On n’en fera jamais assez en matière de promotion de la contraception. Ses partisans ne connaîtront pas de repos avant de l’avoir rendu quasi-obligatoire sous ses formes les plus agressives. A preuve, cette énième initiative sénatoriale visant à renforcer le rôle des sages-femmes dans la prescription – et donc la publicité – de la contraception.
La discussion en cours de la proposition de loi portant réforme de l’hôpital – réforme interminable, toujours à reprendre et à refaire – a donné l’occasion aux centristes Valérie Létard et Huguette Dini de déposer un amendement visant à « faciliter l’accès des femmes à la contraception ». Comme s’il était malaisé ! Eh bien, elles regrettent que les sages-femmes, qui peuvent prescrire la pilule et même installer des dispositifs intra-utérins depuis la loi du 21 juillet 2009 auprès de « toute femme en bonne santé », même pour la première fois, soient dans la pratique peu portées à le faire, puisque « la surveillance et le suivi biologiques sont assurés par le médecin traitant » (article L. 5134-1-III du code de la santé publique).
« Le renvoi exclusif au médecin traitant revient à priver de toute portée cette compétence reconnue par la loi HPST aux sages-femmes de réaliser des consultations en matière de contraception et aboutit à la rendre inapplicable », précise l’amendement, qui vise à supprimer cet alinéa.
Derrière les mots, il y a bien sûr la part de non-dit : faciliter l’accès discret à la pilule ou encore aux dispositifs intra-utérins, dont l’action, rappelons-le en passant, est la plupart du temps contragestive, empêchant la nidation de l’embryon qui intervient normalement sept jours après la fécondation. Pouvoir contourner le médecin traitant, qui est habituellement le médecin de famille, permet une meilleure confidentialité ou en tout cas plus de confiance pour les mineures ou pour les femmes dont les maris seraient opposés à la contraception. On les voit venir !
Il n’est pas anodin que le site de l’Ordre des sages-femmes comporte un texte réclamant maintenant le droit d’installer le contraceptif hormonal de longue durée Implanon – dont les effets secondaires peuvent être affreux. Sur de toutes jeunes filles, là encore ?
La « couverture contraceptive » des Françaises est déjà parmi les plus élevées au monde, sans que la progression enregistrée depuis la loi Neuwirth en 1967 (maintes fois aggravée par des dispositions de toutes sortes) ait fait diminuer le moins du monde le nombre d’avortements. Et c’est la pilule qui est championne toutes catégories.
Marie-Claire rappelle dans un de ses derniers numéros que près de 58 % des Françaises en âge fécond préfèrent la pilule, soit 10 % de plus qu’en 1994. Et plus elles sont jeunes, plus elles y sont abonnées : 66 % des jeunes de 15 à 19 ans l’utilisent quand elles ont un petit copain stable. Et pour les 20-24 ans, on enregistre 88 % d’utilisatrices. C’est dire l’efficacité des pressions de toutes sortes, partant de l’« éducation sexuelle » au collège, et qui passent aussi par les conseils « médicaux » qui se multiplient depuis la médecine scolaire jusqu’aux panneaux d’affichage du Planning familial.
Efficacité paradoxale puisque la presse féminine, pourtant totalement acquise au « tout-contraceptif », rend de plus en plus compte du ras-le-bol de la pilule hormonale qui ne cadre plus avec les progrès de la mentalité écolo. Une enquête Effik-Opinion Way publiée au il y a quinze jours révélait que plus d’une femme sur deux a « oublié » de prendre sa pilule au moins une fois au cours des trois derniers mois : l’enquête de Marie-Claire montre que ces « oublis » sont souvent volontaires, les femmes voulant « mettre au repos » leur corps agressé par ces hormones de synthèse et le chamboulement complet de leur cycle naturel. La pilule représente une « contrainte ». Elle cite Déborah, passée au « tout-préservatif » pour ses rencontres occasionnelles : « Avec mon ex, alors sous pilule, j’avais l’impression d’être un corps en libre-service. J’en arrivais à me laisser faire sans envie, en me disant qu’au moins je ne risquais pas de tomber enceinte. »
Charmant, frais et romantique, n’est-ce pas ?
Et où est passé le principe de précaution ? N’y a-t-il pas lieu de s’inquiéter du nombre de jeunes « sous pilule » alors que l’on connaît les dangers de l’association pilule-cigarette ? Qui rappelle les réels dangers – et notamment le fait que la pilule hormonale est classée carcinogène de première catégorie – de la stérilisation hormonale, fût-elle réversible ? Ellen Grant l’avait fait dans un livre resté d’actualité, Amère pilule. Mais la connaissance du dossier progresse. On sait aujourd’hui qu’une femme sous contraceptif hormonal – dont le corps à l’illusion d’être en état de grossesse – ne sait pas « choisir » son compagnon d’après cette subtile alchimie qui favorise la fertilité et la naissance d’enfants en meilleure santé.
C’est la merveille de la procréation humaine qui se manifeste dans des détails les plus inattendus. Nous en reparlerons, promis. En attendant, ce sont les laboratoires pharmaceutiques qui peuvent se frotter les mains de pouvoir bénéficier d’une publicité organisée par les pouvoirs publics.