Après avoir montré hier « l’inanité sonore » des
accusations de l’Associated Press contre les négligences alléguées du cardinal Ratzinger dans l’affaire du prêtre pédomane Michael Teta, j’en
viens à une autre “affaire” soulevée par cette même agence de presse américaine et qui vise, grande première !, le cardinal William Levada, le successeur du cardinal
Ratzinger à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi.
*
Seconde partie : l’“affaire” Levada
Le cardinal Levada fut à la tête de l’archevêché de Portland en Oregon du 1er juillet 1986 au 17 août
1995. En sa capacité d’ordinaire, Levada eut à suivre le cas d’un prêtre diocésain, le P. Joseph Baccellieri, né en 1940, sur lequel pesaient plus que des
soupçons d’abus sexuels sur des adolescents – encore une fois, où est la “pédophilie” là-dedans – de sexe masculin, remontant aux années 1970. Ces méfaits furent connus de l’archidiocèse en 1992
à l’occasion d’une démarche de l’avocat de plusieurs victimes – je pense, sans en être sûr, qu’il y a du avoir une transaction financière, en tout cas il n’y eut pas de procès à ma connaissance
car les crimes devaient alors prescrits pour la loi américaine.
L’archevêque Levada prit immédiatement les mesures qui s’imposaient : le prêtre fut relevé de tout
ministère, mis en congé maladie pour subir une thérapie de deux ans. En février 1994, les psychiatres suivant le prêtre l’estimèrent guéri et suggérèrent son « retour graduel à un ministère
plein et actif », ce que fit l’archidiocèse avec néanmoins des restrictions sévères : le prêtre devait poursuivre une thérapie, les psychiatres étaient tenus d’informer régulièrement
l’archidiocèse de l’évolution de cette thérapie, l’archidiocèse maintenait une étroite surveillance sur ce prêtre, limitation du ministère du prêtre – pas d’activités prolongées avec des
adolescents notamment –, résidence du prêtre hors des bâtiments paroissiaux ou, si la chose n’était pas possible, résidence en paroisse mais sous surveillance de ses confrères. De 1994 jusqu’à sa
retraite en 2002, ce prêtre ne commit plus aucune agression sexuelle mais manifesta un ministère exemplaire et fructueux.
Toutefois, en 2003, l’archevêché de Portland en Oregon, alors sous l’épiscopat de Mgr John Vlazny, fut
traîné devant les tribunaux par les avocats de victimes (une soixantaine de plaignants) de Baccellieri et d’autres prêtres, pour des abus sexuels remontant aux années 1970
et antérieures, ce qui, avec les plaintes déjà déposées entre 2000 – année ou éclate le scandale des prêtres dits “pédophiles” de Boston – et 2003, en portait le nombre à une centaine… Incapable
de faire financièrement face à cette avalanche de plaintes assorties de demandes de compensations financières portant sur ces centaines de millions de dollars, l’archevêque
Vlazny dut se résoudre à placer l’archidiocèse sous la protection de la loi sur les faillites le 6 juillet 2004, le premier d’une série…
Le cardinal Levada dut, le 9 janvier 2006, déposer devant un tribunal de San Francisco sur les cas d’abus sexuels du clergé de l’archidiocèse de Portland dans le contexte de sa
mise en faillite.
La déposition de Levada a ce procès a été rendue publique par l’un des avocats des victimes alléguées vendredi dernier, “révélation” que l’Associated Press s’est
empressée de publier dans un article, également daté du 3 avril, sous le titre : « Déposition : Levada défend sa position sur le prêtre de l’Oregon », ce prêtre n’étant autre que
Baccellieri. L’article est tout entier sous-tendu par l’idée que Levada aurait commis une grave imprudence en réassignant ce prêtre à un ministère et donc, si je
comprend bien l’anglais, à protéger un prêtre pédomane. En fait, il s’agit d’une petite vengeance de l’une des avocates d’une victime de Baccellieri, mécontente que
Levada ait pris la défense du Saint Siège dans l’affaire du prêtre pédomane Murphy du Wisconsin (voir ici et là).
Ce qui est confondant, c’est ce petit paragraphe de l’article de l’Associated Press
:
-
« Levada a fait paraître une déclaration sur le web du Vatican disant que le pape Benoît
XVI ne saurait être tenu pour responsable d’une décision de l’église [sic] de ne pas défroquer le prêtre du Wisconsin. »
Voilà comment l’Associated Press pratique le journalisme, comment une “information” qui n’en est pas
vraiment une (le dossier Baccellieri – 50 pages de documents que j’ai lus – est disponible depuis le 29 juillet 2009 sur le site de l’archidiocèse de Portland en Oregon), mais
qui a pour but de jeter aux chiens Levada – et à travers lui son “patron” : le Saint Père… –, a fait le tour du monde entretenant partout une suspicion
inappropriée sur l’Église.
Archevêque de Portland en Oregon, Levada a estimé, sur la foi des médecins psychiatres, qu’il n’était
pas imprudent de rendre graduellement et sous étroite surveillance un ministère à un prêtre qui avait commis de graves méfaits dans les années 1970. L’attitude de ce prêtre de 1994 à 2002 a
confirmé que ce n’était pas imprudent de sa part. Et à supposer que ce le fût, c’est aux psychiatres qu’il eut fallu demander des comptes
Conclusion
Je dois conclure sur une note un peu plus “française”, mais tout aussi écœurante.
Dans une dépêche encore datée du samedi 3 avril et signée « cb/v130/mw », le fil français de l’Associated Press en remet une couche sous le titre « L’ex-archevêque de
Portand justifie la réaffectation d’un prêtre accusé de pédophilie » – pédophilie… vous savez désormais ce qu’il faut en penser.
Il s’agirait d’une « traduction » mais « condensée » de la dépêche américaine, comme a eu le front de me le soutenir une péronnelle de cette agence, que j’ai contactée samedi
après-midi pour lui dire ce que je pensais de cette dépêche. C’est un mensonge car la dernière phrase du dernier paragraphe de cette dépêche ne figure dans aucune des deux dépêches de la maison
mère américaine…
Voici le texte de ce paragraphe :
-
« Le Saint-Siège a notamment décidé dans les années 1990 de ne pas défroquer un prêtre du Wisconsin
accusé d’avoir abusé d’au moins 200 enfants sourds. Dans un communiqué, Mgr Levada estime que le pape Benoît XVI n’a pas à être tenu pour responsable de cette
décision. Pourtant, le cardinal Ratzinger était à l’époque préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. AP. »
Passe pour le « Mgr » incongru : les cardinaux de la Sainte Église n’ont pas ce prédicat. Mais la
journaliste de l’AP qui se prétend « catholique » est une ilote, raison suffisante pour pérorer sur le catholicisme.
L’article étant entièrement consacré à l’affaire de Portland, on ne voit pas trop bien ce que les déclarations du cardinal Levada sur l’affaire du Wisconsin viennent faire ici…
Rien. C’est un amalgame.
Le Saint-Siège n’a évidemment pas « décidé dans les années 1990 de ne pas défroquer » ce prêtre indigne (voir la première partie). Celui qui a écrit ces lignes ne sait
objectivement rien de l’affaire, ce qui ne l’empêche pas de pondre sa petite crotte.
La dernière phrase est une infamie puisqu’elle tente d’impliquer la responsabilité du cardinal Ratzinger : « Pourtant… ». La journaliste que j’ai eu au bout du fil, et à
qui je faisais remarquer l’incongruité logique et la malhonnêteté d’impliquer le cardinal Ratzinger dans cette affaire, a eu le front de me dire que c’étaient là des «
chicaneries » et que je luis faisais « perdre son temps ». Je vous laisse apprécier si c’en sont ou non, et si mon temps a été perdu ou non.
Voilà, vous avez désormais les pièces principales de ces affaires. Et vous êtes à peu près les seuls à en disposer. Nos concitoyens qui le lisent pas ce blogue mais la große presse qui
recopie les dépêches de l’Associated Press, seront au mieux perplexes au pis scandalisés par ces “révélations”.
Si quelque chose méritait que ce blogue existât, je crois que cet article rapidement écrit et celui qui le précède le justifieraient !
Vous pouvez contacter l’Associated Press :
162, rue du Faubourg Saint Honoré
75008 Paris
Service français :
01.43.59.12.00
Fax : 01.40.74.00.45
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