Toujours dans le même entretien, voici une autre source de perplexité:
“Les rencontres précédentes [d’Assise] ont affirmé qu’on ne peut en aucun cas utiliser la violence au nom de Dieu. Tous les croyants doivent dire ensemble que Dieu est fondamentalement un Dieu de paix et d’amour. La liberté religieuse est ainsi considérée comme un fondement de la paix. Les croyants ont une mission commune : annoncer le respect de la personne en tant que créature de Dieu et la fraternité entre les hommes, issus du même Père.”
Je passe sur le fait qu’il ne soit pas évident que notre mission de croyant soit d’annoncer le respect de la personne. Plus exactement, ce respect de la personne est le corollaire d’une autre annonce, plus spécifiquement typique de notre “mission de croyant”, l’annonce de la Rédemption en Jésus-Christ.
Mais je note surtout que l’on mélange tout désormais. Dans les textes de Vatican II, il est clair que la liberté religieuse a à vopir avec la coercition étatique (la question étant de savoir si l’Etat peut, doit, ou a interdiction de, mettre sa force temporelle au service de la vérité religieuse). Maintenant, on fait de la liberté religieuse une sorte d’annexe du dialogue interreligieux. Ce n’est certainement pas le moyen de faciliter la compréhension des textes les plus difficiles du concile!
Il me semble évident qu’il y a un changement de perspective, du point de vue de la liberté religieuse, entre les XIXème et XXème siècles. Pour des raisons historiquement compréhensibles, les pontifes romains du XIXème siècle (Grégoire XVI et Pie IX surtout) se sont méfiés des “valeurs” prônées par la Révolution française : dans l’encyclique “Mirari vos”, le pape Grégoire XVI traitait de “deliramentum” la liberté de conscience,
et le Syllabus de Pie IX est pratiquement illisible par un citoyen de l’Union Européenne, quel que soit son pays, aujourd’hui : tout ce qui nous semble aller de soi dans la société contemporaine, jusqu’au “progrès” (dernier article) y est condamné comme contraire à la foi catholique!
Et il me semble que c’est avec le pape Jean XXIII, et notamment l’encyclique “Pacem in terris” que le changement qui s’était amorcé dans les attitudes et les options diplomatiques a été avalisé officiellement, comme d’ailleurs dans les principaux textes du Concile Vatican II, en particulier la Constitution pastorale “Gaudium et spes” et le Décret “Dignitatis humanae”.
Cela signifie que l’ “intransigeantisme” quelquefois prôné comme seule attitude catholique (dans le passé et, de façon récurrente, dans le présent) n’a pas sa place dans la réflexion doctrinale et pastorale de l’Eglise à propos de ses rapports avec les Etats.
Cela signifie aussi que, selon les époques, le Magistère de l’Eglise catholique, tout en demeurant ferme sur certains principes, peut revenir sur des points de vue circonstantiels – ceci est tout à sa gloire, d’ailleurs : en ce domaine comme en beaucoup d’autres, le fixisme prétendument doctrinal est seulement mortifère.
Mr Lobet, on finit par se lasser de la sempiternelle ritournelle du fameux “aggiornamento” de Vatican II…
Effectivement c’est bien de RUPTURE qu’il s’agit dans le texte sur la liberté religieuse avec l’enseignement traditionnel des 20 conciles précédents et cela la Ste Eglise Catholique ne l’admettra jamais.
On constate malheureusement ce qui est le résultat mortifère de cette rupture qui elle a bien montré l’effondrement qui ena résulté dans les vocations sacedotales et dans toute l’Eglise catholique…
Et d’où tenez-vous qu’il y ait un lien entre le Concile Vatican II et la baisse de la présencence institutionnelle de l’Eglise catholique en Europe du Nord?
On pourrait même arguer, au contraire, que, si le Concile Vatican II n’avait pas été tenu, l’effondrement de la présence de l’Eglise catholique serait encore bien plus sensible – telle est en tous les cas mon opinion.