Paru dans le journal du diocèse de Rennes, Église en Ille-et-Vilaine n°336 – Janvier 2022 :
Suite à la proposition de loi portée par Mme Albane Gaillot visant à allonger de 12 à 14 semaines le délai légal pour l’avortement, les débats parlementaires sont vifs. La réclamation de cet allongement est due à la déficience de notre système de santé. Le problème est donc pris à l’envers ! L’éthique est absente des arguments avancés. Le Collège des gynécologues s’oppose à cet allongement.
Le regard de la foi en Dieu apporte une lumière sur la dignité de l’être humain conçu, mais aussi sur celle de la femme qui le porte en elle. Il s’agit, autant que faire se peut, d’éviter l’avortement ! Comment discerner la juste voie ?
La vie humaine est un don précieux et le droit à la vie est le premier de tous les droits. L’État a donc le devoir de protéger la vie en renforçant la capacité de soins. La vie humaine surgit toujours de façon fragile. C’est pourquoi, elle est confiée à la protection maternelle du corps qui la porte jusqu’à la naissance. Elle est ensuite confiée à l’éducation où l’amour a normalement toute sa place. Quand l’amour manque et que cela fait souffrir l’enfant, la protection est cherchée ailleurs par la diligence de l’État, dans des familles d’accueil, par exemple.
Or, la vie est confiée à nos soins bien avant qu’elle ne surgisse.Elle est le fruit de l’union de l’homme et de la femme. Ceux-ci sont donc appelés à la grande responsabilité de leur liberté dans l’usage de leur faculté de procréer une nouvelle vie humaine. L’éducation affective, relationnelle et sexuelle vise à éveiller à cette belle responsabilité et à prendre soin de cette liberté. Car on ne joue pas avec la sexualité puisque celle-ci a la belle potentialité de faire surgir la vie !
Il existe des grossesses aux conséquences douloureuses, parfois parce que cette responsabilité n’est pas au rendez-vous. Comment alors ne pas accompagner les femmes – parfois mineures – qui se sentent souvent seules pour décider de la suite : faut-il avorter ou garder l’enfant ? Cette question n’est pas anodine pour une mère, tellement le lien entre elle et l’enfant est intime et existentiel. De même l’avortement n’est pas un acte banal de simple « santé des femmes », comme on l’entend sur des bancs de l’Assemblée nationale.
C’est pourquoi, l’accompagnement respectueux des femmes confrontées à ces moments difficiles est précieux pour qu’elles reçoivent des informations exactes et intégrales afin d’être aidées à discerner la décision qu’elles prendront. J’ai entendu à l’Assemblée nationale que ces femmes étaient « humiliées » lorsqu’on leur proposait du temps pour réfléchir. Mais le temps est fondamental pour mûrir un tel choix, surtout dans une société où on a tendance à tout vouloir tout de suite ! Il évite la précipitation, jamais bonne conseillère. Il est nécessaire aussi pour les autres personnes concernées, notamment le père. Souvent, il conduit au choix de la vie, qui donne paix.
Penser à l’avortement, c’est considérer deux êtres humains : la femme et celui qu’elle porte. Tel était l’équilibre de la loi Veil en 1975[1]. Sans oublier la vie en gestation, cette loi veillait à la santé des femmes que la manière d’avorter mettait en péril. Puis, 46 ans après, les perspectives ont changé : dans la loi, l’attention est portée sur « les droits de la femme ». En 2014, ceux-ci ont remplacé la considération de « la mère ». Ainsi se présente la proposition de loi Gaillot. Aucune continuité entre les deux lois, mais un glissement qui aboutit à l’oubli de la vie en gestation.
Ajoutons à cela que ladite proposition prévoit la suppression de la clause de conscience spécifique à l’avortement. Or, le respect de la conscience est en soi essentiel, mais ici de façon spécifique pour les soignants puisqu’en écoutant avec respect la femme, ils sont directement confrontés au respect de la vie.
Pour le croyant en Jésus, né de Marie, le respect de l’être humain en gestation est une lumineuse évidence. De même, l’amour respectueux envers la femme qui est aux prises avec le désir d’avorter, et qui a besoin, non d’être jugée, mais d’être accompagnée avec délicatesse. Aimer à la suite de Jésus dans ces situations ne se fait pas sans souffrances ni sans attentions au chemin de chacun et de chacune.
[1] Rappelons l’article 1er de cette loi : « La loi garantit le respect de tout être humain dès le commencement de la vie. Il ne saurait être porté atteinte à ce principe qu’en cas de nécessité et selon les conditions définies par la présente loi. »