De Mgr Pascal Wintzer, archevêque de Poitiers, sur le site du diocèse :
Depuis quelques mois des actes de vol et de destruction se sont multipliés dans les églises de maints diocèses de France, en particulier dans notre diocèse.
Il est difficile de dire les motifs de ces actes, ils sont certainement multiples : vol, bêtise qui casse et détruit, volonté d’exprimer un rejet de l’Eglise en raison des scandales sexuels qui ont été révélés, acte antireligieux aussi et profanation.
Je reconnais que, dans un premier temps, je n’ai pas voulu donner plus d’importance que ceci à ces faits, en particulier en raison du peu de réponses dont nous disposons quant aux intentions de ceux qui les ont perpétrés. Je résiste aussi à l’inflation de la « victimisation ». Aujourd’hui, pour être considéré par les autres et par la société, parfois pour prouver à soi-même le prix de son existence, on s’érige en victime. En l’espèce, se développe l’emploi d’un suffixe que l’on fait précéder de multiples mots ; pour nous, on parlera de « christianophobie ». Des observatoires auto-proclamés, dont on cherche la qualité scientifique des études, se font fort de répertorier les actes qui ressortissent de ce phénomène.
Malgré tout, des actes de violence à l’encontre d’églises et de ce qu’elles contiennent se poursuivent. Aucune personne n’a été physiquement attaquée, pourtant, de tels actes, quelle qu’en soit la nature, infligent une réelle violence aux croyants, comme à d’autres qui ne supportent pas que l’on manque de respect aux convictions et aux croyances.
Au nom des prêtres, qui vivent toujours ces actes avec une profonde douleur, au nom des fidèles, il y a un moment où l’on doit dépasser ses propres préventions pour dire que dans une société démocratique, qui prône en permanence le respect, dont les lois protègent les convictions des populations, il est intolérable que des signes religieux soient volés, détruits ou profanés.
Ceci est d’autant plus violent lorsque c’est le cœur de la foi chrétienne, la présence du Christ dans le sacrement de l’eucharistie, qui est atteint, ici qui est profané.
Le tabernacle est le lieu le plus précieux d’une église, non en raison d’une quelconque qualité pécuniaire, mais parce qu’il abrite la présence eucharistique.
Attenter à cette présence revient à attenter à une personne réelle. Pour cela, les chrétiens ont toujours posé en parallèle le respect dû aux personnes les plus fragiles et celui dû à l’eucharistie. Ces deux attitudes sont complémentaires, elles s’appellent l’une l’autre, il en va du respect de l’unique commandement de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain.
Lorsque ces actes interviennent, il convient de porter plainte : l’Etat et les collectivités publiques ont l’obligation légale de protéger les personnes et les biens, aussi d’agir contre le manque de respect envers les personnes dans leurs convictions.
Je souhaite cependant que nous continuions à maintenir ouvertes nos églises, les fermer serait donner raison à ceux qui, d’une manière ou d’une autre, par cette violence, veulent effacer la présence chrétienne de la société.
Il convient cependant de sécuriser autant que possible les tabernacles et les sacristies ; il faut ici rappeler les propriétaires à leur responsabilité.
Enfin, pour les églises où la messe n’est que très rarement célébrée, sans doute est-il préférable que le Saint-Sacrement n’y soit pas conservé. Dans les autres églises, selon les normes liturgiques, on évitera que les tabernacles accueillent des ciboires pleins : la réserve eucharistique est destinée à la communion des malades et à la vénération, non à constituer des « stocks ». Sauf exception, on communie au pain consacré à la messe à laquelle on participe.
Quoi qu’il en soit, chaque acte de ce type est intolérable, il doit être dénoncé et sanctionné, selon ce que prévoit la loi française. Il ne saurait cependant nous faire oublier nos propres responsabilités : avant tout le respect que nous manifestons dans nos vies et nos attitudes, d’abord pour l’eucharistie, mais aussi pour nos églises, ceux et ce qu’elles accueillent ; ensuite une attention à dire le sens de cela pour des personnes qui ne profitent plus de ce que transmettait hier la culture commune du pays ; enfin le devoir de prier pour ceux qui nous infligent des blessures.
Je note la petite pique méprisante à l’encontre de mon confrère Daniel Hamiche, qui tient chaque jour à recenser les actes de christianophobie sur son blogue (“Des observatoires auto-proclamés, dont on cherche la qualité scientifique des études, se font fort de répertorier les actes qui ressortissent de ce phénomène.”). C’est certainement un acte de cléricalisme à dénoncer… Peut-être est-ce trop demander à Monsieur de Poitiers que la conférence des évêques de France s’empare du sujet et recense, de façon scientifique ces actes ?