nécessaires par les fatigues accumulées (et pas seulement du fait de ce blogue…). Je vous propose donc une petite “série estivale” qui sera consacrée à des prêtres français missionnaires aux
États-Unis au XIXe siècle. C’est un sujet que j’ai beaucoup travaillé, mais c’est une tâche rendue très difficile par le très grand nombre de prêtres, de religieux et de religieuses
français, des centaines et des centaines, partis de chez eux, c’est-à-dire de chez nous, pour aller aider là-bas à édifier le catholicisme. Le livre que je caresse de leur consacrer depuis des
années risque bien de ne jamais paraître en raison de l’énormité du travail qu’il requiert. Mais j’ai déjà rédigé de nombreuses notices. Autant vous en faire profiter ! Dans cette série, je me
limiterai aux prêtres du XIXe siècle et aux personnalités les moins connues. Je vous souhaite une pieuse découverte de ces prêtres français aux États-Unis.
Le Père Eugène Chirouse, OMI (1821-1892) : l’apôtre des Indiens du Nord-Ouest
Né en France en 1821, mais l’on ne sait pas où exactement (peut-être en Ardèche d’où le patronyme est issu, ou dans la Creuse ou encore dans la Drôme où il est
fréquent). Encore séminariste en 1847, chez les Oblats de Marie Immaculée (OMI), il est certain qu’Eugène Chirouse (photo ci-dessous) fait partie du groupe de cinq
oblats partis de Marseille le 22 janvier 1847 pour les États-Unis. Nous le retrouvons, cette année-là (en avril ou en mai), en compagnie de ses confrères à St. Louis (Missouri) aux côtés de Mgr
Augustin Magloire Blanchet, évêque de Walla Walla en Orégon avec lequel ils font route pour son siège diocésain. C’est dans l’unique pièce de l’évêché de Walla Walla (qui servait à Mgr
Blanchet de chapelle, de salle de réunion, de salle à manger et de chambre…), qu’il est ordonné prêtre le 2 janvier 1848, par l’évêque, en même temps que son confrère et compatriote
Charles-Marie Pandosy. Ce sont les deux premières ordinations sacerdotales de ce qui allait devenir l’État de Washington. Comme le dénuement était complet, on raconte que, faute d’aube,
Eugène Chirouse enfila une chemise de nuit empruntée par-dessus sa soutane pour la cérémonie… L’ordination se déroula peu de temps après le « Whitman Massacre », du 29 novembre
1847. Lors de cette tragédie, le Dr Marcus Whitman et douze des soixante-douze membres de la colonie-mission méthodiste de Waiilatpu, à une trentaine de kilomètres à l’est de Walla Walla,
furent massacrés par les Indiens Cayouses dont la moitié de la tribu avait été exterminée par une épidémie que les Peaux Rouges croyaient avoir été déclanchée par les Blancs – lesquels, en bons
Méthodistes, ont cru que c’était les Oblats qui excitèrent les Indiens… Le Père Chirouse consacrera 45 années de son existence à la mission auprès des Indiens du Nord-Ouest des États-Unis
comme du Canada). En 1847, Owhi (1821-1906), chef des Indiens Yakimas, demande qu’on lui envoie des missionnaires. Les Pères Oblats Georges Blanchet (fils de Canadiens français) et
Célestin Verney commencent de sitôt une construction dans la Vallée des Kittitas, qui sera achevée en janvier de l’année suivante avec l’aide des Pères Chirouse et Pandosy :
ce sera l’Immaculate Conception Mission (la Mission de l’Immaculée Conception). En 1853, avec le Père Ricard, Chirouse fonde la mission St. Rose of the Cayuse (Sainte
Rose du Cayouse), mais qui ne durera que jusqu’en 1855 car elle sera brûlée lors des soulèvements indiens de cette année-là (la « Cayuse War »). Dans le cimetière attenant à cette
mission, on compte dix-neuf inhumés (le dernier enregistré le 11 décembre 1855) : ce sont tous des Indiens, et ils ont tous été convertis au catholicisme. En 1857, il fonde une autre mission pour
les Indiens Tulalip : le pommier qu’il y planta donne encore aujourd’hui du fruit… Cette mission sera abandonnée en 1860 et remplacée par cette de Priests’ Point près de Marysville. Le
Père Chirouse est l’auteur d’une grammaire, d’un dictionnaire et d’un catéchisme en langue snohomish. « The Good Old Father » (le bon vieux Père) comme le surnommait ses chers
Indiens devint leur « agent » officiel par décision du gouvernement des États-Unis. Jamais à court d’idées, le Père Chirouse était capable de fabriquer un superbe encensoir avec une boîte
de fer blanc, ou de se confectionner une soutane à partir de n’importe quelle pièce de drap blanc qu’il teignait en noir avec du jus de mûres… Son décès survint en1892.