Le cardinal Vingt-trois a reçu le 9 mars dernier le patriarche Bartholoméos,
montrant ainsi son souci de l’unité de l’Église. Et les autres ?
Nos lecteurs pardonneront, j’espère, ce petit feuilleton concernant des propos tenus par l’archevêque de Paris, André, cardinal Vingt-Trois, président de la
Conférence des évêques de France, à des journalistes visiblement choisis avec soin. Nous devons au quotidien La Croix un écho de ces épiscopales paroles.
Nous avons vu, hier, ce que le cardinal pensait des conséquences du Motu proprio de
2007.
Nous voudrions aujourd’hui aborder ce qu’il pense du dialogue avec la Fraternité Saint-Pie X. On s’apercevra aisément que ses propos semblent entrer dans un
vaste mouvement de réaction à l’idée même d’un dialogue avec la Fraternité Saint-Pie X. Le cardinal Schönborn, archevêque de Vienne, a ouvert le feu. Le cardinal de Paris l’entretient, alors que nos confrères de l’Osservatore vaticano viennent de révèler ce qui se trame de nouveau du côté de la télévision suédoise.
Mais revenons à Mgr Vingt-Trois. Selon Isabelle de Gaulmyn : « À plus long
terme, le cardinal Vingt-Trois ne peut cacher un certain scepticisme sur un futur retour de la FSSPX dans l’Église. Certes, à Rome vont débuter les discussions théologiques avec les intégristes.
Mais l’archevêque de Paris observe d’emblée que “par définition, pour faire l’unité, il faut être deux ”. Or, rappelle-t-il, le préalable à la discussion, clairement posé par Benoît XVI,
à savoir l’acceptation de Vatican II, continue d’être repoussé par les responsables intégristes. »
Intéressante remarque.
Le cardinal de Paris se pique de logique et… enfile des banalités. Oui, bien sûr, il faut être – au moins – deux pour se réunir. Mais, là où sa logique se brouille
avec le bon sens, c’est quand, à son tour (comme son confrère viennois), il estime que l’objet même de la négociation – à savoir certains textes de Vatican II, avec l’interprétation qui les
a accompagnés ainsi que la praxis qui a majoritairement mis en application cette interprétation – appartient au préalable non négociable.
Il est évident que le Saint-Siège ne reviendra pas de front sur Vatican II, en l’effaçant de l’histoire. Mais, à l’aide des négociations entamées avec la
Fraternité Saint-Pie X, il pourra être amené à préciser la portée de tel document, à préciser les points litigieux de tels autres (ce qui a déjà été fait pour certains documents, cf.
Dominus Iesus). Le cardinal archevêque de Paris sera peut-être surpris d’apprendre que de plus en plus de théologiens, en dehors de la Fraternité Saint-Pie X, souhaitent aussi ce type de
précisions et d’éclaircissements.
Le cardinal Vingt-Trois martelle donc une fausse logique et surtout une question de préalable qui n’existe pas. La Fraternité Saint-Pie X reconnaît le concile
Vatican II. Elle en critique des points obscurs ou équivoques, une herméneutique de rupture, une autorité qui serait supérieure aux précédents conciles, un flou doctrinal qui a conduit à des
égarements pendant des décennies, etc.
Mais, même si notre vision est trop naïve à ce sujet, une chose s’impose. Le pape a voulu des discussions doctrinales avec la Fraternité Saint-Pie X concernant
le Concile, ce n’est pas pour exiger qu’avant même l’ouverture des discussions, les deux parties soient d’accords. Il ne faut pas confondre préalable et conclusion.
Logique ? Oui, à condition de ne pas l’oublier.
Une question reste donc pendante : pourquoi le cardinal de Paris, après celui de Vienne, tient-il à réaffirmer la nécessité d’un accord préalable sur l’objet
même des discussions ? Peur de l’unité de l’Église et du retour au bercail d’éléments actifs du catholicisme ? L’unité des chrétiens est l’un des points forts de Vatican II et on
ne pourrait imaginer que Vienne et Paris s’éloignent ainsi du concile.
Alors ? L’Église qui est en France a-t-elle encore du mal à s’adapter aux nouvelles conditions de notre temps, un peu comme l’armée française en 1940 qui a
donné l’impression d’être en retard d’une guerre ?
Le feuilleton n’est pas fini. La suite dans les prochains jours…