Tanguy Chatel, sociologue, cofondateur du Cercle vulnérabilités et société, est interrogé dans La Croix sur l’évolutions des lois de bioéthique :
L’évolution de ces lois repose fondamentalement sur un rapport complexe à la vie et à la mort. Nous sommes à la croisée des chemins. Trois grandes tendances s’affrontent, que l’on peut essayer de présenter à très grands traits. La première, historique, est celle des pro-vie, qui promeut une éthique pour la vie selon laquelle tout doit être entrepris pour la préserver. La seconde, qui se prétend moderne, repose sur une volonté de s’affranchir des lois de la nature pour faire droit à la volonté et au bien-être individuels ; elle promeut une éthique de la liberté. Cette voie repose sur un rapport complexe à la mort et aboutit tantôt aux revendications en faveur de l’euthanasie, tantôt au transhumanisme. La troisième voie repose sur un modèle intermédiaire : l’homme est reconnu comme vulnérable par essence, soumis aux lois de la nature, mais pleinement acteur de sa vie, et la mort n’est ni abominable ni souhaitable. Cette voie promeut une éthique raisonnée de la vulnérabilité et de l’accompagnement.
Où en est-on aujourd’hui entre ces trois voies ?
Je pense que ce qui résiste dans notre pays, c’est précisément cette troisième voie, médiane, qui rassemble les voix de ceux qui prennent en compte les progrès de la science tout en ayant conscience de l’existence de limites pertinentes. C’est cette voie qui a abouti à l’adoption des deux lois « Leonetti », qui appelle à la fois à la responsabilité et à la mesure.
Vincent Lambert entre-t-il dans le champ de la loi Leonetti ?
Le gouvernement essaie de se tenir dans cette voie quand il résiste d’une main à la légalisation de l’euthanasie tout en légitimant l’arrêt des traitements, et quand il ouvre l’autre main à la PMA tout en refusant la GPA. Il n’est ni dans une ouverture systématique, ni dans une résistance automatique. On peut interpréter cela de deux manières : certains pensent cyniquement qu’il s’agit tantôt d’une folle ouverture, tantôt d’une fermeture aveugle, motivée par un calcul politique. Je pense plutôt que c’est une forme d’évolution prudente, dans une écoute raisonnée des diverses revendications.
La mort prudente, raisonnée, donnée non par une piqure violente mais en refusant l’hydratation d’une personne handicapé… La privation de père, une évolution prudente… Les mots n’ont plus de sens et les journalistes de La Croix sont encore une fois à la remorque du régime en place.