Mgr Bernard Ginoux, évêque de Montauban, signe une tribune sur la messe dans l’hebdomadaire Valeurs Actuelles :
Devant la difficulté d’accueillir le public dans nos églises, le confinement (premier et second) a vu se développer diverses initiatives pour ne pas priver indûment les fidèles de l’eucharistie. Il est vrai que les catholiques, comme les orthodoxes et certains luthériens, vivent intensément leur rencontre avec le Sauveur dans la messe. Le concile Vatican II rappelle que « le Christ est présent au plus haut point dans les espèces eucharistiques » (Constitution sur la sainte liturgie). Là se trouvent réellement présents le corps et le sang du Christ se donnant dans tout son être. Il est là tout entier : l’homme qui a partagé notre vie sur la terre et le Ressuscité, le Vivant à jamais dans la gloire du Père.
Dieu s’est incarné, a « pris chair » en son fils Jésus, « né de la Vierge Marie » . Cette réalité nous dit que notre foi n’est pas une idée, une philosophie, une simple démarche spirituelle. Notre foi est charnelle : « Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui » , ose s’écrier Jésus (saint Jean 6, 56). Et à chaque messe, le célébrant affirme, agissant en lieu et place du Christ : « ceci est mon corps », « ceci est mon sang » . Le Christ, vrai Dieu et vrai homme, se livre totalement, il est la « nourriture pour la vie éternelle » . Si nous participons à l’eucharistie, nous nous offrons en même temps dans ce sacrifice. Saint Paul demande aux fidèles : « Je vous exhorte, par la miséricorde de Dieu, à offrir vos personnes en sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu. » C’est le culte que nous avons à rendre, dit le même apôtre. Nous vivons alors cet « admirable échange dans lequel nous sommes divinisés » . Notre communion à la chair du Christ ressuscité renouvelle, fait grandir la vie de la grâce divine reçue au baptême. Nous devenons de plus en plus semblables au Christ. Cette assimilation fonde notre union au Christ ressuscité. Nous devenons un avec Lui et nous sommes unis les uns aux autres, « nous qui avons part au même pain de vie » (saint Paul). La messe est en soi une présence aux autres, un appel à la fraternité : elle est communion.
La question se pose alors : la vie du fidèle chrétien a-t-elle besoin de l’eucharistie ? Nous pouvons répondre : oui, sans aucun doute. Bien sûr, nous avons bien des manières de vivre notre foi mais la messe est unique parce que c’est là que, physiquement, réellement, nous vivons cet échange. Il y a rencontre effective et efficace (si notre coeur est purifié) entre le Sauveur et nous : l’eucharistie communique le fruit du Salut, par la foi et la présence divine dans l’hostie consacrée, le fidèle le reçoit.
Il faut donc tenir que la messe est essentielle à ma foi, ce qui explique pourquoi l’Église dans sa tradition bimillénaire demande la pratique de la messe dominicale (Catéchisme n° 2177 et suivants). La pratique signifie la présence : on ne pratique pas un sport devant la télé ! Si donc, pour aider nos fidèles à “sanctifier le jour du Seigneur”, la messe retransmise en vidéo est un palliatif, elle doit nous donner faim de la vraie communion à la présence réelle du Christ Sauveur et à sa rencontre personnelle. Nous ne pouvons pas vivre sans la messe, et la messe est présence à Dieu qui se donne à nous.