Le service de presse du Vatican annonçait dans son bulletin VIS du 10 octobre dernier, que le Saint Père avait ce même jour nommé le professeur américain Francis S.
Collins, « membre ordinaire » (on en compte 80 au total, nommés à vie) de l’Académie pontificale des sciences.
Fondée par Pie XI en 1847 (pour faire suite à l’Académie des Lynx ouverte par Federico Cesi à Rome en 1603, mais qui ne survécut pas à la mort de son inventeur), elle
s’intéresse à la recherche scientifique fondamentale mais aussi aux questions d’éthique liées à cette recherche. Les membres sont nommés indépendamment de « toute considération de race ou de
religion », et même – comme on le verra – indépendamment de toute éthique scientifique chrétienne.
Il est indiscutable que le professeur Francis S. Collins, 59 ans, est un généticien de premier plan et jouit d’une très grande notoriété dans la communauté scientifique américaine et
internationale. Ses découvertes, comme directeur du Human Genome Project (projet de description du génome humain), l’ont évidemment propulsé sur le devant de la scène scientifique
mondiale. Barack Obama l’a nommé directeur aux très influents National Institutes of Health (NIH), composés de 27 instituts, employant 18 000 personnes et qui dispose d’un
budget de recherche de 30,5 milliards de $ par an. C’est l’agence gouvernementale qui s’occupe de toutes les questions liées à la recherche sur la santé – en gros, mais en beaucoup plus gros,
l’équivalent le l’INSERM français. Cette nomination présidentielle fut ratifiée à l’unanimité par le Sénat et annoncée officiellement par Kathleen Sebelius, ministre de la Santé
“catholique” et pro-avortement du gouvernement américain et tutelle des NIH, le 7 août dernier. C’est cela qui m’a mis la puce à l’oreille.
Je n’entrerai pas ici sur le débat dont il est l’objet aux États-Unis quant à sa foi religieuse. Athée, Collins s’est converti récemment au christianisme évangélique – c’est un «
Reborn Christian » – et estime possible d’être scientifique et croyant, en l’espèce chrétien. Il ne croit toutefois ni au créationnisme ni au « dessein intelligent », mais on pourrait, sans
l’offenser, le qualifier d’évolutionniste déiste. Une position chrétiennement impossible à tenir, mais là n’est pas notre affaire. Une autre l’est, voyons là dans tous ses détails…
Par décret présidentiel signé le 9 mars – en présence de Collins
(photo : Collins est au milieu de l’image et au dessus de l’épaule gauche
d’Obama) –, Barack Obama assouplissait les restrictions drastiques mises par son prédécesseur, George W. Bush, à l’utilisation des cellules souches embryonnaires,
en autorisait une plus large utilisation par prélèvement sur des embryons obtenus par fertilisation in vitro, et ouvrait la voie au financement fédéral de cette utilisation.
Le 21 septembre, Collins annonçait que son agence accepterait désormais les demandes de lignées de cellules souches embryonnaires aux fins de recherches (pour des laboratoires publics ou
privés) dont l’utilisation sera agréée par les NIH (financées sur fonds fédéraux). Une exigence “scientifique” demandée aux pouvoirs publics dans les nouvelles Directives des
NIH du 7 juillet dernier. Il annonçait également le 21 septembre la constitution d’un Groupe de Travail de validation des sélections de cellules souches embryonnaires humaines (Working
Group for Human Embryonic Stem Cell Eligibility Review) destinées à la recherche publique ou privée. Comme l’a indiqué le président de ce Groupe de Travail, nommé par Collins, Jeffrey
R. Botkin, expert en éthique médicale de l’Université de l’Utah, « Ces lignées de cellules souches sont créées en prélevant des cellules dans l’amas cellulaire d’embryons aux premiers
stades de leur développement. Ce processus d’extraction de cellules dans l’amas cellulaire détruit l’embryon ». Il s’agit pour l’heure, évidemment, d’embryons humains congelés, ceux qu’on
nomme les « surnuméraires » issus notamment de fécondations in vitro et dont n’a pas “besoin” pour l’implantation in utero.Voilà qui a le mérite d’être clair.
On n’évoquera qu’en passant le fait que Collins n’a aucune objection “éthique” quant au clonage d’embryons humains aux fins de recherche, car, selon lui, l’embryon cloné n’a pas le même
statut moral que l’embryon issu de la fécondation d’un ovule par un spermatozoïde…
Ai-je vraiment tort d’estimer que ce scientifique nommé à la prestigieuse Académie pontificale des sciences n’incarne pas vraiment une éthique scientifique chrétienne, et ce type de
scientifiques a-t-il vraiment sa place dans une Académie… pontificale même ouverte à la “diversité” ?
Qu’en pensez-vous ?