Els Borst, libérale du parti néerlandais D66 et l’une des principales promotrices de la premier loi au monde légalisant l’euthanasie vient d’avouer que les Pays-Bas ont commis des erreurs en la faisant voter.
Elle était ministre de la Santé en 2001 et porte à ce titre la responsabilité de la loi : au cours d’entretiens avec le Dr Anne-Mei The, anthropologue et juriste qui vient de consacrer un livre à cette histoire (Ceux qui donnent la délivrance à côté de Dieu, Els Borst a reconnu que la légalisation est intervenue « beaucoup trop tôt ». Les pouvoirs publics, pense-t-elle aujourd’hui, n’ont pas prêté l’attention nécesaire aux soins palliatifs et à l’accompagnement des mourants. « Aux Pays-Bas, nous avons d’abord écouté la demande politique et sociétale en faveur de l’euthanasie », assure Mme Borst. « Evidemment, ce n’était pas dans le bon ordre ».
Et d’accuser la « pression sociale » qui cherchait à mettre fin aux « bricolages » illégaux des médecins qui voulaient délivrer leurs patients de leur souffrance ; mais aussi « l’ignorance » de la Deuxième chambre. Mme Borst avait suscité la colère des partis chrétiens en répondant dans une interview – un Vendredi Saint – « tout est accompli » une fois le texte adopté par le Parlement et approuvé par le gouvernement. Le conseil aux médecins ? Il n’est apparu qu’une fois la loi adoptée, avec la mise en place d’une Consultation de soutien pour l’euthanasie aux Pays-Bas, regrette l’ancien ministre
D’ailleurs Anne-Mei The assure qu’en quinze ans de recherche sur l’euthanasie elle n’a rencontré quasiment que des médecins qui vivent difficilement l’euthanasie, à la fois en raison de leurs convictions morales et des émotions suscitées par ce geste.
Que l’euthanasie ne soit souvent pas la « bonne » solution même pour ceux qui en acceptent le principe apparaît dans le fait que la plupart des médecins estiment que la lassitude de vivre ne la justifie pas, mais que ce motif progresse dans les demandes faites par leurs divers patients au fil des ans. De plus en plus souvent, ils ont affaire à des « personnes profondément malheureuses, souvent seules, qui se sentent de trop dans la société et du coup, veulent mourir ». Dans ces cas, ce sont plutôt l’accueil et les soins offerts à ces personnes qui devraient être améliorées plutôt que de mettre fin à leur vie.
Pour Anne-Mei The, l’euthanasie légale, loin de régler les problèmes de fin de vie, les a accentués, à la fois pour les malades, surtout ceux qui sont incapables d’exprimer leur volonté, pour leurs familles et pour les médecins, tout en empêchant que les médecins néerlandais commencent à se familiariser efficacement avec les soins palliatifs.
Tous se souviennent pourtant encore de l’autosatisfaction néerlandaise au moment de l’adoption de cette loi la plus progressiste et la plus pointilleuse au monde, avec ses critères si précis et son respect des libertés individuelles…
Excellent travail. Tu trouves souvent des bons articles dans des langues étrangères.