Mgr d’Ornellas, archevêque de Rennes, répondait au JDD sur le projet de loi bioéthique :
le gouvernement prend en considération l’intérêt de l’enfant en envisageant la levée de l’anonymat dans le cadre de la procréation médicalement assistée avec don de gamètes, en lui permettant l’accès à l’identité du donneur. Mais cette levée de l’anonymat engendre des questions insolubles, contraires à l’intérêt de l’enfant qui, pourtant, est primordial. Est-il juste de continuer à recourir au don de gamètes, c’est-à-dire de le faire naître en divisant sa filiation? L’enfant était le grand absent des deux précédentes lois de bioéthique. Les possibilités de la science ont primé jusqu’à présent. […] La procréation médicalement assistée ne guérit pas la stérilité. On tente de la pallier. Il y a quelque chose de trop grand dans la procréation humaine pour la laisser à la domination de la technique. Avoir créé un être humain en dehors du corps de la femme fut un événement sismique. A-t-on suffisamment réfléchi à ce que cela signifiait, au pouvoir que l’homme se donnait en fabriquant un être humain dans une éprouvette? Aujourd’hui, ce pouvoir est un lieu de fantasmes. On va choisir les caractères génétiques de son enfant: les yeux bleus ou les cheveux bruns. Le risque de dérive eugéniste et de marchandisation est considérable. Il y a des pays où l’on vend des gamètes!
Mais beaucoup de couples souffrent de ne pas pouvoir avoir d’enfant…
Oui, c’est une grande souffrance. Mais la PMA engendre d’autres souffrances. Beaucoup de couples sont mal à l’aise d’avoir des embryons congelés dans l’armoire. Cette congélation est un manque de respect pour l’être humain. Il y a une contradiction fondamentale dont on ne peut se satisfaire: les PMA sont faites pour donner la vie, or elles aboutissent souvent à la destruction de la vie des embryons. L’Allemagne et l’Italie interdisent la congélation d’embryons, pourquoi pas la France?Craignez-vous qu’une majorité de députés se prononce en faveur d’une autorisation de la recherche sur l’embryon?
Ce serait une entorse grave à notre droit. Et une erreur car d’autres voies sont prometteuses. Certains scientifiques se sont engagés dans la recherche sur les cellules souches adultes ou sur d’autres cellules. N’y a-t-il pas un non-dit scientifique concernant les cellules souches embryonnaires: leur potentiel cancérigène? La mission de la loi civile est d’organiser la protection des plus vulnérables. Qu’on le veuille ou non, l’embryon humain n’est pas une chose. Il appartient à l’ordre de la personne. Mépriser le plus petit, c’est ouvrir la porte à l’inquiétude. Les législateurs seront-ils conscients que se joue un enjeu d’humanité avec cette loi? S’ils cèdent sur cet aspect, la loi sera-telle capable de protéger l’humanité de la société?Faut-il étendre les indications du diagnostic préimplantatoire à la sélection de la trisomie 21?
Certainement non. En tout cas, le projet de loi ne l’a pas intégré. Cette sélection était pourtant proposée par la mission parlementaire. Le gouvernement a plutôt suivi les états généraux de la bioéthique qui disent que la lutte contre le handicap passe par la recherche et non par l’élimination. C’est bon signe. […] Attendre un enfant, c’est une bonne nouvelle pour la société et non une source de problèmes potentiels. La manière dont les tests sont proposés doit être réfléchie pour être au service de cette bonne nouvelle. Ils ne disent qu’un risque éventuel, jamais du cent pour cent. Je connais des enfants en parfaite santé chez qui on avait diagnostiqué une anomalie. Il y a des angoisses dont on aurait pu se passer.