Les nouveaux auxiliaires de Malines (5)

Le problème est que les “Belges de Rome” proviennent de toute façon de cette Belgique paupérisée et qu’ils en gardent souvent l’esprit et le réseau de relations. Cette “solution” fait donc l’impression d’une dernière cartouche en désespoir de cause. Résultat, rien ne change et le malade belge glisse dans un coma de plus en plus profond.
Une note prospective: le prochain “Belge de Rome” qui pourrait être parachuté dans son pays natal est l’abbé Gabriel Quicke, protégé de Mgr Bonny au Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens. Il suivrait ainsi la voie de son maître.
Un point à l’avantage de Mgr Lemmens: au contraire de ses confrères Van Looy et Bonny, il sait ce que signifie diriger un diocèse – et un diocèse belge – puisqu’il a été vicaire général de celui de Hasselt (1998-2004). Quant à son orientation, on ne saurait mieux s’exprimer que Dominique Minten l’avait fait dans le Standaard, dès décembre 2007:

“Lemmens et Hoet sont deux personnages modérés. Ils sont clairement ouverts au dialogue interreligieux mais on ne peut pas non plus dire qu’ils soient franchement progressistes”.

C’est une splendide description du sport préféré des Belges: la modération de principe. Que Mgr Lemmens soit féru de dialogue interreligieux est une évidence, puisqu’il est membre de la communauté Sant’Egidio. Comme le port d’attache de cette communauté à Rome est la basilique Sainte-Marie du Transtévère et que le type d’initiatives qui y sont promues sont bien connues, on ne peut probablement pas attendre de Mgr Lemmens une grande fermeté doctrinale. Toutefois, comme le disait Dominique Minten dans ce balancement bien belge, on ne peut pas dire que Mgr Lemmens soit franchement progressiste: “le seul fait [qu’il porte] régulièrement le col romain en dit long”. A mon avis, c’est plutôt cette réflexion hilarante qui en dit long sur l’état de la Belgique (post)catholique.
De fait, sur les photos prises à la conférence de presse mardi dernier, on voit que les abbés Hudsyn et Kockerols sont en civil et que Mgr Lemmens est le seul des nouveaux évêques à porter un clergyman.
Je tiens toutefois à rassurer soit les progressistes effrayés par ce signe d’intégrisme, soit les optimistes-de-principe qui verraient là un signe de mâle reprise en main: le cardinal Danneels et Mgr De Kesel aussi portaient régulièrement le clergyman. Rassurez-vous, bonnes gens, rien ne changera.
D’autant que Mgr Lemmens sera chargé du vicariat du Brabant flamand et de Malines, c’est-à-dire d’une région située sous le seuil de pauvreté spirituelle. Le week-end dernier, le plus grand quotidien belge, le Standaard, publiait un sondage réalisé parmi des prêtres de ce vicariat et probablement destiné à entraver l’archevêque au moment où il allait recevoir ses auxiliaires: on y apprend comme par hasard que plus de 69% des curés de cette région sont en désaccord avec Mgr Léonard sur le fond. Toutefois, il s’agit largement d’une baudruche gonflée de secrets de Polichinelle. Qui sera surpris de lire que plus des deux tiers (68,7%) des curés du Brabant flamand n’ont plus la foi catholique, puisqu’ils pensent que le sacerdoce devrait être ouvert aux femmes? On imagine mal Mgr Lemmens redresser la barre. Spécialiste du dialogue interreligieux, il pourrait appliquer ses méthodes de dialogue en interne, dans le cadre d’un “consensus différencié”. Les curés du vicariat du Brabant flamand pourraient alors dire, comme le musulman Abbas Arroua (“Horroris causa”, Ed. Inst. Hoggar, Genève 2000, p. 150) :

“Après quelques échanges d’idées avec le Père Léon Lemmens j’ai senti que, si nos chemins vers la vérité n’étaient pas identiques, ils conduisaient vers la même quête.”

(à suivre)