Dans la dernière Bulletin de l’ICV (n° 42, octobre 2024), gazette en ligne de l’Institut Croix de Vents, l’abbé Bertrand Lacroix, FSSP, raconte sa mission en Egypte avec SOS Chrétiens d’Orient l’été dernier :
Vous avez participé cet été à une mission auprès de SOS Chrétiens d’Orient en Egypte, combien de temps êtes-vous parti et en quoi a-t-elle consisté ?
Je me suis rendu en Égypte pour un court séjour de deux semaines lors d’une mission qui consistait principalement, mais pas exclusivement, à donner un accompagnement spirituel aux volontaires français présents sur place.
Où se situait votre mission ? Avez-vous voyagé durant votre séjour ?
J’ai passé la plupart de mon séjour au Caire. Mais j’ai prêché une retraite de trois jours au monastère Copte Orthodoxe d’Anafora, qui se trouve dans une oasis en plein désert. J’ai aussi passé 4 jours à Alexandrie où il y a une autre antenne d’SOS Chrétiens d’Orient.
Quel était votre rôle auprès des volontaires et des locaux ?
Certains volontaires se trouvaient là depuis quelques jours, d’autres depuis plusieurs mois. La barrière de la langue et les différences liturgiques peuvent représenter une difficulté pour ces jeunes français sur place. C’est pourquoi 3 fois par an environ l’association envoie des prêtres français auprès d’eux, pour de courts séjours. Mon rôle auprès des volontaires était un rôle d’aumônier : Messe quotidienne, retraite prêchée de 3 jours, confessions, entretiens, soutien moral (j’avais caché trois saucissons dans mes bagages…) J’ai eu la bonne surprise de retrouver parmi les volontaires, Hugues, un ancien élève de la Croix-des-Vents, que j’ai connu lorsqu’il était en Terminale.
Auprès des Égyptiens, mon rôle était celui d’un volontaire à part entière. Ils ont déjà leur clergé, leurs « abbounas », et une liturgie propre qui vient du fond des âges… Donc s’il était bien clair pour tout le monde que j’étais prêtre catholique, on m’appelait d’ailleurs « abbouna Botros », ma mission auprès des autochtones ne différait cependant pas vraiment de celle d’un volontaire laïc d’SOS Chrétiens d’Orient.
Pourriez-vous nous décrire une journée type ?
Difficile, tant les missions d’SOS Chrétiens d’Orient sont variées. Levé tôt, visite d’orphelinats, cours de français et d’anglais dans une école, chants et jeux dans des patronages, parties de cartes en maisons de retraite, Messe pour les volontaires en fin d’après-midi, maraudes nocturnes auprès des sans-abris, rencontres avec le clergé Orthodoxe et Catholique, foot avec les enfants d’un bidonville, distributions de vivres à des réfugiés chrétiens Soudanais, visites de chantiers…
Comment définiriez-vous ou décririez-vous la chrétienté en Egypte ?
Vraiment très édifiante, mais je ne suis peut-être pas resté assez longtemps pour constater les mauvais côtés, s’il y en a – et il y en a certainement. En tout cas, l’athéisme n’existe pas. Les Chrétiens montrent très fièrement leur Foi, comme en témoigne le tatouage qu’ils portent dès l’âge de 5 ans au poignet droit.
Si vous rentrez dans un taxi chrétien, vous le saurez tout de suite, grâce aux chapelets, images saintes, et même la photo du curé de la paroisse…Plus généralement on sent, ou plutôt on constate, que l’Église Copte est très investie dans toutes les bonnes œuvres, hôpitaux, écoles, maisons de retraite, ce qui laisse une impression globale de grand dynamisme. Sans doute un peu comme en France, sous l’ancien régime, et avant l’apparition du concept d’état-providence.
Par ailleurs, les monastères égyptiens, qui sont les plus anciens au monde, puisque la vie monastique est née en Égypte, maintiennent vivace la grande tradition du mode de vie des Pères du désert.
Quelles sont les différences et les points communs entre chrétiens d’orient et d’occident ?
Il y aurait beaucoup de choses à dire, mais j’en retiendrai deux si vous le voulez bien, qui concernent le climat spirituel.
Pour ce qui est du point commun, je dirais une grande piété Mariale.
Les apparitions de la Très Sainte Vierge Marie à Zeitoun à la fin des années 1960, avec des dizaines de milliers de témoins oculaires, y sont pour beaucoup.
Quant à nos différences, j’évoquerais un rapport à l’assistance à la Sainte Messe un peu plus « oriental », avec des vas-et-viens, des postures et des gestuelles différentes selon les fidèles.
Que retenez-vous de vos rencontres et de ce pays ?
De par leur statut de « dhimmis » les Chrétiens d’Égypte sont éprouvés par le fléau de la misère sociale, matérielle, et celui des persécutions violentes et sporadiques, même si elles sont devenues plus rares grâce à l’action du gouvernement actuel. Mais ils ont le moral !
La forme de persécution, latente, sournoise, et subversive que nous connaissons en Occident me semble, sous un certain rapport, beaucoup plus dangereuse pour la Foi.
Je crois que la Chrétienté est héroïque dans les deux cas… La détermination et le dynamisme de nos frères d’Orient a été très inspirant pour ma part.