Mgr Thierry Scherrer, évêque de Laval, n’est pas spécialement un adepte du SRI, le Service des Relations avec l’Islam de la CEF. En effet, il a osé faire appel à Annie Laurent pour se rendre au au Liban. Il témoigne pour l’Homme nouveau :
Mes impressions, je les traduirais volontiers par ces deux mots de « souffrance » et d’« espérance » […]. Ce sont en effet ces deux mots qui me viennent spontanément à l’esprit au retour de ce pèlerinage. La souffrance d’abord est tangible, même si les Libanais sont par nature accueillants et qu’ils donnent facilement le change en présence des hôtes qu’ils reçoivent avec beaucoup de générosité et de dévouement. Il apparaît toutefois que trente-cinq années de guerre et de crises ont profondément miné le pays dans son ensemble, si bien que ce qu’on avait coutume d’appeler auparavant « le miracle libanais », par la coexistence exemplaire des différentes communautés confessionnelles entre elles, semble désormais sérieusement compromis. Les replis identitaires se creusent entre chrétiens, druzes et musulmans qui vivaient auparavant en assez bonne intelligence. J’ai été frappé par ailleurs de découvrir qu’en quelques années seulement le parti chiite du Hezbollah avait considérablement élargi son champ d’influence. Le voir majoritaire dans la composition du tout nouveau gouvernement n’est pas sans susciter quelques appréhensions, surtout quand on sait que le Président de la République, un chrétien maronite selon ce que prévoit la Constitution, n’a pratiquement plus aucun pouvoir. De plus en plus, les pressions se multiplient à l’encontre des chrétiens qui sont amenés à quitter leurs terres et leurs maisons pour aller trouver ailleurs de meilleures conditions de vie. Pareille situation est tragique car ce sont les chrétiens qui, au Liban, cimentent le pays d’un point de vue culturel, politique et religieux. Malgré tous ces paramètres qui contribuent à rendre la situation très instable, les raisons d’espérer dominent largement au Liban. Elles nous sont offertes, entre autres, par la grande vitalité des Églises qui rivalisent de projets et d’initiatives pour tenter de sortir le pays de l’ornière et oeuvrer à sa reconstruction. Les chrétiens libanais, attachés à la personne du Christ, puisent leur espérance d’une manière particulière dans leur dévotion à la Vierge Marie. Nous avons pu le percevoir à travers les foules venues prier en nombre impressionnant Notre-Dame du Liban en ce mois de mai qui lui est traditionnellement consacré. C’est l’image que je garderai de ce pays si attachant : celle d’un peuple qui continue de croire malgré tout qu’avec la force de Dieu et la bonne volonté des hommes, le désert peut aujourd’hui encore refleurir.