Interrogé ce matin sur Radio Notre-Dame à propos de la crise du Covid, Mgr Michel Aupetit, archevêque de Paris, a confirmé que 25 à 30% des fidèles ne sont pas revenus à l’église depuis le confinement.
Le docteur Philippe de Labriolle, médecin psychiatre, praticien des hôpitaux depuis la fin des années 80, a été interrogé dans Paix Liturgique sur l’étrange crise du Covid-19 et sur ses non moins étranges conséquences sur et à l’intérieur de l’institution ecclésiastique :
Cette année 2020, quelle pagaille ! Quel pavé dans la mare que ce Covid-19 (abréviation de « coronavirus disease, maladie apparue en 2019 ». Notre quotidien bouleversé, nos emplois menacés, nos aînés séquestrés, nos libertés restreintes ou suspendues, il n’en fallait pas moins pour que la guerre (horribile ratu dictuque) fût prise au sérieux par un vain peuple. Une conscience chrétienne pouvait elle concourir de façon particulière à la compréhension de cette épreuve collective ?
Un catholique du rang ne pouvait sous-estimer le désarroi d’un gouvernement conduit par les circonstances à déclarer la guerre à un ennemi invisible. Partager l’inquiétude de l’homme de la rue, lequel fut prié de ne plus s’y aventurer sans motif grave, ce n’est pas suffisant pour atténuer le doute quant à l’issue d’un tel combat. Le coronavirus, combien de divisions ? Comment neutraliser ses assauts. La Médecine aura-t-elle l’arsenal adéquat ? En attendant d’en savoir plus, l’attitude requise d’un chrétien est de raviver sa prière, et de s’associer à la prière publique de l’Eglise.
Las, dès l’annonce gouvernementale du confinement généralisé, un violent coup de Jarnac nous était infligé par la Conférence des Evêques de France. Loin de saisir l’opportunité d’un regain spirituel à l’occasion, permise par la Providence, d’une mortification collective de l’orgueil humain, cette instance médiatique imposait la suppression du Culte Divin : sacrements différés, suspension de l’assistance à la messe, interdiction de la communion sur la langue, disparition de l’eau bénite, et j’en passe…
De fait, la trahison fut si violente que le Conseil d’Etat, deux mois plus tard hélas, en déclarera les exigences incompatibles avec le Droit en vigueur ! Quoique non associés à la plainte qui permit un tel revers pour nos Ordinaires, certains d’entre eux eurent même l’aplomb de s’en réjouir publiquement. Volant ainsi au secours de la victoire, après avoir fait chorus avec l’abuseur en chef, Mgr de Moulins-Beaufort, les auteurs de cette palinodie, véritable retournement de veste ont montré l’idéal qui mène leur vie, être du côté du manche, quoi qu’il en coûte…
Le témoignage spirituel de l’épiscopat français survivra-t-il à ce collaborationnisme inattendu ?
Vous avez raison : la question est incontournable. Pascal disait « Je suis prêt à croire les témoins prêt à mourir ». Témoin signifie martyr, en grec. Nous voilà fixés sur le crédit que méritent nos pasteurs. Quel enjeu a-t-il pu conduire l’épiscopat français à se soustraire à sa mission d’Eglise ? Relire le discours de Mgr de Moulins Beaufort pour le cinquantenaire du Concile pourrait nous mettre sur la voie. Intitulé « l’Eglise, signe de Dieu », le texte est trouvable dans La Documentation catholique. A Lourdes, devant le gratin des apparatchiks, en 2012, celui qui n’était à l’époque que l’un des évêques auxiliaires de Paris donnait le ton. Grâce au Concile, affirmait-il, l’Eglise a appris à se dégager de tout régime politique pour vivre publiquement l’Evangile. Huit ans plus tard, un genou en terre, le chef de la CEF allait à Canossa. « Cambre-toi, fier si courbe », assénait déjà Léon Daudet à Aristide Briand !
La CEF a-t-elle voulu quelque union sacrée face à l’ennemi invisible ? Se défendre d’être une cinquième colonne fragilisant la politique du gouvernement en place ?
Et, ce faisant, saborder « l’Eglise qui est en France » ? Vous ne trouvez pas ce « sacrifice » par trop conforme à l’attente des loges pour prétendre relever d’une inspiration évangélique ? Que penser alors des nombreux prêtres qui ont continué à célébrer, à confesser, à donner la communion sur la langue, à la façon du clergé réfractaire sous la Révolution ? Leurs aînés, à l’époque, risquaient leur vie. Or, quelle menace pour nos desservants d’aujourd’hui, hormis d’attraper la grippe ? La délation anonyme ? Le désaveu du pape ? Voilà qui finit par devenir flatteur.
Ce risque grippal, parlons-en. Si je suis votre raisonnement, le covid-19 serait une menace surestimée ? Certains spécialistes d’infectiologie, y compris de l’Académie de Médecine, ont parlé d’une « grippette » probable, peu avant que l’Italie voisine ne compte ses morts par dizaines de milliers ?
De fait, d’éminents spécialistes estimaient probable, pour la France, une épidémie faible. Rappelons que la grippe saisonnière, dont le pic est en février, fait, bon an mal an, entre 10000 et 15000 morts par an, sans que le pays soit paralysé. Notons encore que les chiffres de la grippe saisonnière, pour 2020, sont introuvables. Si l’on prend en compte les 10000 décès concernant les usagers d’Ehpad refoulés des services de Réanimation hospitaliers, pour cause de « saturation », c’est-à-dire par choix politique, et dont, par décret ministériel, les insuffisances respiratoires non soignées ont été écourtées par euthanasie au Rivotril, il est légitime de se demander quelle est la létalité réellement imputable au virus incriminé. Le chiffre le plus argumenté actuellement est de 0,5/100 des covidés. A ce jour, le chiffre global est à 31000 décès.
Dans le doute, n’est-il pas prudent de majorer le risque possible pour la collectivité, plutôt que de le sous-estimer ?
Je suis de votre avis. Les précautions prises en 2009 par Roselyne Bachelot à l’encontre de la grippe H1N1, épidémie qui s’est avérée beaucoup plus discrète que prévu, sont dans toutes les mémoires. Masques à profusion (1,4 milliards), doses de vaccins (le virus étant connu) commandées larga manu. La commission parlementaire chargée d’enquêter sur cette politique a interrogé à l’époque le Pr Raoult, déjà reconnu comme un expert de haut vol. Loin d’accabler la Ministre de la Santé, et sans nier le décalage avec les besoins effectivement constatables, il a estimé que nul ne prédit l’avenir avec certitude, et que, la prudence ayant un coût, les achats de la Ministre étaient justifiés.
Plus de masques donc, pas de tests de dépistage, et pas de vaccin disponible. La nouveauté du virus n’explique pas tout. Masques et gels hydro alcooliques manquaient cruellement en mars. Impossible alors d’exonérer le Ministère d’une impréparation fautive ?
C’est la triste réalité, qu’il faut ébruiter. Vous vous souvenez des sophistes tournant en dérision le masque, inutile puisqu’introuvable ? Le confinement a remplacé le masque absent, mais désorganisé massivement l’équilibre sociétal. Aujourd’hui, la généralisation du masque rend inutile tout reconfinement, réhabilite l’accessoire tourné en dérision, et confirme la sophistique de ceux qui nous maltraitent. La vie sociétale n’a que partiellement repris, et, en matière d’emploi, le pire est devant nous.
En clair, la guerre est finie, ou pas ?
La seule guerre qui ait été faite est celle qui a jugulé nos libertés civiles, et détruit nos entreprises méthodiquement. Bien sûr, l’abandon épiscopal en rase campagne, d’autant plus honteux qu’il est désavoué par le martyre accepté des aumôniers fidèles, en est la composante la plus scandaleuse.
Tout de même, les soignants ont fait du bon travail, et sauvé l’honneur !
Beaucoup, c’est vrai. Un de mes cousins, réanimateur à l’hôpital public, est président des présidents de CME des hôpitaux de sa région. A ce titre, il a défilé le 14 juillet en blouse blanche. Depuis, j’ai pu échanger avec lui. Quid du traitement préconisé par le Pr Raoult (hydrochloroquine Azythromycine) ? « J’en avais plein la pharmacie, les mains et les poches ». Avec succès, évidemment. Pourquoi la haine du Ministère contre Raoult ? Pas scientifique ? Erreur ! « Pas assez cher, mon fils ». Comment placer le Remdésivir, cher, donc juteux pour son labo, mais pas très convaincant à ce jour…
Donc finalement, beaucoup de médecins ont fait leur boulot, soigner, en vertu de leur expérience et non de la doxa du Ministère ?
C’est vrai. Mais les soignants qui ont, en Ehpad, expédié ad patres les usagers privés des soins nécessaires se sont déshonorés. Ils ont du sang sur les mains. On attend toujours le désaveu de l’Ordre des Médecins, et celui de la CEF…
Après ce tour d’horizon, il convient de prendre du recul. Comment se fait-il qu’un virus puisse suffire à créer une panique collective ? Un micro-organisme peut-il faire effraction sans signal préalable, comme un coup de tonnerre dans un ciel serein ?
La plupart ne nos concitoyens n’ont pas une connaissance approfondie de l’organisme humain. Ils ignorent notamment le renouvellement continuel des cellules du corps humain. Les lecteurs de romans policiers savent que la police scientifique est à l’affût des empreintes digitales, mais aussi des cheveux, des cellules desquamées, des sécrétions diverses. Lesquelles manquent si elles ont été effacées, donc recherchées, par les coupables. La police compte sur l’ignorance des auteurs d’infractions quant aux traces qu’ils laissent à leur insu sur leur passage.
Beaucoup, c’est vrai, ne conçoivent pas la symbiose, la vie partagée, entre le corps humain et un nombre inouï de micro-organismes dont la fonction est de contribuer aux diverses fonctions vitales, et notamment à la défense de la stabilité du milieu intérieur. La notion de flore intestinale est bien intégrée, mais elle ne représente qu’une fraction de ces auxiliaires précieux, n’est-ce pas ?
D’où la confusion des esprits, compréhensible chez le profane, inacceptable chez un décideur. Le virus est toujours là, nous serine-t-on. Il faut apprendre à vivre avec lui. Et pour cela, obéir à des aveugles conducteurs d’aveugles ? Sommes-nous sur un ring, où deux adversaires s’affrontent ? Cette représentation est infantile. Nous vivons, en permanence, dans un climat saturé de micro-organismes, et nous nous en portons fort bien. Cette gestion immanente, silencieuse, nécessaire et suffisante s’appelle la santé. Prétendre nous apprendre à être en bonne santé est aussi improbable que de prétendre gagner la guerre contre un ennemi invisible.
Dans le roman La guerre des mondes, d’HG Wells, les martiens envahissent la Terre. Victorieusement. Jusqu’à ce que ces intrus, sortis imprudemment de leur propre écologie, soient terrassés par nos microbes terrestres, lesquels ont donc sauvé l’Humanité. Une version cinématographique plus moderne a remplacé le virus biologique par un virus informatique, tout aussi efficace. Il n’y a donc pas à diaboliser l’effet viral ?
Il s’agit d’un rapport de forces, comme en politique. Le virus de la variole a failli détruire toute la descendance française de Louis XIV. Son arrière-petit-fils, qui deviendra Louis XV, était le dernier fils survivant du duc de Bourgogne, petit-fils du Roi Soleil. La vaccination antivariolique fut la première, et la plus emblématique des vaccinations. Les coronavirus, selon leur variété, et l’organisme ciblé, passent souvent inaperçus, parfois moins discrètement, et de temps en temps déstabilisent les patients, aidés en cela par des bactéries dites opportunistes. Un organisme en bonne santé, sans comorbidité à déplorer, peut affronter sans difficulté une charge virale modérée. C’est cet objectif qu’a le traitement du Pr Raoult évoqué plus haut : réduire la charge virale, et juguler une surinfection débutante. Traiter le Covid-19, c’est réduire le nombre des assaillants, et combattre le plus vite possible les complications qui surgissent. Tout porte à croire que nos voisins italiens se sont rués imprudemment dans les hôpitaux saturés de patients contagieux, d’où les chiffres élevés de morbidité et de létalité. Une contamination « nosocomiale », acquise en milieu hospitalier.
Revenons sur la notion d’ennemi invisible. Depuis L’homme invisible, d’HG Wells, déjà cité, jusqu’à Prédator, l’Alien invisible du cinéma américain des années 90, on sait que l’ennemi invisible est invincible, sauf s’il peut être cerné, dans un espace maitrisable. On peut concevoir que le confinement, et à fortiori la mise en quarantaine, procède de la même logique. Loger approximativement l’adversaire de présence indécidable peut conduire, selon un objectif militaire, à détruire préventivement la zone suspecte. La nation « en guerre » s’est laissée assigner à résidence, sous la pression certes, mais en acceptant de réduire drastiquement les contacts. Fallait-il s’y résoudre ?
Cette politique s’est imposée, à l’impératif, sous peine d’amende. La population a globalement obtempéré. Mais serait-on quitte après la réclusion. Le virus va d’organisme en organisme. Il ne vit que quelques heures à l’air libre. Le confinement a pallié l’absence de masques. Le lavage des mains ne nécessite que de l’eau et du savon. Lorsque le déconfinement a été décidé, pour éviter le naufrage économique et relationnel d’une paralysie générale, l’objection a surgi : si les contacts reprennent, le virus va s’en donner à cœur-joie, faute d’immunité collective. Mais pour qu’il y ait une immunité collective, qui prive le virus de ses hôtes humains, il fallait que son passage préalable ait créé cette immunité collective. En clair, pour que tous ne soient plus atteints, il fallait que tous aient déjà été atteints. Quel casse-tête !
Voulez-vous dire que le gouvernement est dans l’ignorance totale de la conduite à tenir ? N’est-ce pas trop anxiogène pour la population ?
Vous avez assisté, durant le confinement, à ces laborieux décomptes officiels, à ce déballage de chiffres et de graphiques cherchant à maitriser l’inconnu. Le critère opérationnel officiel, souvenez-vous, était ainsi défini : Y a-t-il encore des places en Réanimation ? Les refoulés des Ehpad, achevés légalement, seront-ils reconnus victimes de la pénurie de lits de réanimation en France (5000 lits, cinq fois plus en Allemagne). En cette fin d’été, on assiste à un nouveau festival cacophonique. On entend tout et le contraire de tout. Les médias se frottent les mains. Semer l’insécurité, c’est tout bénéfice pour eux. Quant aux hommes politiques, à les en croire, le pays est plus facile à gouverner si tous les rats sont dans leur cage, sans en sortir. On peut alors, en gardant quelque indépendance d’esprit, formuler un vrai soupçon. Et si, pour l’oligarchie au pouvoir, l’ennemi invisible n’était autre que l’homme libre, l’animal doué de raison, le roseau pensant. Comment tuer la pensée, sinon par la diffusion large du prêt-à-penser ?
Ce que vous suggérez n’est-il pas à rapprocher de l’expérience de l’éthologue américain Stanley Milgram ? Dans son essai Soumission à l’autorité, dont le film I comme I care illustra la thèse, Milgram montrait que l’éthique était soluble dans un excipient d’allure scientifique. Donner un ordre odieux expose à un refus d’obéissance, fût il couteux. Mais se voir proposer de servir la science écarte immanquablement les objections. Etonnant, non ?
Vous avez raison d’évoquer Milgram, car Milgram, dont l’apport fut précieux, est désormais dépassé. En Ehpad, les victimes refoulées des services de Réanimation ont été achevées par l’emploi du Rivotril à rebours de sa contre-indication connue. Nul besoin d’exciper d’une justification scientifique. Il ne s’agissait pas d’accroitre les connaissances scientifiques, mais d’utiliser ce savoir pour tuer. Les transgressifs ne se cachent même plus. Il est vrai qu’un décret ministériel couvre cet usage. Les tribunaux compétents sont d’ores et déjà saisis.
Allons plus loin encore, car notre foi l’exige : un ennemi invisible existe bel et bien, de longue date, et pour le temps que Dieu décidera. Il se nomme Satan, et c’est l’ennemi du genre humain. L’Eglise le combat, depuis qu’Elle existe.
C’est tout à fait vrai. Par permission divine, le Prince de ce monde fait miroiter les biens terrestres en avivant leur séduction. C’est notre dignité d’hommes libres que de nous soustraire à ses mirages, en choisissant l’Alliance qui conduit au Ciel. L’Eglise ne prétend pas faire disparaître Satan, elle l’éloigne, par les grâces qu’Elle reçoit du Christ, et nous invite à en faire autant.
Est-ce s’égarer sur le terrain de l’imaginaire que de suggérer une complicité objective entre l’orgueilleux virus qui nargue la planète, et quelque plan délétère du Prince de ce monde ?
Une distinction s’impose : le virus ne fait jamais que ce que sa nature de virus lui impose de faire, à savoir persévérer dans l’être à travers un organisme d’accueil différent du sien. S’il n’est pas sans effet de nuisance, il est sans malice. Le démon, lui, veut nous séparer de Dieu. Une souffrance humaine est pour Satan comme une porte d’entrée possible. Satan est un chien attaché, nous dit Saint Augustin. Restons à l’écart, et, partant, à l’abri. Inversement, toute désespérance nous met à l’affut de consolations immédiates, hasardeuses bien souvent. Nous avons peur de mourir ? C’est naturel. Nous sommes prêts à tout pour ne pas mourir ? C’est absurde. Nous sommes furieux de ne connaître ni le jour ni l’heure ? Eh bien, soyons prêts à paraître !
Pourquoi nos évêques ne tiennent-ils pas ce discours ? Pourquoi ont-ils étouffé le Culte Public ? Pourquoi faire de l’ombre à la Gloire de Dieu en pleine débâcle ?
Vous retournez le fer dans la plaie…J’ai formé en avril l’hypothèse suivante : cette apostasie de fait est le coming-out de leur incrédulité. Je conjecture, en sus, à ce jour, une soumission lucrative d’une façon ou d’une autre par rapport au gouvernement. Ils ont joué gros, et perdront plus encore. Les fidèles des paroisses ne s’y sont pas trompés : un sur trois, voire un sur deux n’a pas réintégré la « communauté » si brutalement laissée pour compte…