La tendance se précise et se confirme : aux Pays-Bas comme en Belgique, les médias accordent une place croissante au thème de l’euthanasie pour les déments, ou l’euthanasie pour les personnes âgées bien portantes qui sont tout simplement « fatiguées de vivre ». La revue Knack, poursuivant une série d’articles sur la pratique de l’euthanasie en Belgique flamande assure aujourd’hui que de plus en plus de Belges néerlandophones disent aujourd’hui sans détours qu’ils ont envie de mourir, soit qu’ils souffrent d’une maladie dégénérative, soit qu’ils se jugent trop dépendants ou simplement au bout de leur vie.
Il s’agirait donc, en clair, de demandes de gestes mortels adressés à des médecins par des personnes bien portantes compte tenu de leur âge, qui ne souffrent pas de manière insupportable, qui ne paraissent même pas malheureuses. Selon la revue, certaines personnes parviennent déjà à se faire euthanasier pour éviter qu’une démence ultérieure qui, tout en les laissant conscients, les priverait d’exprimer valablement une demande d’euthanasie, puisque le testament de fin de vie ne permet de pratiquer une euthanasie demandée par avance dans un « testament de fin de vie » que lorsque le demandeur devient inconscient. Ces patients impatients se font « piquer » un peu trop tôt, de manière à éviter que leur capacité d’exprimer leur propre volonté ne disparaisse avant qu’ils aient eu le temps de formuler leur demande au moment théoriquement plus opportun.
Pour Wim Distelmans, spécialiste des soins palliatifs, on en arrive à des cas où « des personnes s’arrangent avec leur neurologue pour qu’il les avertisse que l’heure est venue de demander l’euthanasie ». Car après, cela devient plus difficile : insensiblement, la personne âgée glisse dans la démence et dans l’oubli et les médecins semblent répugner alors à administrer un poison mortel à celui qui ne souffre visiblement pas, ni physiquement, ni moralement.
Mais selon la revue, quelques médecins seraient d’ores et déjà prêts à administrer l’euthanasie à des personnes en voie de devenir démentes, d’après Marc Cosyns, médecin généraliste spécialisé dans l’accompagnement des mourants. Ce n’est pas sans risque puisque de tels gestes demeurent punis par la loi (d’où la question du changement de la loi, que l’on évoque aussi !) mais d’un autre côté, le pas a déjà été franchi en pratique dans les Pays-Bas voisins 12 euthanasies sur des personnes en voie de devenir démentes ont été considérées comme ne posant aucun problème de ce fait en 2009 (info donnée sur ce blog l’an dernier).
Knack attribue au « grisonnement » de la population l’apparition d’un groupe de personnes vieillissantes qui, demain, demanderont l’euthanasie parce qu’ils ont perdu leur « partenaire », parce qu’ils n’ont plus de perspective d’avenir ou souffrent de petits maux de la vieillesse sans être gravement malades et encore moins en phase terminale.
Bien que la Belgique soit dotée d’une loi d’euthanasie plus souple que les Pays-Bas, il semblerait que cette pression-là ne « prenne » pas, du moins pour le moment. Mais une échappatoire existe, puisque l’assistance au suicide n’est pas pénalement poursuivable en Belgique et que donc, en théorie, le « vieux » qui en aurait assez de vivre pourrait demander au premier voisin venu de l’aider à mourir. Au point qu’un professeur de droit médical, Herman Neys, est d’avis qu’il faut d’urgence repénaliser l’assistance au suicide.