Lors du pélerinage national du monde paysan, Mgr Centène a prononcé une homélie haute en couleur, dont voici quelques extraits significatifs de l’abandon de la langue de buis :
Les lectures bibliques de ce jour sont claires. Il n’y a pas d’ambiguïté possible : «Vous serez livrés même par vos parents, vos frères, votre famille et vos amis, et ils feront mettre à mort certains d’entre vous. Vous serez détestés de tous, à cause de mon Nom.» Qui voudrait faire de la foi catholique et de l’appartenance à l’Eglise une histoire de sensibilité, d’opinion philosophique, de simple croyance pour un «mieux vivre ensemble aux carrefours de nos chemins d’humanité», Qui voudrait faire du Christ un «bobo» pacifiste proclamant «peace and love», la guitare à la main, dans une communauté hippie du premier siècle, Qui voudrait faire du chrétien un doux rêveur acceptant, passif et résigné, la monstrueuse tentative d’assassinat de la création divine sous couvert d’une tolérance, nouveau nom donné à la lâcheté et à l’indifférence, Que celui-ci se le tienne pour dit : «Jésus-Christ est Dieu tout-puissant, créateur de tout ce qui est, fait homme, mort et ressuscité pour le salut des âmes et il n’y a pas, et il n’y a pas eu, et il n’y aura pas d’autre nom dans tout l’univers par lequel nous devions être sauvés». […]
Et l’on voudrait nous faire croire qu’il nous faudrait taire la merveilleuse nouvelle du salut, qu’il nous faudrait épouser les idées du monde sous prétexte d’une humilité chrétienne cachant en réalité un amour propre mondain et la mesquine sauvegarde d’une réputation sociale ? […] Comment vouloir le bonheur de l’autre si l’on ne veut pas son propre bonheur ? Il faut s’aimer soi-même, non pour faire de soi une idole, tel Narcisse, mais parce que l’amour que Dieu porte à chacun rend chacun digne d’amour ! Soi-même y compris ! Comment pourrions-nous ne pas aimer ce que Dieu juge digne d’amour, non par mérite, mais par grâce ? Mais pour s’aimer encore faut-il se connaître, car l’amour implique lucidité de jugement, vérité sur soi-même. […] La connaissance de soi suppose une identité personnelle qui s’enracine dans une famille, une patrie, une terre, une culture, une éducation, une époque, en un mot une histoire.
Et que voyons-nous aujourd’hui ? Tout ce qui constitue l’identité des hommes, tout ce qui leur permet de se connaître, donc de s’aimer et ainsi d’aimer Dieu et leur prochain, est mis à mal par l’avancée d’une culture de mort, une anti-culture échafaudant une véritable structure de péché qui annihile les consciences par la banalisation de comportements d’autodestruction humaine : Avortement, euthanasie, anéantissement de la famille, cellule de base de toute société saine, lecture partiale de l’histoire et des sciences humaines dans l’enseignement, effondrement du niveau d’exigence des savoirs, haine de la patrie d’un monde hanté par le complexe d’Œdipe, autoculpabilisation permanente de notre histoire.
Ce déracinement, accentué par l’extrême mobilité actuelle et une idéologie mondialiste qui tend à vouloir faire disparaître toute culture particulière, ne peut qu’engendrer la crise d’identité sans précédent que l’on connaît et donc la crise sociale. Ne nous y trompons pas, cette entreprise de démolition de la vie et de la famille est une entreprise de démolition du principe de transmission en général, du principe de filiation en particulier et la paysannerie, état de vie stable dans un attachement profond à la terre, don de Dieu fait aux hommes pour en être les intendants fidèles et non les tyrans cupides et jaloux, est particulièrement visée. […]
Dans ce combat pour la vie et donc pour l’identité – non pas une identité repliée sur elle-même mais qui permet, en se connaissant soi-même, de s’ouvrir véritablement aux autres – la sémantique joue un rôle particulièrement important. […] Soyez bien conscients, frères et sœurs, que vous êtes aujourd’hui une partie de l’âme de l’humanité et que c’est précisément pour cette raison que l’on veut la mort non pas de l’agriculture – il faut bien se nourrir – mais de la paysannerie qui, vivant quotidiennement au rythme de la création, y voit l’œuvre du Créateur.”