Voici quelques extraits du portrait dressé par le Trombinoscope de Golias, qui accorde une mitre à l’archevêque de Dijon. C’est toujours à prendre avec des pincettes, mais il y a du vrai :
Roland Minnerath (Dijon) se prépare à partir. Il est la preuve vivante qu’un intellectuel brillant ne fait pas un bon pasteur pour autant. On regrette amèrement qu’une intelligence aussi vive soit tombée dans la piété et ne se soit pas passionnée davantage pour le monde contemporain. Son pessimisme foncier le transforme en conservateur de plus en plus affirmé. Même si le bonhomme reste toujours aussi désagréable, il faut, malgré tout, lui être reconnaissant d’avoir sauvé le diocèse de Dijon de la banqueroute. […]
Alors que Roland Minnerath se prépare à quitter Dijon, on est pris par un double sentiment, l’homme psychorigide qui a tant fréquenté de nonces, ne nous manquera guère mais on ne peut que regretter, paradoxalement, que cet archevêque n’ait pas adouci ses conceptions les plus étroites et rendu plus souriante, et moins apocalyptique, une intelligence réelle. Interviewé par Marie-Ange de Montesquieu sur Radio Notre-Dame, à propos du drame provoqué par le mégot de clope qui ravagea Notre-Dame de Paris, il tint des propos d’une certaine élévation dont le Dr Aupetit se serait révélé incapable : « Si on veut unir les hommes, faites-leur bâtir une cathédrale (…), on est uni quand on se met au service d’un projet qui nous dépasse (…), c’est l’expression de notre vision du monde, de notre insertion dans l’univers. » L’archevêque de Dijon a beau vieillir, virer limite pieusard, se confier sans cesse à la Vierge Marie, quand il cite des poètes et des romanciers américains, devant la fringante Marie-Ange qui ne prépare pas toujours ses questions, on sent cette dernière éberluée, elle n’a pas l’habitude d’avoir affaire à tant de savoir. Ce n’est pas n’importe qui, Roland Minnerath, c’est un lecteur, un homme de culture, un pète-sec certes mais aussi un type carré qui a remis d’équerre les finances du diocèse de Dijon, qui se veut enclin au débat sur la redéfinition du ministère. L’excellent théologien qu’il est, le passionné d’histoire de l’Eglise (ce que ses confrères épiscopes ne sont plus) n’a point peur de la disputatio à la sauce médiévale. Si les autres refusent le débat, c’est tout simplement qu’ils n’ont ni les épaules, ni la parfaite connaissance de leur tradition pour faire face à un débat contradictoire. Roland Minnerath s’en va, des évêques de cette envergure intellectuelle, on n’est pas prêt d’en revoir ! Tant mieux diront certains, car l’évêque dans la Côte-d’Or n’a jamais eu beaucoup d’amis, mais quelque part on ne peut que regretter le fait qu’une si vive intelligence théologique n’ait pas rencontré le réel. […]
Certes c’est un classique, sûrement pas un moderniste, qui porte un regard bien pessimiste sur l’avenir de l’humanité. Un homme que le transhumanisme effraie, possédant l’intuition ferme que l’humanité future va devenir une variante du film Bienvenue à Gattaca. Il écrit des ouvrages, des articles pour des revues « pointues », il se passionne pour la période concordataire et notamment la réception du Syllabus. C’est un classique certes, mais moins conservateur qu’on ne le croit sur les questions ecclésiologiques, et pas encore traditionaliste. Les frères en soutane de la Fraternité monastique de Jérusalem, inscrits à Strasbourg, qui ne jurent que par la liturgie et se révèlent souvent des étudiants médiocres, ne lui arrachent aucun sourire de connivence. […]