Beige, on trouve ce courrier de Mgr Bruno Grua, évêque de St Flour, indiquant pourquoi il ne soutient pas la Marche pour la Vie du 17 janvier (tandis que 25 évêques français la
soutienne) :
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“La défense de la personne humaine de la naissance à la mort est une cause primordiale à défendre. Les
évêques de France font beaucoup sur ce point, ne serait-ce que par le très profond travail de réflexion qu’ils ont mené en vue des révisions des lois de bioéthique. Mon chemin,
personnellement, serait plutôt celui là que celui d’une manifestation publique mais je comprends parfaitement que d’autres préfèrent ce moyen d’expression. Et puis, je vous signale que
j’ai quelques obligations pastorales et que dimanche prochain je serai à Mauriac. Je vous souhaite un bon dimanche et souhaite que votre démarche contribue, avec d’autres, à alerter
l’opinion.”
Au moins, ce courrier n’est pas franchement négatif, car il n’est pas hostile à la Marche. Mais Mgr Grua fait cette erreur de mélanger l’action défensive, contre un projet en cours (comme la
révision des lois sur la bioéthique) et l’action offensive, qui consiste à ne pas se satisfaire du mal qui s’ancre dans la société. Henri Védas a expliqué comment ces deux tactiques sont complémentaires :
- “Opposer défensive et offensive est absurde – demander à n’importe quel général, ou à n’importe quel entraîneur de foot. Et ce qui est vrai pour le sport est vrai pour le mouvement
pro-vie. Les partisans du respect de la vie se voient d’ailleurs souvent obligés de mener des actions défensives s’opposant à la propagation sans frein de la culture de mort. En ce
moment même par exemple, les évêques catholiques conduisent une action en profondeur pour éviter le pire lors de la révision des lois de bioéthique Sur le front de l’euthanasie également,
plusieurs associations combattent pied à pied les pressions pour la légalisation. Mais de même qu’une équipe qui ne joue qu’en défensive ne
marquera jamais de but, le mouvement pro-vie ne peut pas se contenter de défendre un statu quo profondément contraire à la justice élémentaire. Il ne doit pas se contenter de ne
pas perdre du terrain, mais combattre offensivement l’avortement légal et son cortège de malheurs.
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Mais voilà : les méthodes qui fonctionnent en défense ne marchent pas nécessairement en attaque, et vice-versa. Dans un
entretien début novembre [2008], Mgr Vingt-Trois, interrogé sur la tactique « discrète » adoptée par l’épiscopat dans le cadre du débat sur la bioéthique, disait son
scepticisme quant à l’efficacité des manifestations de rue, telles que celles pour la défense de la famille ces dernières années en Espagne : «Je n’ai pas remarqué que les défilés
qui ont eu lieu à Madrid aient empêché grand-chose ! Je peux me permettre de penser que, au moins sur le plan tactique, ce n’est pas la meilleure solution».
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Cette remarque vaut-elle pour le grand rendez-vous
pro-vie annuel : la Marche pour la Vie, co-organisée par Choisir la vie ? Non, justement du fait de la distinction entre actions offensives et défensives.
Comme les manifestations espagnoles, le combat que mène actuellement l’épiscopat sur la bioéthique est essentiellement défensif :
empêcher la révision de la loi de 2009 de donner lieu à un glissement plus avant dans la culture de mort. Dans ce contexte, même si des contre-exemples existent, une action
discrète est parfois la plus fructueuse. Mais notre lutte contre l’avortement légal est, elle, offensive – elle vise à reconquérir
un terrain que l’adversaire considère comme définitivement acquis. Et ce n’est pas les coulisses du pouvoir que l’on fera bouger
les lignes : c’est en agissant sur l’opinion avec, malheureusement les armes du pauvre. Les médias ne nous feront pas de faveurs. Ils savent que notre première victoire serait que
l’opinion sache que l’avortement légal est contesté, et non pas entré dans les mœurs. Ils ne se résoudront à le faire que si ils n’en ont pas le choix – si nous sommes
des dizaines de milliers dans la rue. La Marche pour la Vie est
donc la meilleure chance du mouvement pro-vie de vraiment reprendre l’offensive. Certains fruits en sont déjà perceptibles :
invitations dans les médias, dynamisation des réseaux, mobilisation d’une nouvelle génération de militants du respect de la vie…”