Message à l’occasion des 10 ans d’ordination épiscopale de Mgr Jacques Benoit-Gonnin samedi 2 mai 2020.
Regrets … Joie … Espérance
Nous avons appris du Premier Ministre qu’il était « légitime de leur demander [aux cultes] de ne pas organiser de cérémonies avant le 2 juin. » Nous n’avons pas bien compris pourquoi. La liberté de culte ne mérite-t-elle pas une considération particulière, et comme d’autres croyants, les chrétiens catholiques ne se sont-ils pas montrés loyaux, soucieux du bien commun et « obéissants » ? Les évêques de France ont exprimé leur étonnement et leurs regrets ; ils ont pris acte de cette nouvelle échéance. Pour ma part, j’ai fait de même auprès du Préfet de l’Oise. Mais notre tristesse ne saurait l’emporter ainsi que notre impatience, sur notre désir de vivre selon l’évangile et d’imiter le Christ mort et ressuscité. Si notre liberté de célébrer notre foi est essentielle et nous fait ressentir plus durement de ne pouvoir le faire, nous savons bien que notre foi ne se réduit pas au culte. Notre foi est vivante ; elle se nourrit et s’exprime de manière multiforme. Dans ce sens, tout comme Mgr de Moulins-Beaufort, Président de la Conférence des évêques de France, j’invite tous les chrétiens catholiques, (prêtres, diacres, consacrés et laïcs) à ne pas se laisser décourager ! Avançons avec humilité, courage, et persévérance, en donnant une place accrue à la lecture et la méditation de la Parole de Dieu, à la prière personnelle ou avec d’autres, à la charité concrète et inventive avec notre entourage. Rappelons-nous ceci, qui est d’une grande importance : si nous ne pouvons célébrer l’eucharistie dans nos communautés, nous croyons que la communion spirituelle d’amour que nous faisons avec le Seigneur, nous donne la force nécessaire pour vivre comme l’eucharistie nous permet de le faire. Nous ne pouvons toujours pas célébrer l’eucharistie, mais nous pouvons toujours en vivre ! Si le pain eucharistique nous manque, rien n’empêche l’Esprit Saint de faire de nous un « pain rompu pour un monde nouveau », sinon un cœur amer qui se ferme et perd la charité.
Certains d’entre vous y étaient et en gardent souvenir ; il y a 10 ans, ce 2 mai, le Cardinal Vingt-Trois, entouré de Mgr Jordan, de Mgr James et d’une vingtaine d’autres évêques m’ordonnait évêque, pour le diocèse de Beauvais. Au terme de la célébration, je prononçais ces mots qui m’avaient moi-même surpris, mais qui venaient du fond de mon cœur : « Je vous aime ! » J’y suis souvent revenu, et j’ai été amené à penser que je n’exprimais pas seulement mes sentiments, mais que je vous disais ceux du Seigneur envers vous. Il vous aime, chacune et chacun, d’où que vous soyez, qui que vous soyez. Je lui demande et il me donne d’être une expression (imparfaite, mais pas fausse) de son amour pour vous. Durant ces 10 années, ensemble, nous avons porté le poids des jours, avec leurs peines et leurs épreuves, avec leurs joies et leurs réussites, avec leurs projets et leurs incertitudes … Jamais la proximité et la grâce de Dieu ne nous ont manqué ! Jamais, il ne s’est découragé de nous ; il n’en a pas fini avec nous. Avec nous, il veut encore habiter des communautés fraternelles et proposer l’Évangile aux hommes et aux femmes de l’Oise ! J’ai été heureux avec vous, et je compte bien l’être encore, avec la grâce de Dieu et votre fidèle engagement. À celles et ceux que j’ai blessés ou avec lesquels j’ai été maladroit, je demande pardon ou compréhension ; à tous, je demande de remercier le Seigneur ; pour tous, je lui demande de poursuivre l’œuvre qu’il a si bien commencée, par l’annonce de l’évangile et pour le salut du monde. Avec le souffle de l’Esprit Saint et le soutien de Notre Dame, nous pouvons avancer humblement, courageusement et joyeusement.
Notre Mère Église nous invite, ce dimanche, à prier pour les vocations. Nous ne pourrons le faire comme nous l’avions imaginé, avec une marche des jeunes. Ce n’est que partie remise ! Je vous invite à le faire en demandant, chers jeunes et vous tous qui les entourez, d’avoir un cœur ouvert, disponible et généreux. Toute vocation chrétienne suppose un cœur pour entendre l’appel de Dieu et oser une réponse. Toute vocation chrétienne a besoin de témoins et de communautés fraternelles et nourrissantes.
Enfin, nous entrons dans le mois de mai, où l’Église aime se tourner vers Marie et l’invoquer. Elle a été si proche de Jésus, notre Dieu et notre Sauveur. Elle l’a si bien connu, qu’elle peut bien nous apprendre à le chercher encore, à l’écouter, à lui ouvrir notre cœur et notre liberté, à le suivre. Dans les temps inédits que nous vivons, avec les contraintes que nous connaissons et qui nous pèsent, avec les incertitudes qui émergent et les misères multiples qui vont frapper les plus fragiles et les plus démunis, demandons à Marie de nous aider et de nous inspirer une vraie ouverture du cœur, des solidarités concrètes, une inventivité tournée vers une société plus sobre, plus attentive à faire leur place aux pauvres, et à mettre en place des relations plus bienveillantes et solidaires. Pour cela, je vous encourage tous à célébrer quotidiennement le chapelet, ce chemin de prière simple, avec Marie et les Évangiles. Faites-le, à plusieurs (en fraternité !) ou seuls ; avec Radio-Notre Dame (FM 100.7), à 15h30, en lien avec la grotte de Lourdes. Ainsi nos cœurs se prépareront à cette Année avec Marie que nous engagerons, le 8 septembre prochain.
Pour terminer, ne nous laissons pas voler l’espérance qui vient de la mort et de la résurrection de Jésus ! C’est elle qui nous attache à Jésus vivant, aimant et servant ; c’est elle qui nous permet d’affronter et de dépasser les obstacles et les épreuves ; c’est elle qui fait de nous ces témoins d’avenir dont notre monde a besoin.
Haut les Cœurs !
Que le Seigneur vous bénisse tous !
+ Jacques Benoit-Gonnin,
Évêque de Beauvais, Noyon et Senlis
2 mai 2020,
10è anniversaire de ma consécration épiscopale