Interrogé dans Famille chrétienne, Mgr Macaire, archevêque de Fort-de-France, déclare :
[…] Chaque gouvernement promet sincèrement des solutions radicales : grandes déclarations, lois de renforcement de la laïcité, cours d’éducation civique, livres de caricatures (!), cérémonies d’hommage, manifestations indignées, fichage des renseignements généraux, armement des polices, expulsions ou emprisonnements… Mais pense-t-on vraiment que tout ça va permettre de vaincre la barbarie des idéologies politico-religieuses !? Ces réponses républicaines ont le mérite de tenter l’impossible, mais elles sont limitées par le principe de liberté.
Chez nous la civilisation issue des « lumières », sans église et sans morale, est la société du chacun pour soi, sans foi ni loi. Elle ne peut inspirer le respect et constitue un terreau idéal pour les idéologies politiques, économiques et religieuses les plus violentes. Eh bien, si ce climat de brutalité terroriste se perpétue, le monde politique n’aura, à terme, d’autres solutions que la violence publique et l’abolition des libertés individuelles (notamment religieuses). Certains prônent déjà des chemins totalitaires. On le voit déjà dans les grands système politiques qui se mettent en place autour de nous sur la planète.
Pourquoi s’en prendre à la liberté religieuse ?
En fait, virus et menace islamiste combinés, l’Etat ne sait pas vraiment comment faire avec les cultes. Son logiciel n’est pas adapté aux autres religions. Pourquoi ? parce que l’Etat français et l’Eglise ne sont pas seulement séparés, ils sont divorcés ! Je veux dire par là qu’ils ont été mariés. Et donc que l’Etat français a du mal à ne pas associer les autres religions à l’Eglise, et réciproquement. Il pense que ce sont toutes des institutions organisées avec des pasteurs en communion. Voyez, dans mon diocèse, si le préfet veut avoir des renseignements, ou contrôler qu’une règle est bien respectée dans l’Église, il m’appelle ! Et tout est réglé. Mais s’il veut faire la même chose avec les autres « cultes », il appelle qui ? L’Etat cherche un rapport identique avec les autres religions mais il se rend compte que ça ne marche pas toujours. Il a essayé de susciter le CFCM (conseil français du culte musulman) qui serait l’équivalent de notre conférence des évêques. Mais tous les musulmans ne se reconnaissent pas dedans.
En quoi cela est-il un problème pour les catholiques ?
Comme la puissance publique ne veut pas faire de distinctions entre les cultes, les mesures religieuses légales visent toujours et principalement les catholiques qui se retrouvent impactés pour des problèmes qui ne les concernent pas directement ! En résumé, ce sont toujours les catholiques qui trinquent ! L’Etat est pareil à un corps qui n’a identifié qu’un seul interlocuteur : la France est en train de rentrer dans une sorte de « syndrome de Guillain-Barré » où le système immunitaire déficient attaque les neurones. Pourquoi ? Parce que les « globules blancs » de la France (je pense aux lois sur la laïcité) risquent de dévorer les racines des neurones (à savoir les valeurs et les coutumes du christianisme) au lieu de s’attaquer aux vrais virus (communautarisme, séparatismes, etc.) !
Ce processus a vraiment commencé ?
Oui. Lorsqu’on interdit aux jeunes catholiques de porter une petite médaille de baptême à l’école parce qu’on a peur des signes ostensibles des autres cultes… Ou encore, plus récemment, j’ai été obligé de manifester mon désaccord lorsque le précédent gouvernement a retardé le déconfinement des cultes. C’était pour moi une erreur magistrale, surtout aux Antilles, de faire passer les églises après certains commerces. Il aurait fallu faire l’inverse. L’Eglise s’est montrée exemplaire et a prouvé aux gens ce qu’ils auraient du faire en famille, à l’école ou au travail… Pour preuve, à ma connaissance, depuis le déconfinement il n’y a pas eu de clusters dans nos églises alors que nous avons rassemblé des milliers de personnes.
Faut-il entrer pour autant en résistance ?
Oui. Je me souviens du Cardinal vingt-trois qui a eu des mots, selon moi, prophétiques lors de sa messe d’action de grâce le 16 décembre 2013 : « Notre société qui a voulu assumer la responsabilité du salut sous toutes ses formes et qui est acculée à reconnaître qu’elle ne parvient pas à le garantir, risque de vite devenir une société du soupçon, de la peur et de la délation ». Avant cela, lors de son discours d’ouverture de l’assemblée des évêques de 2013, il nous encourageait à la résistance :
« il existe désormais une « fracture » entre le pouvoir civil et les chrétiens : nous ne devons plus attendre des lois civiles qu’elles défendent notre vision de l’Homme. Nous devons trouver en nous-mêmes, en notre foi au Christ les motivations profondes de nos comportements ».