Quand un
plein panier de pommes contient des fruit pourris, que faites-vous ? Vous jetez les pommes gâtées pour ne garder que les fruits sains ou vous mettez tout aux ordures, les mauvais fruits
comme les bons – et le panier par-dessus le marché ?
Avec la visite canonique des Légionnaires du Christ que le cardinal secrétaire
d’État Bertone a annoncée en mars dernier, la question se pose. La révélation des turpitudes du fondateur, le P. Marcial Maciel Degollado, a jeté l’opprobre sur la congrégation qu’il a fondée au
Mexique en 1941 mais qui n’a été reconnue de droit pontifical qu’en 1965.
Il y a ceux, au premier rang desquels Benoît XVI, qui voudraient qu’on sauve ce qui peut être éventuellement sauvé après un
“audit” approfondi des affaires financières et morales peu ragoûtantes dans lesquelles ont trempé le RP Maciel, ses complices de l’intérieur de la Légion et ses “protecteurs” du dehors – et
jusque dans la Curie. Et puis, il y a les autres qui, au motif de bien des canailleries réelles, voudraient à tout jamais voir disparaître – morta la
bestia, morto il veneno – une congrégation “conservatrice” forte de plus de 800 prêtres, de trois fois plus de séminaristes, rassemblant près de 70 000 laïcs dans sa branche associée,
Regnum Christi, et qui coordonne 340 000 volontaires engagés dans des programmes d’action sociale, familiale et d’évangélisation une trentaine
de pays.
La liste des quatre commissaires constituant la visite canonique de la congrégation
n’est pas encore connue. Leur rôle, si. Ils devront, en prenant tout le temps nécessaire tout examiner dans le détail, recueillir une foule de témoignages, scruter les archives, examiner les
comptes, écrire la vie du P. Maciel, dresser la liste de ses relations, de ses donateurs, de ses protecteurs, de ses obligés aussi, s’efforcer d’évaluer la qualité du travail accompli par les
Légionnaires, de leur état d’esprit, de saisir les particularités des statuts de la congrégation, l’esprit avec lequel ils ont été appliqués… Le temps nécessaire risque d’être un temps…
long.
Si les noms de ces commissaires ne sont pas encore officiellement
connus, une liste des quatre noms les plus probables circule. Il s’agirait de Mgr Charles J. Chaput archevêque de Denver (Colorado) aux États-Unis, de Mgr Giuseppe Versaldi d’Alessandria (della
Paglia) en Italie, de Mgr Ricardo Watty Urquidi, M.Sp.S., de Tepic (Nayarit) au Mexique, et du RP Gianfranco Ghirlanda, sj, le Rettore Magnifico du
plus illustres des Atenei Romani, c’est-à-dire de la Grégorienne, mais aussi, et surtout !, consultore dans de nombreux dicastères (doctrine de la foi, culte divin, évêques, clergé, vie consacrée, Signatura) ou conseils pontificaux (laïcs, textes législatifs).
Si cette liste se confirme, et à l’exception de Mgr Chaput qui n’a aucune appartenance organique à la Curie alors que c’est un
prélat de tout premier plan aux États-Unis, on peut dire que les trois autres “sélectionnés” sont plutôt de la tendance qui voudrait voir disparaître à tout jamais les Légionnaires, cette force
conservatrice considérable.
Le pape Benoît XVI lui est bien décidé – tout comme l’était déjà le cardinal
Ratzinger – à aller jusqu’au bout de cette affaire qu’il connaît bien comme il connaît la plupart de ses protagonistes à la Curie, pour sauver ce qui peut l’être. La question est de savoir si
c’est sa position qui prévaudra.
(À
suivre)