Extraits d’un éditorial de l’évêque d’Ars :
- “Si l’on s’interroge sur l’identité nationale, c’est que l’on ne
sait plus ce que l’expression recouvre exactement. La cause en est due d’abord à l’impact de l’Europe sur notre pays ! En devenant membres de l’Union Européenne,
les Français voient plus ou moins s’effacer le sentiment de leur appartenance à la Nation. De ce fait, la notion de nationalité, sans vraiment disparaître, passe au
second plan. On se dit facilement citoyen de l’Europe et même parfois, plus radicalement encore, “citoyen du monde.” Que devient alors le lien qui unit à son propre
pays ?
- L’une des autres causes qui entoure d’un brouillard l’identité nationale, c’est l’arrivée dans note pays d’un grand nombre d’ «étrangers». Un seul exemple : quand
l’équipe de football qui défend les couleurs de la France, se présente avec une majorité de joueurs d’origine africaine dans ses rangs – ce qui n’est en rien critiquable, bien
entendu ! – on se pose la question :”Que veut dire exactement l’expression : “équipe de France” ?
- […] A n’en pas douter, l’un des chemins qui ouvre à l’identité nationale passe par l’histoire. […] Ainsi, comme évêque de Belley-Ars, je ne peux pas
ignorer que la présence d’un évêque, identifiée avec certitude par l’histoire dans la Ville de Belley, remonte à l’an 412. Il s’appelait Audax. L’Evêque actuel est le centième
d’une lignée qui en compte quatre-vingt-dix neuf avant lui. Ainsi, depuis seize siècles, le christianisme est présent – de façon organisée – sur notre région. Comment,
sur une aussi longue durée, l’Évangile n’aurait-il pas façonné le comportement de ses habitants, leur mode de pensée, leur culture, leur vision de l’existence ?
- On peut discuter sur le bien fondé de cet impact, mais on ne peut contester les données objectives de l’histoire. Les traces de cet héritage sont là sous nos yeux. Il suffit
de voir “ce long manteau d’églises et de cathédrales qui recouvre notre pays pour comprendre que les valeurs chrétiennes ont dû quand même y jouer un rôle“,
déclarait Nicolas Sarkozy, le 13 décembre 2007. Pourquoi s’en excuser ? Pourquoi s’en défendre puisque nous sommes tout simplement devant une donnée de fait ? La
culture issue de cette imprégnation des siècles est si profondément enracinée qu’elle est devenue comme une seconde nature ; elle fait si bien corps avec chacun d’entre
nous qu’elle a ce grave inconvénient de ne plus s’interroger sur les origines où elle a puisé sa sève.
- Jean-Paul II avait justement osé dire au Bourget, le 1er juin 1980 : “On sait la place que l’idée de liberté, d’égalité et de fraternité tient dans votre
culture, dans votre histoire. Au fond, ce sont là des idées chrétiennes.” S’interroger sur l’identité nationale, c’est donc retrouver le chemin des origines et les
assumer comme un creuset qui, au fil des siècles, a forgé l’identité de notre pays. Cette interrogation conduit à reconnaître que l’un des facteurs majeurs de cette
identité, c’est bien le christianisme. […]
- Il est vrai que le siècle des Lumières a contesté cet héritage, mais il en est resté, malgré lui, profondément imprégné. Le cadre mental dans lequel il exprimait ses
“idées nouvelles” continuait à s’alimenter souterrainement à la Source qu’en surface il rejetait !
- Aussi quand, sur l’horizon qui nous est familier,
surgissent d’autres cultures – issues d’autres religions – nous nous interrogeons légitimement sur leur compatibilité avec notre propre identité nationale.
Et c’est aussi l’occasion d’avoir une plus claire conscience de ce que veut dire être français. Au nom de cette identité, nous interrogeons l’Islam. Accepte-t-il, dans les
faits, la liberté de conscience ? Intègre-t-il, dans le champ social, l’égalité entre l’homme et la femme ? Le respect des consciences va-t-il jusqu’à accueillir le
changement de religion sans crainte de représailles ? Peut-on être tranquillement adepte d’une autre religion dans un pays musulman ? Si la réponse est “oui” pour tel
pays, et “non” pour tel autre, alors y a-t-il un organisme officiel qui définit la juste pensée de l’Islam ? Où se trouve la véritable
interprétation ? Le Français a besoin de le savoir au moment où son pays accueille cette culture sur son territoire et cela au nom de l’identité nationale. Car
voici, par exemple, ce que je lis sous la plume d’un Père Jésuite égyptien, le Père Boulad, bon connaisseur de l’islam :
- “Quand un musulman me dit : l’islam est la religion de la tolérance, je lui réponds : parmi les 57 pays musulmans de la planète, cite
m’en un seul où la liberté religieuse existe. Si bien que le non-musulman n’a pas sa place. Il est toléré, tout juste, comme dhimmi, mais à part ça, non. La tolérance, pour
l’islam, c’est que vous êtes toléré comme citoyen de deuxième zone en tant que chrétien ou juif. Mais en dehors de ça, si vous êtes bouddhiste ou hindouiste, vous n’êtes plus
toléré. Vous êtes un kafir, c’est-à-dire carrément un apostat, un impie. […]“
- N’est-ce pas le rappel de l’exigence d’un dialogue en vérité, au moment où l’on s’interroge sur l’identité nationale ? Et cette
exigence dépasse largement la discussion sur la hauteur des minarets, même si celle-ci est à prendre aussi en considération.”