse, mais aussi en ayant la conviction que si je n’agissais pas ainsi je négligerais ma responsabilité pastorale.
Le sens de la phrase du document de l’USCCB relative aux institutions catholiques est clair. La responsabilité revient à ces institutions, en vérité à la communauté catholique
elle-même.
« La communauté catholique et les institutions catholiques ne devront pas honorer ceux qui agissent en défiance de nos principes moraux fondamentaux. On ne devra pas leur
accorder de récompenses, d’honneurs ou de tribunes susceptibles de laisser penser qu’on soutiendrait leurs actes » (Catholics in Political Life, USCCB).
Quand surgit un doute concernant la signification d’un texte de la Conférence des évêques catholiques des Étst-Unis, où peut-on en trouver l’interprétation authentique ? Un principe canonique et
théologique fondamental dit que c’est auprès de l’évêque local qui enseigne et légifère dans son diocèse (can. 330, 375 §§ 1 et 2, 380, 381 § 1, 392 et 394 § 1).
J’ai informé le P. Jenkins que s’il y avait quelques questions sincères ou doutes sur la signification de ladite phrase dans le document de la Conférence, tout canoniste compétent possédant
connaissance de la tradition et amour de l’Église du Christ avait le devoir d’informer le P. Jenkins de ce principe fondamental que c’est l’évêque diocésain seul qui est revêtu de la
responsabilité de fournir l’interprétation authentique.
J’ai rappelé au P. Jenkins qu’il avait indiqué avoir consulté des présidents d’autres universités catholiques, et au moins indirectement, des évêques puisqu’il avait demandé à ces présidents de
lui indiquer ce qu’en disaient leurs propres évêques. Cependant, il a fait le choix de ne pas consulter son propre évêque qui, comme je viens de l’expliciter, est celui qui enseigne et qui
légifère dans son propre diocèse. J’ai rappelé au P. Jenkins que je n’avais été informé de cette invitation qu’après qu’elle eut été acceptée par le Président. Je lui ai encore signalé que c’est
le cœur de la responsabilité pastorale d’un évêque diocésain que d’enseigner ce qui est révélé dans la Sainte Écriture et la Tradition (Lumen Gentium, n. 20, Christus Dominus, n. 2). Je lui ai
rappelé que c’était central dans la relation entre l’Université et l’Église (Ex corde ecclesiæ, n. 27 et 28, Gen. Norm., art. 5, §§ 1-3).
Un autre point. Dans sa lettre à Mgr Olmsted et dans la publicité considérable, qui ont leur place dans les points de la lettre qui ont été rendus publics, le P. Jenkins a déclaré
que l’invitation faite à Obama ne « suggère pas un soutien » à ses actes, parce qu’il a exprimé et continue d’exprimer un désaccord avec lui sur les questions traitant de la
protection de la vie. J’ai écrit que cette profusion de centaines de milliers de personnes choquées par cette invitation, démontre avec toute clarté que cette invitation a, en fait, scandalisé
beaucoup de catholiques et de personnes de bonne volonté. Rien que dans mon bureau, on a reçu plus de 3 300 messages exprimant le choc, la consternation et le scandale, et il continue d’en
arriver. Il semble que e fait parle si fort en lui-même que les gens n’ont pas été capables d’entendre les mots du P. Jenkins et, qu’en vérité, cette invitation a été comprise par beaucoup
comme un soutien.
Dans la publicité qui a environné les points abordés par le P. Jenkins, il déclare aussi qu’il « suit le document des évêques » en « en faisant une base de son engagement
avec le Président sur cette question ». J’ai indiqué que, comme beaucoup d’autres, j’attendrai de voir ce qui s’ensuivra quant à cette question entre Notre Dame et le président
Obama.
Comme je l’ai déclaré dans un récent entretien et que j’ai dit au P. Jenkins, une chose aurait été de faire venir ici le Président pour discuter de questions de santé ou d’immigration, et
aucune personne de bonne volonté n’aurait pu y trouver à redire. Mais ce que nous avons, toutefois, c’est la collation d’un doctorat honoris causa en droit à quelqu’un dont les actes,
comme Président et antérieurement, ont totalement soutenu des lois contraires à la dignité de la personne humaine non encore née.
Dans ma lettre, j’ai aussi demandé au P. Jenkins de corriger, et si possible de supprimer, les points discutés erronés tels qu’ils ont été publiés dans la South Bend Tribune
et dans d’autres supports dans tout le pays. Les déclarations que le P. Jenkins a faites sont tout simplement fausses et présentent une fausse justification à ses actes.
Je considère la chose désormais réglée : le document de l’USCCB Catholics in Public [sic pour Political] Life s’applique parfaitement dans
cette affaire.
Ne pas avoir consulté l’évêque local qui, quelle que soit son indignité, est celui qui enseigne et légifère dans le diocèse, est une grave faute. Une consultation appropriée aurait empêché un
acte qui a provoqué une si douloureuse division entre Notre Dame et nombre d’évêques et un grand nombre de fidèles.
Cette division doit être traitée par la prière et l’action, et je m’engage à travailler avec le P. Jenkins et tous ceux de Notre Dame pour guérir cette terrible brèche qui s’est
constituée entre Notre Dame et l’Église. On ne peut pas tolérer qu’elle se maintienne.
Je demande à tous de prier pour que cette guérison arrive de manière substantielle et vraie, et non de manière illusoire. Notre Dame et le P. Jenkins doivent faire leur part pour
que cette guérison puisse arriver. Je ferai la mienne. »