Mon confrère Vini Ganimara publie la supplique qu’un groupe de 21 prêtres français a adressé au cardinal Ouellet, préfet de la congrégation pour les évêques.
ces 21 auraient aussi bien pu être plusieurs dizaines, mais l’animateur du groupe s’est volontairement limité pour envoyer rapidement – et, en l’occurrence, avant le sacre de Mgr Fonlupt – cette supplique à Rome. Qui sont ces prêtres? De parfaits représentants des « forces vives » du catholicisme français: ils sont 4 religieux, 2 membres d’instituts Ecclesia Dei, et 15 prêtres diocésains. Certains ont été tout récemment ordonnés; d’autres sont prêtres depuis plus de 20 ans. Presque tous ont moins de 50 ans. En un mot, ils sont représentatifs de la génération de la nouvelle évangélisation.
Voici le texte de cette supplique :
Nous voudrions vous faire part de l’incompréhension d’une large part des prêtres et des catholiques de France concernant les nominations épiscopales actuelles. Dans notre pays, depuis trois ou quatre décennies, le catholicisme s’est réduit et continue de se réduire dramatiquement (effondrement constant de la pratique dominicale, du nombre des prêtres, des religieux, des catéchisés, des vocations, etc.) Il n’est pas impossible que le Saint-Siège soit bientôt contraint de transformer certains diocèses français en administrations apostoliques, compte tenu du nombre dérisoire de leurs prêtres en activité.
Or ce catholicisme malade n’est pas mort. Transformé par la terrible épreuve de la sécularisation, il a encore – pour combien de temps ? – la capacité de se revitaliser en son état de minorité : scoutisme, écoles vraiment catholiques, mouvements, pèlerinages, communautés nouvelles multiples, communautés traditionnelles jeunes et vivantes, nouvelles générations de prêtres réellement missionnaires, séminaristes diocésains et nombreuses vocations potentielles de type « génération Benoît XVI », possibilités liturgiques et vocationnelles offertes par le Motu Proprio Summorum Pontificum, jeunes familles chrétiennes nombreuses, groupements très actifs de soutien à la vie. Ce catholicisme-là veut tourner une page mortifère : abus liturgiques, prédication désastreuse concernant la morale du mariage, complexe anti-romain latent, pratiques sacramentelles déviantes (bénédictions de « remariages » des divorcés remariés, absolutions collectives), catéchèse douteusement catholique sur l’eucharistie, etc.
Dans ce contexte, les nominations épiscopales nous paraissent inintelligibles. Bien des évêques de France sont en décalage croissant avec ce nouveau catholicisme. Et c’est une immense déception de voir qu’une partie de ceux nommés aujourd’hui même, sous le pape Benoît XVI, comme s’ils se reproduisaient par cooptation, ont encore un esprit « génération 68 » plus ou moins recentré, et que l’autre partie est choisie, pour les besoins d’un consensus introuvable, parmi des hommes d’une timidité réformatrice extrême.
Les prêtres, les religieux, les clercs que nous représentons désirent que soit faite à l’adresse d’une société de plus en plus indifférente une annonce claire de l’Évangile. Ils sont en outre animés d’un vrai désir de réconciliation et de paix entre tous les catholiques de France, qui se savent désormais largement minoritaires. Mais pour mettre en œuvre une nouvelle pastorale, il faut choisir de nouveaux pasteurs. Il se trouve que les prêtres de 50 à 60 ans qui ont un profil pastoral, psychologique et intellectuel solide, répondant parfaitement aux besoins vitaux du nouveau catholicisme français, sont désormais nombreux.
Éminence, le salut du catholicisme français dépend de la nomination d’évêques qui répondront à ses besoins réels et à ses vraies attentes.