Plusieurs sites et blogs espagnols se montrent actuellement très inquiets quant à l’application de Summorum Pontificum dans leur pays. À vrai dire, ils ne se faisaient jusqu’ici pas beaucoup d’illusions puisque l’épiscopat ne se montre pas du tout concerné par cette question. Mais,ici ou là, des messes avaient été obtenues. Est-ce la fin ? Difficile de le dire avec certitude.
Toujours est-il qu’une messe en forme extraordinaire était prévue pour le 10 mars prochain, en l’église San Manuel y San Benito de Madrid. Organisée par la Comunión Tradicionalista y el Círculo Cultural Antonio, cette messe n’aura finalement pas lieu alors que les organisateurs en avaient reçu l’assurance de la part du curé de la paroisse, le Père José Ignacio Alonso Martínez.
Que s’est-il passé ? Les organisateurs ont finalement appris que l’archevêché de Madrid estimait que la messe traditionnelle ne pouvait être célébrée que dans un seul endroit, le Tercer Monasterio de la Visitación. De ce fait, le curé de la paroisse est revenu sur son autorisation et a interdit cette messe.
On peut penser que d’autres motifs sont intervenus dans la prise de cette décision. Mais, de toute évidence, ils n’ont pas été expliqué de manière claire. La seule raison invoquée aujourd’hui est que la messe traditionnelle doit à Madrid être célébrée qu’en un seul lieu. On se trouve là dans une situation qui est certainement plus proche de celle d’Ecclesia Dei que de Summorum Pontificum. C’est l’archevêché qui décide des lieux de célébration de la messe sans tenir compte du droit des curés d’accorder cette possibilité, droit qui leur est donné par le motu proprio Summorum Pontificum. Le site de Francisco José Fernández de la Cigoña, lequel n’est pas traditionaliste, et qui est très lu dans la sphère hispanique, dénonce à raison ce clericalisme scandaleux qui oblige à obéir davantage au cardinal archevêque de Madrid qu’à Rome.
Cette tranquille violation de l’art. 5 (et de la ratio fondamentale) de Summorum Pontificum ressemble fort à un remake de l’affaire de Manille: http://wdtprs.com/blog/2009/04/card-castrillon-corrects-card-rosales-archd-manila-on-summorum-pontificum/
Le Cal Castrillón avait remis à sa place le cardinal Rosales; Mgr Pozzo aura-t-il le muscle pour en faire autant?
Evidemment, avec des pressions pour diminuer les pouvoirs de la commission Ecclesia Dei et pour restreindre le motu proprio lui-même par le biais d’une “instruction d’application”, les perspectives ne sont guère roses. Même si l’interprétation restrictive de Summorum Pontificum ne touchait pas ces deux points, elle favoriserait indirectement le genre de sabotages que nous voyons à Manille et à Madrid en créant une atmosphère de ghetto et de “permissions”. Tout le monde risque d’y perdre, y compris les tenants d’une “réforme de la réforme”.