L’ami Phil Lawler n’y va pas avec le dos de la cuillère dans sa dernière chronique de CatholicCulture du 22 novembre. Son titre est sans ambigüité et sa conclusion franche : « On devrait demander à Giovanni Maria Vian, le directeur de L’Osservatore Romano, de présenter sa démission ». Quelques extraits de sa chronique.
- « Le pape Benoît XVI n’a en rien changé les enseignements de l’Église, ni même laissé entendre qu’ils pourraient être sujet à changement. Le Saint Père n’a pas demandé un nouveau débat sur la moralité de la contraception. Il n’a aucunement suggéré que l’utilisation du préservatif puisse être parfois moralement justifiable.
- Pourtant aujourd’hui des millions de gens sur toute la terre croient que le Souverain Pontife a changé l’enseignement de l’Église, a ouvert le débat sur la question de la contraception, et a justifié l’utilisation du préservatif dans certaines circonstances. Comment en est-on arrivé là ?
- Une fois de plus, le pape Benoît XVI a été desservi par son équipe de relations publiques. Et dans cette affaire, le quotidien du Vatican L’Osservatore Romano est principalement à blâmer pour cette gaffe véritablement désastreuse (…).
- Ceux d’entre nous qui ont reçu à l’avance un exemplaire de Lumière du monde, ont été informés que ce texte était placé sous un strict embargo. Il nous était interdit d’en donner des citations, de le mentionner, et même d’évoquer quelque révélation que ce soit sur son contenu avant le lancement formel du livre [hier, mardi]. Des embargos de cette sorte ne sont pas inhabituels dans la profession (…) et les journalistes professionnels les respectent régulièrement.
- Et voilà que, d’une manière incroyable, le propre quotidien du Vatican viole cet embargo. Trahissant les éditeurs et rompant le confiance avec tous les autres journalistes qui ont respecté leur engagement. L’Osservatore Romano a reproduit un passage de l’entrentien du pape. Et pas n’importe quel passage. Le quotidien du Vatican a reproduit – sans explication ni commentaire – le passage dans lequel Benoît XVI réfléchit sur la possibilité que, dans certains cas extrême, la pulsion à utiliser un préservatif pourrait indiquer le vacillement du désintéressement dans une conscience gravement corrompue. (…)
- Dans ce contexte d’une longue conversation avec un interviewer sympathique, il est aisé de constater que le pape a pu être tenté par des remarques d’ordre spéculatif. Mais pendant les semaines entre l’entretien et la date de sortie du livre, est-ce que personne au Vatican n’a pris conscience de la probabilité que ces paroles du pape pourraient être tirées hors de contexte ? Est-ce qu’aucun responsable du Vatican n’a examiné avec attention le texte de cet entretien, afin de s’assurer que les réponses du pape à Seewald ne pourraient pas être sujet à confusion et/ou à de mauvaises interprétations ? Si ce n’est pas le cas, alors ce pontificat est victime d’un coup qu’il s’est à lui-même infligé. Assurément, tout journaliste compétent aurait identifié le trouble potentiel à la seule lecture des propos du pape. Quiconque est conscient de la manière dont fonctionne le débat public, aurait été capable de mettre en garde le pape que cette subtile distinction sur la moralité de l’utilisation du préservatif serait enfouie profondément par les médias séculiers (…).
- Et pourtant ce sont les propres journalistes du Vatican, ceux de L’Osservatore Romano, qui ont imprimé les mots du pape sans aucune présentation convenable, sans aucun effort pour replacer les propos du pontife dans leur contexte. La déclaration du pape ne pouvait pas manquer de provoquer du trouble. Sa publication prématurée par le quotidien du Vatican n’a fait qu’exacerber le problème.
- Ces mois passé, L’Osservatore Romano a souvent placé le Vatican dans l’embarras, avec ses articles puérils sur les mérites de Michael Jackson, des Beatles et des Simpsons. Mais cette bourde rédactionnelle est beaucoup plus sérieuse. Avec cette énorme mauvaise utilisation d’une question très grave, le quotidien du Vatican a provoqué une confusion mondiale sur cette très importante question morale : il faudra des années d’efforts pénibles pour remédier à ce dommage. (…)
- Pourquoi L’Osservatore Romano a-t-il violé les normes journalistiques, ignoré les dangers évidents, et imprimé un propos potentiellement explosif hors de son propre contexte ? Le rédacteur en chef espérait-il provoquer du grabuge et pousser les ventes de Lumière du Monde au mépris du coût pastoral de ce grabuge ? Espérait-il provoquer un nouveau débat sur l’utilisation du préservatif, débat que le pape de toute évidence ne recherchait pas ? Ou est-ce que le rédacteur en chef était inconscient du danger de publier un tel extrait ? Quelle que soit la réponse, il a fait la démonstration que son jugement rédactionnel n’était pas fiable. Comme premier pas nécessaire pour régler l’incessante incompétence des relations publiques du Vatican, on devrait demander à Giovanni Marie Vian, le directeur de L’Osservatore Romano, de donner sa démission. »
Je partage entièrement cette analyse de mon confrère. Trop c’est trop. Cette bande d’incompétents prétentieux a fait trop de mal à l’Église. Dehors ! Ce serait un véritable acte de charité de la part du Saint Père que de remplacer cette équipe. Je dis bien équipe, car il ne s’agit pas que de Giovanni Marie Vian, grand professeur de patristique sans doute, mais nullité journalistique et véritable danger public. Qu’en pensez-vous amis lecteurs ? Ne serait-il pas temps d’une respectueuse supplique pour qu’on en finisse avec cette équipe de pieds nickelés ?
Que l’on reproche à l’OR d’avoir sorti l “scoop” à contre-temps, c’est une chose, même si j’ai beaucoup de mal à imaginer qu’une telle publication ait pu sortir sans l’accord des plus hautes autorités du Vatican. Si tel était le cas, le directeur devrait être débarqué dans la semaine. Si ce n’est pas le cas, j’aurais tendance à penser que cette publication était voulue et validée…
Que l’on reproche au pape de dire ce qu’il dit est d’une toute autre gravité! Il me semble que la polémique sur ses propos dans l’avion il y a un an l’ont suffisament mis en garde sur les interprétations médiatiques de ses déclarations sur un sujet aussi sensible. Or sur le fond, le propos est assez peu différent (les déclarations dans l’avion étant également bien plus complexes et subtiles que la caricature médiatique qui en a été faite). Alors soit Benoît XVI est stupide et/ou sénile, ce que je ne pense pas, soit il savait exactement ce qu’il disait et les interprétations qui en seraient faites. D’autres passages du livre, sur Humanae vitae notamment (cf. http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/1345667?fr=y) me laissent penser qu’en effet le pape, sans changer le fond du discours de l’Eglise, en modifie quelque peu la forme et y apporte des nuances qui sont une véritable bouffée d’oxygène. Merci à lui!
“Parmi ces extraits (du livre du Pape, coulés par l’OR), l’un fait particulièrement mal, qui semble relativiser l’enseignement d’Humanae Vitae en désignant ceux qui vivent en conformité avec lui comme des « minorités profondément convaincues » fournissant à d’autres « un modèle fascinant à suivre ». Comme si l’encyclique posait un idéal quasi impossible à atteindre, alors qu’il s’agit d’une perspective vitale pour la société humaine et pour l’humanité elle-même. Une perspective et un enseignement que la majorité des évêques avaient déjà mis sous le boisseau, alors comment attendre qu’il fût suivi?” http://leblogdejeannesmits.blogspot.com/2010/11/le-pape-et-le-preservatif.html
Je suis bien plus inquiète des commentaires du Pape sur Humanae Vitae que de cette histoire de condom. Non seulement c’est un espèce de coup de Jarnac pour les couples qui ont appliqué Humanae Vitae dans leur mariage, mais en plus comme certains ceux-ci ont maintenant de grands enfants, comment seront-ils crédibles lorsqu’ils voudront leur transmettre Humanae Vitae?