Evêque de Coutances, Mgr Stanislas Lalanne fut en 2002 l’un des rédacteurs du rapport épiscopal “Lutter contre la pédophilie”. Il répond à “Valeurs actuelles“.
“En France, la déclaration faite par les évêques le 9 novembre 2000, votée par l’ensemble des évêques en assemblée plénière, qui venait après tout un travail effectué par un groupe
d’experts (juristes, moralistes, canonistes) et de pasteurs dont je faisais partie, est extrêmement claire sur la position de l’Eglise. Cette déclaration disait les choses suivantes :
1) L’Eglise condamne absolument les actes de pédophilie, et plus encore quand ils sont le fait d’éducateurs, qui imposent ainsi à la victime des actes profondément destructeurs ;
et plus encore quand l’agresseur est un prêtre, car il y a alors une double trahison : de la part d’un adulte averti qui impose à un mineur ses pulsions, et en contradiction totale avec
l’Evangile qu’il annonce. La blessure est d’autant plus profonde qu’elle vient de quelqu’un à qui on pensait pouvoir donner sa confiance.
2) Les évêques disaient clairement que les prêtres qui se sont rendus coupables d’actes pédophiles doivent en rendre compte devant la justice.
[…]
On entend souvent mettre en cause le célibat des prêtres…
Il faut rappeler qu’au moins 80 % des abus sexuels envers des mineurs se passent à l’intérieur du cercle familial. Il n’y a pas plus de cas de pédophilie chez les célibataires
que chez les hommes mariés. Le célibat consacré ne renforce ni ne diminue les pulsions d’une structure psychologique profonde qui entraîne aux abus sexuels. Cette polémique
suppose que la pédophilie ne serait qu’un manquement à la chasteté, or ça n’est pas ça du tout. Cela provient d’une structure psychique très blessée, avec une très grande immaturité affective et
sexuelle. Il y a une vraie perversité de la personnalité.
Dans ces affaires, les médias parlent des pédophiles avant tout comme de prêtres, presque comme si c’était leur appartenance à l’Eglise qui avait créé cette perversité…
L’Eglise et les prêtres sont plus dans le collimateur que les autres, c’est certain, ne serait-ce que parce qu’on attend beaucoup du prêtre : on lui fait confiance, on attend de lui qu’il fasse
grandir les enfants qu’on lui confie en humanité, dans la foi, en liberté… La déception éprouvée quand une telle affaire est découverte est d’autant plus grande. Malgré la profondeur des
blessures infligées, il faut pourtant redire que ces affaires ne concernent qu’un nombre très minoritaire de prêtres. C’est pour cela qu’en même temps qu’il ne faut rien tolérer,
il faut aussi être extrêmement prudent pour ne pas casser des personnes innocentes, comme ça s’est vu. Et aussi extrêmement attentif à ne pas jeter l’opprobre sur l’ensemble des
prêtres, dont la quasi totalité vit avec bonheur cette relation éducative, et à ne pas faire d’amalgame qui tendrait à dire que l’Eglise serait perverse dans son ensemble. Ça n’est pas acceptable
d’entendre ça.
Certains cherchent à impliquer Benoît XVI dans la gestion de ces affaires…
Alors qu’il a manifesté au contraire un grand souci de vérité. Quand on regarde, depuis le début de son pontificat, le nombre d’interventions qu’il a pu faire sur ces questions-là, il n’y
pas photo. Mais il peut y avoir, chez certains, une volonté de profiter des ces affaires douloureuses pour déstabiliser l’Eglise. ”