Les journalistes moyennement informés et honnêtes savent parfaitement que Benoît XVI est le pape – et fut aussi le
cardinal – le plus soucieux de débarrasser l’Église des « souillures » qui la salissent. Soucieux et agissant. Mais son action, comme cardinal préfet de la Congrégation pour la doctrine
de la foi, fut souvent entravée à la fois par défaut d’attribution de compétence et par des coteries curiales qui, au nom de la sauvegarde de la “bonne réputation” de l’Église protégeaient en
vérité trafics et dévergondages. Ratzinger n’obtint de Jean-Paul II qu’en 2001 que tous les dossiers de prêtres et de prélats accusés d’abus sexuels sur des mineurs soient confiés à son
dicastère. Et il lui faudra même attendre le décès de Jean-Paul et son élévation au Souverain Pontificat pour que l’affaire de l’abominable P. Maciel, fondateur de la Légion du Christ, soit
réglé. Mais le cardinal n’obtint cette victoire de 2001 qu’après une sévère défaite…
Ce qui est incroyable, c’est que nous apprenons cela d’un prélat aux idées parfois un peu bizarres, mais évidemment très au fait, puisqu’il s’agit du cardinal Christoph Schönborn, l’archevêque de
Vienne… Ce dernier succéda en 1995 et en catastrophe – mais une catastrophe gérée “diplomatiquement” au Vatican – au cardinal Hans Hermann Groer contraint à la démission par Jean-Paul II en
septembre 1995 pour ce que nous savons être aujourd’hui un peu plus que des “allégations” d’abus sexuels sur des garçons et des jeunes gens après les révélations faites en mars de cette même
année par une de ses victimes qui dut supporter dans sa jeunesse quatre années de rapports sexuels contraints. Et ce ne fut pas la seule victime : on a rétrospectivement des sueurs froides quand
on songe que ce Groer fut préfet des études du petit séminaire de Hollabrunn (Basse Autriche) de 1946 à 1952 puis professeur de religion et aumônier au lycée fédéral de cette même ville de 1952 à
1976… Trente ans !
Or, Ratzinger tenta de convaincre Jean-Paul II de mener une enquête approfondie sur le “cas” Groer après sa “démission”, mais un parti de la Curie persuada le pape que les médias exagéraient,
qu’une enquête ne ferait qu’aggraver les choses et salir la “bonne réputation” de l’Église. Dans un entretien accordé à l’ORF, la radio-télévision publique autrichienne, le 28 mars dernier,
dimanche des Rameaux, sur les attaques contre le pape et l’Église à propos des clercs “pédophiles” et les raisons pour lesquelles l’enquête sur Groer, décédé en 2003, n’avait pas été poussée
jusqu’au bout, Schönborn déclara au journaliste : « [Ratzinger] m’a déclaré : “L’autre camp a gagné” ». Ratzinger avait perdu la bataille, mais pas la guerre comme nous le savons bien
depuis 2001. Curieusement, aucun organe de la grosse presse internationale n’a mentionné cette déclaration de Schönborn. Il est vrai que ce fait devrait les gêner, mais ce type de journalisme ne
s’intéresse pas aux faits.
NB: Pardon de publier un article sur ces affaires “crapoteuses” le jour de Pâques, ce n’est pas de gaieté de coeur; mais, voyant ce “curieux” silence des grands médias, je n’ai pas voulu
attendre!