Voici un article de Jean Madiran, paru dans Présent le 10 avril :
“C’est un évêque-type. Non pas le type le plus courant, pourra-t-on objecter. Mais il en entraîne beaucoup d’autres. Avec exagération sans doute, il donne le ton, et c’est quand même ce
ton-là qui prévaut, de manière plus diluée, dans la bureaucratie ecclésiastique des commissions, des comités, des conseils et de leurs secrétariats permanents. Ecoutons-le, son bavardage
est le propre discours de la modernité maçonnique à usage clérical.
“Le dialogue désormais l’emporte sur l’orthodoxie, c’est ainsi qu’une Eglise qui bouge prend la relève d’une Eglise figée,
et que l’on passe d’un christianisme d’habitude à un christianisme de conviction.»
«Le prêtre n’est plus le patron de la paroisse, il préside simplement une eucharistie qui est un geste de fraternité, en mémoire de l’unique
sacrifice déjà accompli une fois pour toutes.»
«Il faut amener les chrétiens à devenir des adultes dans la foi plutôt que de se replier sur eux-mêmes, occupés à répéter une doctrine officielle au lieu
d’inventer librement leur conviction.»
«Quand les laïcs et les prêtres restent des mineurs dans l’Eglise, alors l’Eglise n’est plus crédible. Des “mineurs” ? C’est-à-dire être dans cet état d’incapacité de
penser et de vivre sans la direction d’autrui. L’Eglise doit parler d’adulte à adulte. C’est l’exigence incontournable de la modernité.»
«Dans l’Eglise l’ouverture prend enfin la place de la fermeture. Au lieu de dicter aux gens des mœurs médiévales préfabriquées, il faut s’adapter à leurs
comportements actuels.»
Il a suffi de piocher dans les propos habituels de trois ou quatre évêques pour obtenir ce discours-type, reconnaissable à ce qu’il exprime, de manière à peu près cohérente,
l’idéologie dominante dans l’irréelle bulle médiatique qui impose par sidération le morne conformisme de sa pesante chape tyrannique. Mais il faut savoir que ce sont là des propos
épiscopaux, rapportés sans avertissement ni mise en garde par La Croix ou La Documentation catholique. On y perçoit la nature et la gravité de la maladie
moderniste qui étend librement sa contagion dans le catholicisme depuis qu’y a été lancé le mot d’ordre de ne plus « brandir les armes de la sévérité » et d’« estomper
l’aspect hiérarchique de l’Eglise ». […]
Le simple fidèle est souvent troublé ou trompé par des discours épiscopaux. Il n’est pourtant pas besoin d’avoir étudié la théologie chez des Dominicains non progressistes pour apercevoir
que si l’on sort de l’orthodoxie on tombe dans l’hérésie ; que les convictions personnelles sont fragiles quand elles ne sont pas soutenues par des « habitudes » qui en
l’occurrence sont des vertus. Le plus suspect refrain est celui de l’« adulte » et de ses convictions obligatoirement personnelles. Dans la plupart des cas, la foi est au contraire un
don reçu à la naissance par le baptême : c’est ce qui, dans le catholicisme, enrage le plus la franc-maçonnerie. Sa laïcité consiste à accepter que la religion catholique soit une
opinion parmi d’autres, non pas héritée dans l’enfance mais choisie à l’âge adulte, comme on adhère à un parti politique ou à une philosophie. Que le petit catéchisme pour enfants baptisés ait
été supprimé depuis quarante ans est-il une coïncidence fortuite ou bien un acquis du « dialogue » ? Quiconque n’accueille pas le Royaume de Dieu en petit enfant n’y entrera pas
(Lc 18, 17). Ce verset de saint Luc, à chacun des évêques qui ont inspiré notre sottisier de l’évêque-type d’une religion adulte, je souhaite qu’il l’entende à temps, pour n’avoir point à aller
constater que l’enfer, quoi qu’on dise, n’est pas vide.”