Caroline Pigozzi, envoyée spéciale de Paris Match à Rome, aurait des informations sur la terra sélectionnée pour succéder à Mgr Aupetit à Paris… : Mgr Jean-Marc Aveline, l’archevêque de Marseille, Mgr François Bustillo, l’évêque franciscain d’Ajaccio, et le père François Boëdec (photo), le jésuite breton. Elle écrit :
D’abord Mgr Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille. […] Le haut prélat s’est fait au passage apprécier des prêtres de Paris, qu’il a accompagnés pendant quatre retraites. Comment ne pas noter par ailleurs des points communs avec le cardinal canadien Ouellet, préfet de la Congrégation pour les évêques, qui, avec les membres de celle-ci, examinera tous les profils, dont celui de l’ancien étudiant à l’université de Québec puis au séminaire d’Avignon auprès du père Joseph Doré, un sulpicien. L’ordre auquel appartient le puissant cardinal. Enfin, personne, parmi ses collègues, n’émet de critique contre le Marseillais d’adoption… Cas rare dans un univers moins charitable qu’on ne l’imagine !
Plus inattendu, frère François-Xavier Bustillo, franciscain de 53 ans, évêque de Corse, où, depuis juin 2021, il officie avec talent malgré le handicap de ne pas y être né. Mgr Bustillo – qui tel le fondateur des jésuites, Ignace de Loyola, a vu le jour en Espagne, dans la région de Pampelune – a étudié la théologie à Padoue et à Toulouse. Auparavant en robe de bure, ancien supérieur gardien du couvent Saint-Maximilien-Kolbe, à Lourdes, et ancien supérieur provincial des franciscains conventuels de France et de Belgique, cet amateur de tennis aurait appris à rebondir… Et comme on dit à Rome : « Bisogna tirare il collo alle galline senza farle gridare » (« Il faut arriver à tordre le cou des poules sans les faire crier ») ! Il a su en effet répondre aux besoins des villes sans abandonner les villages, faire face aux réflexes autonomistes aussi bien qu’au système familial ou clanique… L’île de Beauté n’est point un diocèse de tout repos. Elle exige des qualités qui justifient une ambition : son prédécesseur, le saint-cyrien Mgr de Germay, est maintenant primat des Gaules.
Enfin, le père François Boëdec, 59 ans, un jésuite breton à la tête depuis 2017 de la nouvelle province d’Europe occidentale francophone, territoire qui regroupe environ 500 religieux de France, de Belgique, du Luxembourg, de Grèce et de l’océan Indien. Docteur en sciences politiques, spécialiste du Moyen-Orient, il a enseigné au Liban et il s’implique selon la tradition dans le Service jésuite des réfugiés. Or nul n’oserait, s’agissant du père Boëdec, évoquer le corporatisme. Tout au plus rappellera-t-on qu’il appartient, comme le Pape, à la Compagnie de Jésus.
Qui va décider ? Le choix obéit à la vieille règle des « S » : secret, subtilité, savoir-faire et silence, comme le rappelle un portrait de la Vierge du silence que François a fait placer devant les ascenseurs du palais pontifical. Mais on sait qu’il revient à Mgr Migliore de soumettre au Vatican la « terna », une liste secrète de trois noms, fruit d’une méticuleuse enquête qui touche aussi bien la renommée et la piété que les bonnes moeurs… En tant que préfet de la Congrégation pour les évêques, tous les dossiers arrivent chez le cardinal Ouellet. Affable, de belle allure, fort courtisé, ce Québécois de 77 ans demeure le point stratégique en matière de nominations. Il reçoit les évêques de tous les continents dans ses bureaux du dicastère, au deuxième étage d’un bâtiment donnant sur Saint-Pierre, et écoute ses visiteurs, installés sous une peinture du XIXe représentant l’intérieur de la basilique avec un pape juché sur la sedia gestatoria. Mais il reste mystérieux. C’est sa force, tout comme celle du Souverain Pontife. Car, à la fin, c’est le Pape qui tranchera. « On connaît le caractère déterminé de François, souligne un de ses proches, sa façon d’aller du centre aux périphéries, d’aimer surprendre ! N’a-t-il pas été récemment l’invité spécial de “Che tempo che fa”, un populaire talk-show de Rai 3 ? Il a ses propres contacts et supporte mal de se faire forcer la main. Prisonnier de rien, donc capable de renverser la table ! » […]
Il se raconte sotto voce au Vatican que Paris pourrait avoir la surprise de son archevêque dans l’oeuf de Pâques, le 17 avril. […] La messe semble dite : on murmure que François Boëdec aurait la préférence de ce pape si peu conventionnel, à moins d’une inspiration divine de dernière minute ! ?