Nos lecteurs nous signalent une messe, le 1er juin dernier, à Guéméné-Penfao – l’église saint-Pierre et saint Paul dans le bourg, la commune ayant encore deux autres églises à Guénouvry et Beslé sur Vilaine – avec la participation de personnes costumées en sorcières, chapeaux pointus et habits rouges et noirs, qui sont montées au cours de la messes sur l’autel et ont déambulé dans l’église, du parvis au choeur. Les images se sont propagées sur les réseaux sociaux anglo-saxons, avec comme légende « un sabbat de sorcières dans une église bretonne en pleine messe« , et autres titres du même genre.
On trouve aussi un article qui relate cette messe, « des membres de la « Confrérie de la Fée Carabosse », vêtues de costumes évoquant des sorcières, capes noires, collerettes rouges et chapeaux pointus, ont été invitées à participer à la messe. Pire, elles ont occupé les premiers rangs, réservés par une espèce de « grande maîtresse sorcière », surement la Grand-Maitre, comme stipulé sur leur site, […] qui, dès le parvis, distribuait le programme de la messe tout en indiquant aux fidèles où s’asseoir, reléguant les paroissiens au fond de l’église. Cette mise en scène, irrespectueuse envers les fidèles et le lieu saint, a choqué l’assemblée« .
Une tradition locale… mais ces costumes ont-ils leur place à la messe ?
Renseignements pris sur cette messe, il s’agissait du 14e chapitre de la confrérie de Fée Carabosse, où de sympathiques retraitées accompagnées d’une trentaine d’autres confréries de France et de Belgique ont processionné à travers la commune, des menhirs à l’église, des chapelles au vin d’honneur de la mairie, et effectivement il y était annoncé : « A 11 h, une messe d’offrande aura lieu à l’église, avant une photo de groupes et la cérémonie symbolique du semis du lin, au pied de la statue de la Fée Carabosse, aux prairies du Don, à 12 h 15. Un temps de convivalité aura ensuite lieu à la mairie ». La confrérie décrit les événements ainsi : « le défilé se forme et se dirige ensuite vers la massive église du village pour la messe dominicale, animée et chantée. Nous sommes accueillis par le prêtre sur le parvis. Au cours de l’offertoire nous sommes invités à déposer nos offrandes au pied de l’autel. Nous descendons ensuite vers la vallée du Don, car nous avons 2 (personnages) à saluer. D’abord la statue de « Petit Joseph », un habitant célèbre au début du 20ème siècle, qui mesurait 1.3 m et pesait + de 100 kg……Puis nous nous dirigeons vers la « Fée Carabosse », thème de La Confrérie« .
Bien que la confrérie indique personnifier des fées, et avoir ajouté pour cela des voiles aux chapeaux : « au départ nous n’avions pas de voile à nos chapeaux, nous l’avons ajouté car trop souvent on nous prenaient pour des sorcières. (Même encore, malgré tout) », les costumes rouges et noirs, et les chapeaux pointus renvoient dans l’imaginaire collectif au costume des sorcières – notamment dans les pays anglosaxons où les images de la messe se sont répandus. Leur présence dans l’Eglise tient sans doute plus de la coutume locale mal comprise que d’une réelle intention de nuire ou de profaner les lieux.
Cependant, s’il est plutôt bon que les événements locaux et la foi populaire soient soutenus par les paroisses, on peut se demander si les costumes, les chapeaux pointus et surtout la présence des « fées » à l’autel était nécessaire, justifiée et respectueuse, surtout en pleine messe ? Les églises ne sont pas des salles polyvalentes. Elles ne sont pas des salles de spectacle. Ce sont des lieux sacrés, qui doivent être respectés en tous temps et circonstances. Et surtout pendant les messes.
Guéméné-Penfao fait partie du diocèse de Nantes,où un concert visiblement inapproprié dans une église a été empêché par les fidèles à l’Immaculée Conception 2021. Visiblement, à près de 60 km au nord-nord ouest du siège du diocèse, le cadre légal régissant les manifestations laïques ou profanes dans les églises n’est pas connu – le voici.
Une vidéo réalisée clairement avec l’aide de l’IA, avec diverses inexactitudes (Guéméné-Penfao n’est pas au sud du Finistère, mais au nord du diocèse le plus méridional de Bretagne, celui de Nantes) a été mise en ligne sur internet au sujet de cette messe, initulée « messe ou sabbat païen ? Des sorcières dans l’église de Guéméné-Penfao’‘.