Nos excellents confrères du site Benoît et moi ont traduit un entretien passionnant avec le Rév. Gladfelter, métropolite de l’Église Catholique Anglo-Luthérienne (ALCC), branche du luthéranisme qui demande à entrer dans la pleine communion de l’Eglise romaine. Voici quelques extraits des déclarations:
“Finalement la ALCC est arrivée à reconnaître la vérité absolue de la foi catholique et s’est rendu compte qu’elle avait une obligation de conscience à retourner vers Rome. […]
Du fait des conseils de notre avocat catholique de Droit Canonique, la ALCC n’a demandé que d’entrer comme « Société Sacerdotale », ou dans une forme qui conviendrait au Saint Père. Notre demande se terminait ainsi: « Le fils prodigue est revenu et est à la porte. Saint Père, s’il vous plait, laissez-nous entrer ». La ALCC n’a jamais demandé plus que cela. Elle est à la porte et elle demande qu’on la laisse revenir à la maison.
Cependant, lorsqu’à l’automne 2010, nous avons reçu une lettre de notification du secrétaire de la CDF nous proposant d’entrer dans l’Eglise catholique à travers les dispositions d’Anglicanorum Coetibus, par obéissance aux désirs du Saint Père et de la CDF, la ALCC a accepté immédiatement ces instructions par écrit. Ainsi donc, la ALCC attend patiemment et prie le Seigneur et sa Bienheureuse Mère, Marie, qu’on nous permette de revenir à la maison, à l’Église Catholique, soit par l’intermédiaire d’Anglicanorum Coetibus soit par un autre moyen. […]
À la différence du patrimoine anglican, le patrimoine luthérien est essentiellement théologique et en ayant pleinement compris les hérésies du luthérianisme et en ayant accepté la foi catholique, la seule chose que la ALCC demande et pour laquelle elle prie, c’est qu’on lui permette de « revenir à la maison » et d’entrer dans l’Église Catholique, comme des fils prodigues repentis. La seule chose que nous voulons c’est nous dissoudre dans l’Église Catholique, comme des catholiques normaux. […]
l’Église Catholique, et en général le christianisme, sont attaqués actuellement. Les communautés ecclésiales comme les Anglicans et les Luthériens se divisent chaque fois plus sous les attaques de l’athéisme, de l’agnosticisme, de la philosophie postmodernes et des théologies hérétiques de type libéral. L’Église ne peut se permettre d’affronter ces menaces et d’autres dans son état actuel de division.
C’est le moment pour les Luthériens et d’autres communautés de revenir à l’Église Catholique, pour qu’il soit plus facile pour elle de vaincre ces menaces et réaliser la Nouvelle Évangélisation promue par le Pape Benoît XVI et d’autres personnes !”
J’avoue que je suis un peu étonné qu’un tel processus soit aussi long. Je comprends bien qu’il faille vérifier l’orthodoxie des demandeurs, mais les courriers dont le Rév. Gladfelter fait état me semblent assez nets. Et, contrairement à ce qui se pratique souvent (et parfois tout à fait légitimement), ces luthériens ne mettent aucune condition. Il n’y a pas non plus de problèmes d’ordre patrimonial. Donc tout devrait être simple…
J’aime en particulier beaucoup cette définition que donne le Rév Gladfelter de sa communauté:
“il s’agit d’une Église profondément « romanisée » qui travaille de toutes ses forces pour « défaire » la Réforme, parce qu’elle considère qu’il s’agit d’une tragique erreur aux proportions épiques, qui ne devait jamais arriver et essaie de restaurer l’unité de l’Église selon les critères de l’Église Catholique.”
Voilà un oecuménisme qui ne sombre pas dans le relativisme!
Je prie donc bien volontiers pour que ces luthériens puissent trouver leur place dans notre Eglise catholique – puisqu’ici, de toute évidence, il ne s’agit pas d’un oecuménisme à la petite semaine, qui ne se préoccupe pas de vérité.
NB: J’avais vu une chose un peu surprenante dans cet entretien:
“Quelques uns de nos évêques sont membres de la Confraternité de Saint Pierre, dirigée par la Fraternité Sacerdotale Saint Pierre (FSSP), une société catholique. “
Je me suis demandé s’il s’agissait d’une autre Fraternité Saint Pierre que la célèbre communauté Ecclesia Dei. Manifestement, mon confrère Christophe Saint-Placide s’est posé lui aussi des questions sur cette phrase:
“Des « évêques » anglo-luthériens, membres de la Confraternité Saint-Pierre, voilà qui a de quoi surprendre ! Et voilà qui entraîne quelques questions.
1°) Les responsables de la Confraternité – aux Etats-Unis, il s’agit de l’abbé James Fryar – savaient-ils que ces responsables de « l’Église Catholique Anglo-Luthérienne » appartenaient à la Confraternité ?
2°) S’ils le savaient, à quelles conditions ces derniers ont-ils été admis au sein de cette Confraternité ?
3°) S’ils ne le savaient pas, peut-on considérer que ces « évêques » ont caché, délibérément ou non, aux responsables de la Confraternité Saint-Pierre, leur appartenance à une autre confession chrétienne ?
4°) Y a-t-il des rencontres personnelles avec chaque futur confrère avant son acceptation dans la Confraternité Saint-Pierre ou y adhére-t-on sur simple demande (par courrier, par exemple)?”
Et il a noté que le site américain de cette confraternité ne mentionne pas la nécessité d’être catholique pour être membre, à la différence du site français. Je vous renvoie volontiers à son article, très complet, mais aussi plein de circonspection, car cette affaire semble un peu étrange.
La claire résolution affirmée par ces luthériens et leur ardent désir de retrouver la communion de l’Église sont un baume sur les blessures que lui infligent hélas ! certains de ses ministres qui cultivent, eux, l’ambiguïté ou la compromission, tel ce prêtre – évoqué ici même – célébrant pour son jubilé sacerdotal une parodie de “cène” en compagnie d’une femme pasteur.
Rendons-nous compte. C’est un événement historique, cinq siècles après la Réforme, que des anglicans et des luthériens reviennent dans le sein de l’Eglise! C’est probablement une première dans l’Histoire. C’est une manifestation puissante de l’Esprit à l’oeuvre aujorud’hui!