Dans une tribune publiée dans Le Figaro à l’occasion de la 2e lecture du projet de loi sur la bioéthique, Mgr Aupetit, archevêque de Paris et ancien médecin, dénonce la volonté d’adopter de façon accélérée ce projet de loi avant les vacances parlementaires :
Sans vergogne, alors que notre pays vient de traverser une crise sanitaire qui l’a mis à genoux, la priorité du gouvernement est de faire adopter à l’Assemblée nationale le projet de loi bioéthique. Celui-ci porte en lui-même des basculements considérables modifiant gravement et dangereusement les fondements de ce que notre civilisation a construit pour le respect de l’homme, de sa dignité, de sa vie et de sa santé. Alors que la plupart des réformes importantes sont à reporter ou à revisiter, il n’y aurait pas d’autres urgences aujourd’hui que de faire passer en force et dans la discrétion du mois de juillet cet ensemble de lois qui touche à l’essence même de notre humanité. Ceci au nom d’une prétendue égalité revendiquée par des personnes qui se trouvent dans des situations particulières, lesquelles ne requièrent aucunement l’égalité des droits, comme l’a bien dit le rapport du Conseil d’État. Alors, parlons d’égalité!
Nous sortons de trois mois de confinement. Nous sommes fiers de nos soignants, mais sans doute moins de la manière dont nous avons traité beaucoup de personnes âgées. Certaines sont mortes sans avoir pu voir leur famille une dernière fois, d’autres n’ont pu recevoir les soins d’hygiène ni bénéficier du minimum de relation qui maintien le lien social. Certes, il s’agissait sans doute de protéger des personnes dont l’âge, associé à des soucis de santé, ne permettait pas de survivre à un temps prolongé en réanimation. Mais la pandémie a surtout mis un coup de projecteur supplémentaire sur la tristesse de la situation des Ehpad, souvent par manque de personnel. Pendant ce temps-là, de gros investissements sont prévus pour l’«intelligence artificielle», alors que d’autres discutent euthanasie. Considérons-nous vraiment que nos aînés soient nos égaux?
La pandémie dont nous sortons à peine nous a rappelé notre commune vulnérabilité, la nécessité de revenir à une certaine sobriété, la richesse en même temps que la fragilité des relations familiales, et voilà que le gouvernement pense terminer rapidement la discussion de ce projet de loi de bioéthique comme si rien ne s’était passé. Nous pouvions déjà être surpris par une certaine obsession à faciliter l’élimination des enfants dans le ventre de leurs mères en faisant de l’IVG une priorité en temps de confinement, alors même que les urgences cardiovasculaires restaient en souffrance pour favoriser l’accueil des patients atteints par le Covid-19. Obsession relayée par certains amendements discutés actuellement en commission spéciale de l’Assemblée nationale.
La culture de mort qui plane sur notre pays a été amplifiée par la peur de mourir occasionnée par la pandémie. Nous voici engagés de nouveau tête baissée dans le bouleversement des relations généalogiques qui structurent la personne, dans la banalisation des embryons humains sélectionnés, analysés et jetés comme de vulgaires produits consommables, dans la production artificielle de gamètes qui n’a d’autre intérêt que celui d’alimenter le mythe d’une procréation «hors sexe».Nous savons qu’il faut relancer le commerce et l’industrie, mais pas au prix de la dignité de l’être humain. Le choix d’ouvrir en grand le marché des enfants, en dissociant l’assistance médicale à la procréation des difficultés à concevoir, est une atteinte grave à la dignité humaine. Ce choix de favoriser l’industrie procréatique en l’alimentant d’embryons toujours plus nombreux, montre bien les raisons mercantiles qui fondent ce projet. L’embryon humain est-il notre égal?
Comme pour la liberté de culte, l’épiscopat se contente de parler mais ne propose aucune action.