Les 18 et 19 mai, l’Institut royal jordanien d’études interreligieuses et le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux se sont réunis à Rome sous la présidence du Professeur Kamel Abu Jaber et du Cardinal Jean-Louis Tauran pour réfléchir aux valeurs partagées entre musulmans et chrétiens en matière d’éducation. L’agence VIS a publié leur communiqué commun:
1) Chrétiens et musulmans partagent des valeurs fondamentales comme la sacralité de la vie, la dignité de la personne et ses droits inaliénables.
2) Certaines valeurs religieuses sont communes aux musulmans et aux chrétiens, d’autres spécifiques à chaque communauté. Il est donc important de souligner les points communs comme les différences. Le respect des différences est d’ailleurs une condition fondamentale pour un dialogue authentique.
3) L’éducation, l’éducation religieuse en particulier, ne doit pas pousser à l’antagonisme ou à la violence, mais aider les jeunes à s’enraciner dans leur identité propre tout en s’ouvrant aux autres identités religieuses.
4) Le lieu privilégié de l’éducation est l’enseignement public ou privé, où les jeunes chrétiens et musulmans peuvent étudier ensemble. Il faut conserver cet espace commun qui permet la constitution de solides amitiés.
Il me semble que cette déclaration aurait gagné à être plus précise, mais peut-être est-ce l’exercice même du dialogue interreligieux (qui, en l’espèce, me paraît beaucoup plus interculturel qu’interreligieux) qui conduit à ce flou.
S’agissant du point 1, pour ma part, j’aurais apprécié qu’il soit dit que chrétiens et musulmans adhéraient ensemble à la loi naturelle… et que cette adhésion commune les heurtaient frontalement à la dictature du relativisme ambiant.
Mais, naturellement, dire cela conduit instantanément à constater que chrétiens et musulmans n’adhèrent pas ensemble à l’intégralité de la loi naturelle et qu’en particulier, la loi coranique n’est pas conforme à la loi naturelle en matière de mariage et de respect de la dignité de la femme.
Les points 2 et 3 coulent de source, mais le lecteur aimerait quelques précisions. Je n’ai, par exemple, pas connaissance d’une seule école chrétienne excitant ses élèves à la haine anti-musulmane. Le cas inverse est, hélas, fréquent.
Enfin, s’agissant du point 4, il omet juste de dire que, dans l’immense majorité des cas, ce sont des écoles chrétiennes qui accueillent des musulmans et permettent aux petits chrétiens de découvrir l’islam et les musulmans.
En bref, ce communiqué semble regarder les relations entre musulmans et chrétiens (je n’ai pas dit les relations entre islam et christianisme qui, à mon humble avis, sont parfaitement inexistantes… notamment faute de représentants autorisés à parler au nom de l’islam) de Sirius, faisant mine de croire à une parfaite réciprocité. Ce qui me paraît un tantinet optimiste!
NB: est-il besoin de préciser que ce n’est pas parce que cette réciprocité n’existe pas dans les faits qu’il ne faut pas discuter avec les musulmans pour dégager des valeurs effectivement partagées, mener des combats communs, et mettre enfin en place une réciprocité permettant, en particulier, à nos frères chrétiens en “terre d’islam” d’être acceptés comme citoyens à part entière et de prier librement le vrai Dieu?
Par rapport à l’alinéa 1) sacralité de la vie, la dignité de la personne et ses droits inaliénables.
J’ai lu un article très intéressant ici http://www.religionenlibertad.com/articulo.asp?idarticulo=14467 et dont voici la traduction
L’auteur de l’article est juriste
L’avortement dans l’islam
C’est un des lieux communs répétés jusqu’à satiété : dans l’islam toute forme d’avortement est interdite. Mais cependant ce qui est sûr c’est que si l’on gratte un peu, en matière de conception et régulation de l’avortement dans la pensée islamique, quoique par des chemins quelque peu différents, on peut arriver à ce qui ressemble à ce que les législations occidentales mettent en œuvre.
Pour commencer, le thème n’est pas mentionner dans le Coran dont la référence la plus proche est plus en relation avec l’infanticide que l’avortement:
« Ne tuez pas votre enfant par peur de vous appauvrir. Nous sommes ceux qui les pourvoirons, et à vous aussi. Les tuer est un grand péché ». (C. 17, 31)
De fait, si on avait voulu interdire l’avortement, l’ensemble des versets dans lequel ce commandement est repris aurait été assez propice pour le faire, en parlant de la fornication (C. 17, 32), du meurtre (C. 17, 33), des orphelins (C. 17, 34), chose qui, cependant, ne se fait pas.
L’islam présume de défendre la vie depuis son commencement même, quelque chose qui théoriquement parlant, ne se différencie pas du christianisme. La différence commence quand on débat sur le moment précis où commence la vie. Et ainsi tandis que pour le christianisme l’affaire est tout à fait claire, « la vie humaine doit être respectée et protégée d’une manière absolue depuis le moment de la conception » (Catéchisme, article 2270)- dans l’islam, au contraire, l’un des problèmes qui se pose est, précisément, celui du moment où l’âme est insufflée au fœtus et où cette vie commence. Un moment qui ne coïncide pas nécessairement avec la conception, et qui varierait selon les différentes écoles juridiques, selon les différents auteurs et même selon les différents hadiths (*) depuis ceux qui soutiennent que cela a lieu aux quarante jours de la conception jusqu’à ceux qui défendent qu’il doit se dérouler jusqu’à cent vingt jours, quatre mois, rien de moins, pour que cela se passe. Par exemple, un hadith recueilli par Al Bujari, soutient que selon Abu Huraira, aurait dit Ibn Mas’ ud : « j’ai entendu le Messager d’Allah dire : « Quand l’ovule fécondé a quarante deux nuits accomplies Allah envoie un ange pour qui lui donne forme, le dote de l’ouie et de la vue et lui donne sa peau, sa chair et ses os ».
Encore ainsi le recours au l’avortement dans les pays musulmans est beaucoup moins fréquent que dans les pays occidentaux. Ce n’est pas, d’après ce que nous voyons, non pas de part d’un concept métaphysique plus strict de la vie que celui que soutient l’éthique chrétienne, mais par le fait que la promiscuité, comme c’est notoire et connu, est moins importante dans les pays musulmans que dans les chrétiens. Et par le fait aussi que les législations, quoi pas autant qu’on a tendance à le croire, sont quelque peu moins permissives qu’en Occident.
Ainsi, un système d’avortement à la demande similaire à ce que nous venons de mettre en place en Espagne, n’est en vigueur que dans trois pays musulmans, la Tunisie, la Turquie et Barhein. Dans la pratique dans la totalité des pays musulmans, le système qui est en vigueur est celui de la dépénalisation par supposés. Est très fréquente la dépénalisation dans le cas de danger pour la santé physique ou psychologique de la mère. À ces effets, il n’est pas inutile de rappeler que 97% des avortements pratiqués en Espagne (c’est à dire des chiffres supérieurs à 100 000 avortements par an) quand on avait une loi par supposés l’étaient sur la base des supposés se référant à la santé psychologique de la mère, transformé en véritable appel d’air pour quelque chose qui a ressemblé de très près à l’avortement libre ou à la demande. Dans d’autres pays musulmans, l’on permet aussi un supposé qu’on peut appeler eugénique (malformation du foetus) ou celui éthique (viol de la mère). Dans aucun pays musulman est une vigueur une interdiction absolue de l’avortement alors qu’elle existe au contraire dans quelques pays chrétiens comme le Chili et Malte.
(*) Les hadiths comme l’on sait sont la seconde source de droit religieux de l’islam et rassemble tous les dits et faits du Prophète, transmis par une chaîne de témoins considérée fiable.
Le cardinal Tauran ne vaut pas un dinar. Cet épisode vient le rappeler utilement.
J’en profite pour signaler une chose à propos de Catherine Middleton, puisqu’il a récemment été question ici de sa religion. Elle est bien anglicane de naissance mais ses parents ont précisément habité en Jordanie quand elle était dans la petite enfance. Elle a donc suivi la maternelle dans le royaume hachémite et ses parents font si peu de cas de leur attachement au christianisme anglican qu’ils ont tenu à ce qu’elle apprît des sourates du Coran (pour “vivre le dialogue interculturel”). C’est dire qu’en fait elle est tout juste sociologiquement chrétienne et en fait indifférente sinon agnostique.
En tant que l’un des administrateurs du site des convertis issus de l’islam http://notredamedekabylie.net/, je me permets de vous faire parvenir l’information qui suit. Elle concerne le dialogue islamo-chrétien actuel. L’autorité du théologien et islamologue qui s’exprime, sa liberté d’expression jointe à son souci de vérité, rendent ce document exceptionnel.
Le site “Notre-Dame de Kabylie” a publié le 14 mai une interview du père François Jourdan, prêtre eudiste, auteur de “Dieu des chrétiens, Dieu des musulmans. Des repères pour comprendre” (L’œuvre, 2008, préfacé par Rémi Brague), sur le dialogue islamo-chrétien. Il est exceptionnel d’avoir le point de vue d’un spécialiste reconnu à la fois comme théologien, islamologue avec une expérience de l’enseignement universitaire, et une expérience du vécu dans plusieurs pays musulmans. A ceci le père François Jourdan ajoute une pratique du dialogue en tant que délégué du diocèse de Paris pour les relations avec l’islam (1998-2008). Un tel cumul de compétences est en effet unique, surtout lorsque ces compétences sont mises au service de la vérité d’une situation, qui fait tant défaut au dialogue actuel. Plus de détails sont donnés en annexe.
Cette interview a pour titre “Réponses du père François Jourdan aux questions de Moh-Christophe Bilek”
http://notredamedekabylie.net/Autresrubriques/ExpressionAwal/tabid/63/articleType/ArticleView/articleId/694/Reponses-du-pere-Francois-Jourdan-aux-questions-de-MohChristophe-Bilek.aspx
Le 7 juin à 18h, à l’Institut Catholique de Toulouse, le père Jourdan donnera une conférence “L’islam est-il une religion biblique?”
Le père François Jourdan est prêtre eudiste, islamologue, docteur en théologie, en histoire des religions et en anthropologie religieuse. Il a enseigné la mystique islamique à l’Institut Pontifical d’Études Arabes et islamiques de Rome (1994-1998), et l’islamologie pendant 15 ans à l’Institut Catholique de Paris, et 10 ans à l’École Cathédrale. Il fut délégué du diocèse de Paris pour les relations avec l’islam (1998-2008).
Son livre “Dieu des chrétiens, Dieu des musulmans. Des repères pour comprendre” (L’œuvre, 2008, préfacé par Rémi Brague) met en cause l’assertion “chrétiens et musulmans ont le même Dieu”, devenu un dogme du dialogue islamo-chrétien actuel. Cet ouvrage a alors été l’objet de recensions très négatives (réactions de type idéologique, procès d’intention) dans “La Croix” du 7 février 2008 (page 13), sur le site du “Groupe de recherches islamo-chrétien” (GRIC), et dans la revue Islamochristiana (n° 34, Rome, 2008, p. 309-311). Dans cette dernière revue le Père Blanc Etienne Renaud lui reproche en particulier l’absence d’un minimum de sympathie pour l’islam, en ajoutant qu’il faut reconnaître dans le Coran “la trace d’une expérience spirituelle très profonde faite par Mohammed”. A propos de François Jourdan, une note de l’article de Marie-Thérèse Urvoy dans Catholica (n° 106, janvier 2010) résume la situation en disant que “de comptes rendus désapprobateurs en critiques infâmantes, il finit par être expatrié aux Philippines, à 60 km de Manille”. Il est depuis 2008 en mission eudiste aux Philippines, confrontées à l’islam asiatique.
François Jourdan est aussi l’auteur de “Le Messie en Croix, selon les premières églises face à l’islam” (Coll. “Studia Arabica”, Vol. XIII, Éditions de Paris, Paris, 2010, 490 pages), ouvrage impressionnant par l’érudition des données réunies sur un sujet, qui fait difficulté dans les échanges avec les musulmans. Un nouvel ouvrage paraîtra à l’automne 2011: “La Bible face au Coran, les vrais fondements de l’islam” (Éditions de l’Oeuvre).
Ceci ne fait que confirmer ce que l’on sait depuis longtemps…il n’y a pas de possible dialogue d’un catholique qui se réfère à l’evangile avec un musulman qui connait le Coran mais bien une écoute de ce dernier pour lui dire dans quelle aberration navigue l’idéologie qu’est ISLAM
Je saisis la balle au bond, car j’ai cherché à contacter Notre-Dame de Kabylie via son site internet pour un projet d’évangélisation envers des musulmans. Auriez-vous, Christian, la gentillesse de rentrr en contact avec moi? Mon mail : “FR.” + le prénom fêté le 10 du mois d’avant la Toussaint ; chez Gmail.
Merci aussi pour ce livre que vous présentez.
ces 2 religions présentent trop de différences: il ne s’agit pas de dialoguer mais de se supporter.En pays musulman cela est possible si le gouvernement est ouvert à l’autre comme en Jordanie, et ailleurs???
Même dans les pays dits tolérants, dans la limite de l’acceptable de la “tolérance” version islam, le chrétien reste un citoyen de “seconde zone”, en Jordanie comme ailleurs!
” En tant que converti, je suis donc une sorte d’extraterrestre pour les habitants de F. (l’une des rares villes de Jordanie où il y a des chrétiens et où les cloches peuvent encore sonner). Pour eux, passer de l’islam au christianisme est absolument impensable. Une folie, qui plus est extrêmement dangereuse. L’idée même de conversion leur est totalement étrangère”
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“Un soir O.F. me raconte qu’à l’université (toujours en Jordanie) on a demandé aux chrétiens de se lever dans l’amphithéâtre. Deux ou trois filles ont eu le courage de se lever. Elles se sont fait copieusement insulter par le reste des étudiants, d’abord parce qu’elles sont non voilées, ensuite parce qu’elles ne sont pas musulmanes!”
extraits du “Prix à payer” de Joseph Fadelle – en vente à l’AED, sur internet etc. Un livre que tout catholique devrait avoir lu!
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Je crois qu’il est d’abord très important d’être capable de se dire que les valeurs chrétiennes ou issues du christianisme qui nous paraissent évidentes, ne le sont pas pour tous, il faut donc pouvoir les transmettre. Si nous sommes tous frères en humanité, nous ne devons jamais faire du “cathomorphisme” ou “christianomorphisme”, c’est à dire voir les autres comme nous sommes au lieu de les voir comme ils sont dans une autre société et une autre civilisation.
La vérité seule peut rendre libre, et pas les “faux” dialogues sur des bases qui rognent artificiellement (pour ne pas ennuyer ou pour sciemment tromper – pieux mensonges de la Taqya) les différences. La vérité vient du Christ qui seul peut nous apporter la liberté.