L’actuel conflit politique en Côte d’Ivoire ne pouvait évidemment pas laisser indifférents les évêques du pays. Leur attitude, relatée par l’agence de presse Zenit, me semble extrêmement intéressante:
Tout d’abord, ils ont eux-mêmes tentés une médiation rencontrant «nos frères Laurent Gbagbo et Alassane Dramane Ouattara» et les engageant à trouver
« un règlement pacifique du différend afin de ne pas mettre en danger la vie des populations. Qu’ils acceptent de se retrouver pour dialoguer malgré les rancœurs. Cela serait un acte de courage, d’humilité et d’amour pour notre pays ».
On voit ici que le discours épiscopal est inséparablement moral et politique. Sur le plan politique, ils ne prétendent pas régler le différend électoral, mais leur autorité morale leur fait tenir un discours clairement politique. Nouvelle occasion de constater que la laïcité, fût-elle positive, qui prétend reléguer la religion dans la sphère privée est un non-sens.
Parallèlement, les évêques ivoiriens en appellent à une intervention de l’ONU, mais n’importe comment:
« Qu’elle fasse usage des moyens pacifiques de règlement du différend en vue d’apporter sa contribution à la résolution de la crise et s’en tienne strictement au maintien de la paix. Nous lui demandons avec insistance de respecter la souveraineté de notre pays. »
Naturellement, il y a, dans cette affaire, beaucoup de questions oplus graves et plus pressantes, à commencer par le sort des populations civiles. Mais il me semble tout à fait remarquable que les évêques de Côte-d’Ivoire, au moment même où ils invitent l’ONU à agir, insistent sur la souveraineté nationale de leur pays.
ROME, Mercredi 5 janvier 2011 (ZENIT.org) – Les Evêques ivoiriens ont lancé un appel à Alassane Ouattara et à Laurent Gbagbo afin qu’ils trouvent une solution pacifique à la crise politique et institutionnelle qui paralyse le pays, rapporte l’Agence missionnaire Fides ce mercredi.
C’est ce qu’affirme un message envoyé à Fides dans lequel la Conférence épiscopale de Côte-d’Ivoire fait état de son opposition à l’hypothèse d’une intervention militaire dans le pays de la part de l’ONU ou de la Communauté économique des Etats d’Afrique occidentale (CEDEAO).
Après avoir dénoncé la « situation malheureuse d’un pays coupé en deux avec « deux chefs d’Etat et deux gouvernements » », les Evêques rappellent avoir « choisi la voie de la médiation » rencontrant « nos frères Laurent GBAGBO et Alassane Dramane OUATTARA » et les médiateurs envoyés par la CEDEAO (les Présidents du Bénin, de Sierra Leone et du Cap Vert auxquels est venu s’ajouter le Premier Ministre kenyan, Raila Odinga, en qualité de représentant de l’Union africaine).
Le message demande à Gbagbo et à Ouattara de s’engager à trouver « un règlement pacifique du différend afin de ne pas mettre en danger la vie des populations. Qu’ils acceptent de se retrouver pour dialoguer malgré les rancœurs. Cela serait un acte de courage, d’humilité et d’amour pour notre pays ».
Les Evêques demandent en outre aux deux principaux acteurs de la crise d’inviter « fermement leurs militants au calme et à la retenue ».
Les Evêques invitent l’ONU à agir conformément « aux principes fondamentaux qui la régissent et qui sont respectueux des droits de l’homme. Qu’elle fasse usage des moyens pacifiques de règlement du différend en vue d’apporter sa contribution à la résolution de la crise et s’en tienne strictement au maintien de la paix. Nous lui demandons avec insistance de respecter la souveraineté de notre pays ».
Le message adresse en outre un appel à « nos frères les Africains de l’UA et de la CEDEAO afin qu’ils se rappellent du principe de solidarité africaine qui veut que quand la case du voisin brûle on l’aide à éteindre l’incendie. Aussi voudrions-nous attirer leur attention sur les conséquences incalculables d’une intervention militaire pour le pays et la sub-région ouest africaine. Nous disons non à une telle intervention ».
Les Evêques réfutent enfin toute interprétation de conflit à caractère religieux : « en Côte d’Ivoire il n’y a pas un Nord musulman qui serait opposé à un Sud chrétien. Dans la même famille cohabitent parfois des musulmans et des chrétiens ».
Auriez-vous voulu dire : “mais pas n’importe comment” plutôt que “mais n’importe comment” ?