Il semble invraisemblable qu’on aille chercher pour le propulser à Malines un Belge, évêque en
terre lointaine ( E. R. Dickmans, évêque au Brésil, Jan de Groef, évêque en Afrique du Sud, Luc Julian Matthys, évêque en Australie…), ou qu’on trouble l’attente de la retraite de Mgr Frans
Daneels, 68 ans, secrétaire du Tribunal de la Signature apostolique.
Et si le successeur du cardinal Danneels était choisi parmi un non-évêque ? Ce type de surprise est en soi
peu probable, mais l’état des lieux de la catholique Belgique est à ce point désastreux que le saint-siège pourrait tenter une solution tout neuve (j’ai déjà évoqué le précédent Mercier, en 1906,
simple prêtre élevé au siège de Malines-Bruxelles).
Faut-il, dans cette hypothèse, évoquer trois Belges de Rome, hommes de bien peu de relief – mais c’est peut-être
pour eux une chance – proches de l’œuvre caritative Missio, l’une des pierres angulaires du réseau associatif belge, et proches par le fait de la Communauté de Sant’Egidio, en osmose
avec Missio : Hendrik Hoet, professeur de théologie biblique, Leo Lemmens, qui travaille au Vatican pour l’aide aux Églises orientales, Jan Dumon, qui travaille dans les œuvres
pontificales missionnaires ? On imagine ce que donnerait le parachutage d’un fonctionnaire de curie à Malines, quand on sait ce qu’a produit celui de Bonny et de Van Looy à Anvers et à
Gand,
Restons donc plutôt dans les frontières du royaume.
Dans une ligne restaurationniste, on peut évoquer, mais pour ordre seulement, le P. Mohan Sawhney, qui est
assurément trop jeune (il est né en 1968) et dont la situation ecclésiastique est beaucoup trop modeste. Mais les épiscopables ratzinguériens sont si rares en Belgique, que ce jeune prémontré de
l’abbaye de Grimbergen, simple vicaire de la paroisse royale ND de Laeken (dont le curé est le progressiste Cosijns, qui concocte des prières eucharistiques persos), homme profond, modeste, de
grande réputation spirituelle, pourrait un jour pas trop lointain figurer dans les terna que le nonce présente à la Congrégation des Evêques.
Mgr Luc De Maere, homme entreprenant et bon gestionnaire, est un nom à retenir : l’article du
Standaard du 27 décembre 2007 n’hésitait pas à consacrer une rubrique à cet ecclésiastique ratzinguérien connu, épiscopable de bonne stature. Philosophe de formation, docteur en droit
canon, Luc De Maere est le représentant du saint-siège au sein du Comité international de médecine militaire. On le dit proche de l’Opus Dei, comme on le dit, il est vrai, de Mgr Bonny. Ce
parfait bilingue (néerlandophone et francophone), mais aussi polyglotte, qui a exercé de nombreuses charges professorales et judiciaires, est le fondateur de la branche belge de la Vereniging
voor Latijnse Liturgie, association néerlandaise pour la promotion de la nouvelle liturgie en latin (il accueille aussi dans sa collégiale Saint-Jacques d’Anvers une messe tridentine
mensuelle).
On pourra aussi penser un jour à Robrecht Boone (né en 1955), licencié en théologie, curé de St.-Jacques sur
Coudenberg à Bruxelles, l’autre paroisse royale, celle du palais de fonction du roi, le palais du Coudenberg. A la différence du curé de ND de Laeken, le chanoine Cosijns, l’abbé Boone est tout
sauf un idéologue. Son église est aussi la principale du diocèse aux Armées. Ancien aumônier général du Boerenbond, la puissante fédération agricole et rurale flamande, pièce maîtresse
du réseau associatif catholique, c’est un classique (sans être activement un restaurationniste), qui a étudié à Rome et qui entretient des contacts dans plusieurs épiscopats, jusqu’en Suisse et
même en Islande! Néerlandophone, il a le profil d’un futur évêque, à Bruges, Gand, Hasselt, ou encore comme auxiliaire de l’archevêque de Malines-Bruxelles pour le Brabant flamand, puisque Mgr
Jan De Bie a donné sa démission il y a déjà un an pour raison de santé.
A moins que ne « sorte » pour Malines – ou plus vraisemblablement pour un autre siège dans le but de se
placer pour Malines – le nom d’un Danneels boy, tel l’un ou l’autre des deux maîtres de la communication religieuse, assurée par Cathobel, l’agence de presse officielle de l’Eglise de
Belgique, auprès de laquelle La Croix semble un média conservateur.
Je veux parler d’Eric de Beukelaer (certes un peu jeune : il est né en 1963), licencié en droit, droit canon,
théologie, président du séminaire de Louvain-la-Neuve et porte-parole francophone de la Conférence des Evêques. Il est notoire que sur les « problèmes de société », le « manque
d’ouverture » des autorités romaines lui semble un pesant fardeau. Il a été administrateur, puis président de Cathobel, agence avec laquelle il continue à collaborer. Il dirigeait
d’ailleurs cette agence, lorsqu’à l’occasion de la Gay Pride de 2005, elle a invité les catholiques à se joindre aux gays chrétiens qui célébraient une messe d’ouverture.
Je pense aussi à Tommy Scholtès, sj, fondateur de RCF Bruxelles, administrateur de RCF-Namur Radio Cyclone,
coordinateur de la « province apostolique belge » regroupant les quatre RCF belges de Bruxelles, Liège, Namur et Bastogne, et directeur de Cathobel. Conseiller ecclésiastique à
l’ambassade de Belgique auprès du Saint-Siège jusque très récemment, d’abord aimable et très urbain, parfait bilingue (il est né à La Haye), est peut-être l’ecclésiastique du royaume qui dispose
du réseau de relations le plus considérable.
N’ambitionnant pas Malines pour lui du premier coup, Tommy Scholtès, dans la mesure où le dauphin de Danneels, De
Kesel, a fort peu de chances, ferait campagne pour la nomination de Mgr Bonny-couleur-de-muraille, dont je parlais dans mon dernier article, pour barrer la route à tout semi ou simili
ratzinguérien (Mgr Léonard) et a fortiori à tout vrai restaurationniste.
L’expérience prouve qu’en ces matières, le pire est toujours possible. Après le post-concile délirant de l’époque
Suenens et le post-concile délitant de l’époque Danneels, la Belgique connaîtrait le post-concile désespérant de l’époque… Cependant, 40 ans après Vatican II, Benoît XVI régnant, le
pire en matière de nomination épiscopale n’est pas certain!…